Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé, par deux instances distinctes, au Tribunal administratif de Versailles de le décharger de l'obligation de payer les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions à l'impôt sur les sociétés dues par la société SA EURODEFHI, pour un montant total, en droits et pénalités, de 127 845 euros, au titre des exercices clos en 1999 et 2000 et au paiement solidaire desquelles il a été assujetti, résultant de deux mises en demeure tenant lieu de commandement de payer du 3 février 2014 et de deux autres mises en demeure tenant lieu de commandement de payer du 26 octobre 2015.
Par un jugement n° 1405334, 1600829 du 17 janvier 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 mars 2017, et des mémoires enregistrés le 27 juillet et 26 octobre 2017, M.B..., représenté par Me Lambert, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° à titre principal, de prononcer la décharge de l'obligation de payer les impositions en cause ;
3° à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de l'obligation de payer les cotisations de contribution sociale généralisée (CSG) d'un montant de 8845 euros des années 1999 et 2000.
4° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- l'action en recouvrement de l'administration fiscale est prescrite au regard des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales dès lors qu'en l'espèce, l'administration disposait d'un délai de quatre ans à compter de la confirmation le 9 janvier 2007, par la Cour de cassation, de sa condamnation au paiement solidaire des impositions sur le fondement des articles 1741, 1745 et 1750 du code général des impôts, pour poursuivre à son encontre le recouvrement des impositions ; aussi, son action en recouvrement a été prescrite le 9 janvier 2011 et les deux mises en demeure du 3 février 2014 ainsi que les deux mises en demeure du 26 octobre 2015 étaient tardives ; en effet, la prescription de l'action en recouvrement n'a pu être interrompue à son encontre à la suite de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société EURODEFHI ;
- la doctrine administrative exprimée au BOI-REC-EVTS-30-20 N° 190 confirme que les actes qui visent la personne poursuivie, non encore débitrice, ne peuvent avoir en aucun cas un effet interruptif sur la prescription des impositions dues par le redevable ;
- à titre complémentaire, il y a lieu de relever que les actes de poursuite n'ont pas été autorisés par le Tribunal de commerce de Versailles, la demande présentée par le fisc en application de l'article L. 643-11 du code de commerce ayant été rejetée par une ordonnance du président du Tribunal de commerce de Versailles du 24 juin 2014 et, dans ces conditions, un délai de quatre années ne pouvait courir à compter du jugement de clôture des opérations de liquidation judiciaire du 9 juin 2011 dès lors qu'il n'avait pas été condamné au paiement solidaire des impositions dues par la société par le tribunal de commerce mais seulement à compter de la décision de la Cour de cassation du 9 janvier 2007 ;
- à titre subsidiaire, la quotité des impositions qui lui est réclamée, d'un montant total de 125 845 euros, est contestable, cette somme ne tenant pas compte d'un dégrèvement de 27 997 euros d'intérêts de retard par le fisc et des décharges partielles accordées par la Cour administrative d'appel de Versailles dans son arrêt du 22 janvier 2009 dont il n'est pas démontré qu'il aurait été complètement exécuté par la seule production, non pas d'un avis de dégrèvement, mais d'un simple " bordereau de certificat de dégrèvement manuel-impôt CP " surchargé d'annotations manuscrites, alors qu'il appartient à l'administration et non à l'ancien gérant d'établir le montant de sa créance ; l'administration a déjà commis dans le passé plusieurs erreurs sur le montant de sa créance qu'elle a accepté de rectifier ; les mises en demeure du 3 août 2017 font d'ailleurs état d'un montant d'imposition inférieur, soit 127 429,23 euros ; en outre, il n'a pas été condamné au paiement solidaire de la contribution sociale généralisée (CSG) des années 1999 et 2000 pourtant mentionnée sur les mises en demeure, ce qui doit conduire au minimum à une décharge de l'obligation de payer concernant cette contribution.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bresse,
- les observations de M.B...,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...a contesté devant le Tribunal administratif de Versailles l'obligation de payer résultant des mises en demeure valant commandement de payer émises par le comptable public à son endroit, respectivement les 3 février 2014 et 26 octobre 2015, pour obtenir paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions à l'impôt sur les sociétés des années 1999 et 2000 mises en recouvrement le 31 mars 2003 à l'encontre de la SA EURODEFHI, dont il était le gérant et l'associé et au paiement solidaire desquelles il avait été condamné sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts. M. B...fait appel du jugement du 17 janvier 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes de décharge de l'obligation de payer ces impositions.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription ". Aux termes de l'article L. 621-40 du code de commerce, dans sa version en vigueur à la date du jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société EURODEFHI : " I. Le jugement d'ouverture suspend ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant : / 1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent (...) / II. Il arrête ou interdit également toute voie d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles. / III. Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence suspendus. ". Enfin, aux termes de l'article 2244 du code civil, alors applicable et dont la substance est désormais reprise, en ce qui concerne l'effet d'une citation en justice, à l'article 2241 de ce code : " Une citation en justice (...), un commandement ou une saisie (...) interrompent la prescription (...) " et aux termes de l'article 2249 du même code dans sa rédaction alors applicable : " L'interpellation faite (...) à l'un des débiteurs solidaires (...) interrompt la prescription contre tous les autres".
3. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'alors que le jugement d'ouverture de la procédure collective ne suspend la prescription qu'à l'égard de la personne visée par cette procédure, l'effet interruptif de prescription d'une déclaration de créance au passif d'une procédure collective ouverte à l'encontre de l'un des débiteurs solidaires, qui produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance ainsi que le précise désormais l'article 2242 du code civil, s'étend aux autres débiteurs solidaires, pour les impositions au paiement desquelles ils sont solidairement tenus.
4. Il résulte de l'instruction que les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à l'impôt sur les sociétés des années 1999 et 2000 notifiées à la société EURODEFHI ont été mises en recouvrement le 31 mars 2003, qu'une procédure de liquidation judiciaire de cette société a été ouverte le 9 mars 2004 et que le comptable a produit sa créance entre les mains du mandataire liquidateur dès le 25 mars 2004 et que des mises en demeure valant commandement de payer ont été notifiées le 6 février 2014 et le 13 novembre 2015 à M.B..., ancien dirigeant et associé de la société EURODEFHI après que celui-ci a été condamné au paiement solidaire des impositions mises à la charge de cette société sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts par un jugement du 27 juin 2005 du Tribunal de Grande Instance de Versailles devenu définitif le 9 janvier 2007 après rejet du pourvoi en cassation formé contre l'arrêt du 11 octobre 2006 de la Cour d'appel de Versailles ayant confirmé cette solidarité.
5. Dans la mesure où la production de sa créance par le comptable public entre les mains du liquidateur-judiciaire le 25 mars 2004 a interrompu la prescription de la créance détenue par le fisc sur la société EURODEFHI et que cet effet interruptif de prescription s'est prolongé pendant toute la durée de la procédure de liquidation judiciaire jusqu'au jugement de clôture pour insuffisance d'actif intervenu le 9 juin 2011, la prescription de cette créance vis-à-vis de la société, débiteur principal, n'était pas acquise à la date à laquelle M. B...a été condamné au paiement solidaire de ces impositions par un jugement du 27 juin 2005 du Tribunal de Grande Instance de Versailles. Le délai de prescription n'était pas davantage expiré à l'encontre de M.B..., devenu débiteur solidaire pour l'effet de la décision du juge répressif, à la date du 6 février 2014, date de notification des mises en demeure du 3 février 2014 dès lors que, contrairement à ce que soutient le requérant, le délai de prescription a recommencé à courir à son encontre, non pas à compter du 9 janvier 2007, date de la décision de la Cour de cassation refusant d'admettre le pourvoi formé contre l'arrêt du 11 octobre 2006 de la Cour d'appel de Versailles confirmant sa condamnation au paiement solidaire des impositions, mais seulement à compter du 9 juin 2011, date de clôture des opérations de liquidation judiciaire de la société EURODEFHI, quand bien même sa condamnation au paiement solidaire des impositions n'a pas été prononcée par le Tribunal de commerce de Versailles mais par le Tribunal de grande instance de Versailles en application de l'article 1745 du code général des impôts et à une date postérieure à la mise en liquidation judiciaire de la société. En outre, la circonstance que le président du Tribunal de commerce de Versailles a rejeté, par une ordonnance du 24 juin 2014, la demande que lui avait adressée le comptable public sur le fondement de l'article L. 643-11 du code de commerce en vue de reprendre les poursuites à l'encontre de la société EURODEFHI, est sans incidence sur la computation du délai de prescription à l'encontre du requérant lui-même. Enfin, dès lors que le délai de prescription a été valablement interrompu par la notification le 6 février 2014 à M. B...des deux mises en demeure valant commandement de payer du 3 février 2014 ainsi qu'il vient d'être dit, ce délai n'était pas davantage expiré à la date du 13 novembre 2015, date de notification de deux nouvelles mises en demeure valant commandement de payer du 26 octobre 2015. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales doit être écarté.
6. M. B...ne saurait invoquer utilement sur le fondement de l'article L. 80 A du LPF les commentaires administratifs publiés au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) sous la référence BOI-REC-EVTS-30-20 n° 190 selon lesquels les actes de la procédure judicaire intervenus avant que la solidarité ne soit établie par une décision juridictionnelle qui ne visent que la personne poursuivie, pas encore débitrice, ne peuvent en aucun cas avoir d'effet interruptif sur la prescription des impositions dues par le redevable légal pour soutenir que les actes accomplis à l'encontre de la société EURODEFHI, redevable légal, ne sauraient avoir interrompu la prescription à son encontre en sa qualité de débiteur solidaire.
7. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction que le montant des impositions dont le recouvrement est poursuivi serait erroné. D'une part, contrairement à ce que soutient M.B..., l'administration a dégrevé le 27 novembre 2008 les intérêts de retard afférents à ces impositions ainsi qu'il résulte des mentions de l'arrêt, devenu définitif, de la Cour administrative d'appel de Versailles du 22 janvier 2009. D'autre part, M. B...n'apporte aucun commencement de preuve de nature à contredire les éléments apportés par le service qui établissent que l'administration fiscale a totalement exécuté l'arrêt précité du 22 janvier 2009 en tant qu'il a accordé à la société EURODEFHI des décharges partielles d'imposition supplémentaires. En outre, la mention, à la suite d'une erreur de plume, " CSG ", contribution sociale généralisée, en lieu et place de " CIS ", contribution à l'impôt sur les sociétés, ne saurait conduire à une réduction des impositions à due concurrence. Enfin, le caractère exagéré de la dette d'impôt, dont le paiement est réclamé au requérant, ne saurait résulter de l'existence d'erreurs qui auraient été commises dans le passé par le service ou du seul constat que des mises en demeure mentionnant des montants d'impositions moindres auraient été notifiées au requérant le 3 août 2017, lesquelles tiennent compte des paiements intervenus dans l'intervalle.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que celles relatives aux dépens doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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N° 16VE02452