Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU a demandé au Tribunal administratif de Montreuil le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'est acquittée à hauteur de 130 494, 26 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012.
Par un jugement n° 1400688 du 13 octobre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 décembre 2015 et 27 mars 2017, la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU, représentée par Me Sarrouilhe, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer le remboursement des montants de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dépenses effectuées pour acquérir les biens ou les services font partie des éléments constitutifs du prix des opérations en aval ouvrant droit à déduction ; ainsi, il est établi qu'il existe un lien direct et immédiat entre l'opération en amont et les opérations en aval ouvrant droit à déduction ;
- les assujettis établis hors de France qui, comme c'est son cas, n'ont pas d'établissement stable en France, sont autorisés à demander le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les services qui leur ont été rendus ou les biens qu'ils ont acquis ou importés en France pour la réalisation ou pour les besoins des opérations dont le lieu d'imposition se situe hors de France mais qui ouvriraient droit à déduction si ce lieu était situé en France ;
- il existe une continuité entre elle et la société de droit français dénommée Eurl Gasperment Environnement Services, sa création résultant exclusivement du déplacement du siège de cette dernière société à Andorre ; toutes deux forment une entité unique en ce qui concerne les relations avec leurs fournisseurs et la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée facturée à l'une ou l'autre ; la circonstance que les factures au titre desquelles le remboursement de taxe sur la valeur ajoutée est demandée aient été adressées par habitude à la société Eurl Gasperment Environnement Services ne fait pas obstacle à ce que sa demande de remboursement soit satisfaite ;
- la taxe sur la valeur ajoutée facturée à tort sur les prestations de services qui lui ont été fournies peut lui être remboursée ; elle est fondée, à ce titre, à se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales des énonciations de l'instruction administrative référencée 3 E-1-83 du 7 février 1983, reprise dans la documentation administrative de base 3 E-2226, n° 10, du 2 novembre 1996 ainsi que des énonciations des commentaires administratifs publiés au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP), respectivement, le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-TVA-DED-50-20-30-20, n°s 30 et 40, et le 25 février 2013 sous la référence BOI-TVA-DED-50-20-30-40, n° 420 ; cette possibilité a également été confirmée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt du 15 mars 2017, aff. 35/05, Reemtsma Cigarettenfabriken GmbH ;
- les opérations de vente de matériels, dont le lieu de livraison est réputé se situer au Congo, ne font pas obstacle au bénéfice du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ;
- ses fournisseurs étaient fondés à appliquer la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que les conditions posées par les dispositions du 1° du I de l'article 262 du code général des impôts n'étaient pas réunies.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Livenais,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU, dont le siège social est situé à Andorre, a pour activité la réalisation, pour le compte de sociétés pétrolières, de prestations de traitement des déchets et boues résultant de l'exploitation de puits de pétrole en République du Congo. Elle a sollicité le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle soutient avoir acquittée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, pour diverses opérations de location et d'achat de matériels. L'administration fiscale a refusé de lui accorder ce remboursement. La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU relève appel du jugement n° 1400688 du 13 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant au remboursement des montants de taxe sue la valeur ajoutée en litige.
2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) V. Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) d) Les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités et les limites du remboursement de la taxe déductible au titre de ces opérations ; ce décret peut instituer des règles différentes suivant que les assujettis sont domiciliés ou établis dans les Etats membres de la Communauté européenne ou dans d'autres pays. ". Aux termes de l'article 242-0 Z quinquies de l'annexe II à ce code : " Est remboursée aux assujettis établis hors de l'Union européenne la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les services qui leur ont été rendus et les biens meubles qu'ils ont acquis ou importés en France au cours de l'année ou du trimestre prévu à l'article 242-0 Z quater dans la mesure où ces biens et services sont utilisés pour la réalisation ou pour les besoins d'opérations visées à
l'article 242-0 N ". Enfin, aux termes de l'article 242-0 N de la même annexe : " Un assujetti non établi en France peut obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens qui lui ont été livrés ou les services qui lui ont été fournis en France par d'autres assujettis ou ayant grevé l'importation de biens en France, dans la mesure où ces biens et services sont utilisés pour les besoins des opérations suivantes : / 1° Les opérations dont le lieu d'imposition se situe hors de France mais qui ouvriraient droit à déduction si ce lieu d'imposition était situé en France. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un assujetti établi hors de l'Union européenne peut obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'opérations qui auraient été imposables si elles avaient eu lieu en France pour des biens qu'il a acquis ou des services qui lui ont été rendus, dans la mesure où les biens et les services en cause sont utilisés pour les besoins de ces opérations et que les prestations de services et les livraisons de biens correspondantes sont imposables à la taxe sur la valeur ajoutée.
3. En premier lieu, l'article 259 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au cours des périodes en litige, dispose : " Le lieu des prestations de services est situé en France : 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France :
a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ; b) Ou un établissement stable auquel les services sont fournis...".
4. La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU demande le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix de prestations de révision de matériels de chantier utilisés en République du Congo ainsi que les loyers payés à divers organismes financiers au titre de la location en crédit-bail d'engins de chantier ou de matériels industriels également utilisés en République du Congo. Il n'est pas contesté que ces opérations constituent des prestations de service qui, en application des dispositions de l'article 259 du code général des impôts précitées, sont imposables dans le pays du preneur. Il est, en outre, constant que la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU n'a pas en France le siège de son activité économique, ni un établissement stable auxquels étaient fournies les prestations de service en cause. Il suit de là qu'au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, ces prestations de services sont réputées être situées à Andorre, où la société requérante, qui a la qualité de preneuse des services en cause, a établi son siège. Dans ces conditions, les fournisseurs français de la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU ne pouvaient appliquer la taxe sur la valeur ajoutée au prix des prestations servies à cette dernière. La taxe sur la valeur ajoutée relative à ces prestations ayant été, ainsi, facturée à tort, la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU ne peut en demander le remboursement, une telle demande ne pouvant être présentée que par les fournisseurs de cette société, qui sont les redevables de cette taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions du 1 de l'article 283 du code général des impôts.
5. La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU soutient, il est vrai, qu'elle est toutefois fondée à demander le remboursement des montants de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été facturée à tort sur le fondement de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 15 mars 2017, aff. 35/05, Reemtsma Cigarettenfabriken GmbH qui, selon elle, admet une telle possibilité. Cependant, par l'arrêt précité, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les articles 2 et 5 de la 8e directive du 6 décembre 1979 doivent être interprétés en ce sens que la taxe sur la valeur ajoutée non due et facturée par erreur au bénéficiaire des prestations, puis versée au Trésor de l'Etat membre du lieu de ces prestations, n'est pas susceptible de faire l'objet d'un remboursement en vertu de ces dispositions et qu'à l'exception des cas expressément prévus par les dispositions de l'article 21, point 1, de la 6e directive, seul le fournisseur doit être considéré comme redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au regard des autorités fiscales de l'Etat membre du lieu des prestations. En outre, les principes de neutralité, d'effectivité et de non-discrimination ne s'opposent pas à une législation nationale selon laquelle le fournisseur peut seul demander le remboursement des sommes indûment versées au titre de la taxe sur la valeur ajoutée aux autorités fiscales, le preneur de services pouvant seulement exercer une action de droit civil en répétition de l'indu à l'encontre de ce fournisseur. La Cour précise que ce n'est que dans le cas où le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée deviendrait impossible ou excessivement difficile que les Etats membres doivent prévoir les instruments nécessaires pour permettre au preneur de récupérer la taxe indûment facturée afin de respecter le principe d'effectivité.
6. Il ne résulte pas de l'instruction, et la société GASPERMENT SERVIES ENTORN SLU ne soutient d'ailleurs pas, que le remboursement par ses fournisseurs des montants de taxe sur la valeur ajoutée qu'ils ont collectés à tort auprès d'elle serait impossible ou excessivement difficile. Dans ces conditions, la société requérante ne peut soutenir que l'arrêt précité de la Cour de justice de l'Union européenne devrait être interprété comme lui permettant, en l'espèce, de demander le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée appliquée à tort par ses fournisseurs de prestations de services.
7. La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU entend, par ailleurs, se prévaloir à l'appui de sa demande de remboursement des montants de taxe sur la valeur ajoutée appliquée à tort au prix de ces prestations de service, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations, d'une part, de l'instruction administrative référencée 3 E-1-83 du 7 février 1983, reprise dans la documentation administrative de base référencée 3 E-2226, n° 10, du 2 novembre 1996 et, d'autre part, des commentaires administratifs publiés au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP), respectivement, le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-TVA-DED-50-20-30-20,
n°s 30 et 40, et le 25 février 2013 sous la référence BOI-TVA-DED-50-20-30-40, n° 420.
8. La société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU ne peut cependant revendiquer le bénéfice, en l'espèce, des énonciations de la documentation administrative de base référencée 3-E-2226, n° 10, mise à jour le 2 novembre 1996, qui commente les modalités d'application des articles 242-0 M à 242-0 T de l'annexe II au code général des impôts dans leur version antérieure au 30 avril 2010, qui ne trouvaient donc plus à s'appliquer au titre de la période en litige, étant devenues caduques. Par ailleurs, la société requérante, installée en Andorre, ne peut pas davantage invoquer utilement les commentaires administratifs publiés sous la référence
BOI-TVA-DED-50-20-30-20, qui concernent exclusivement les assujettis établis dans un autre état membre de l'Union européenne. Enfin, les commentaires publiés sous la référence
BOI-TVA-DED-50-20-30-40, sont postérieurs aux périodes au titre desquelles la société requérante a introduit une demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée, et elle n'établit pas qu'ils ne seraient que la reprise de la doctrine administrative en vigueur au cours de cette période. Ils ne comportent, d'ailleurs, contrairement à ce que soutient la société requérante, aucune interprétation différente de la loi fiscale dont elle pourrait se prévaloir.
9. En second lieu, aux termes de l'article 258 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Le lieu de livraison de biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France : a) Au moment de l'expédition ou du transport par le vendeur, par l'acquéreur, ou pour leur compte, à destination de l'acquéreur ; (...) c) Lors de la mise à disposition de l'acquéreur, en l'absence d'expédition ou de transport ".
10. Les livraisons de biens au titre desquelles la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU demande le remboursement de la taxe sur la valeur joutée ayant grevé leur prix correspondent au rachat, par la société requérante, d'engins et de matériels de chantier auparavant loués en crédit-bail à l'occasion de la fin des contrats de location les concernant. A la date du rachat de ces équipements, il est constant que ceux-ci se trouvaient en République du Congo. Ils ne peuvent donc être regardés comme ayant été livrés en France au sens de l'article 258 du code général des impôts et c'est, ainsi, à tort que les fournisseurs de la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU ont appliqué la taxe sur la valeur ajoutée au prix de cession de ces biens. La société requérante ne peut donc, comme l'a estimé à bon droit l'administration fiscale, en demander le remboursement. La circonstance, invoquée par la société, selon laquelle les conditions dans lesquelles les livraisons de biens peuvent être exonérées de taxe sur la valeur ajoutée en vertu du 1° du I de l'article 262 du code général des impôts est n'auraient pas été réunies est sans incidence sur ce point. Au demeurant, s'agissant de livraisons de biens hors de l'Union européenne à un acheteur qui n'est pas établi en France, et portant sur des biens qui ne sont pas destinés à l'équipement ou à l'avitaillement de bateaux de plaisance, d'avions de tourisme ou de tout autre moyen de transport à usage privé, ces dernières dispositions auraient eu pour effet d'exonérer leur vente de l'application de la taxe sur la valeur ajoutée.
11. Pour ces seuls motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner la pertinence des autrement motifs également opposés, l'administration fiscale a pu légalement refuser à la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU le remboursement des montants de taxe sur la valeur ajoutée en litige.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, les conclusions de la société requérante présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société GASPERMENT SERVEIS ENTORN SLU est rejetée.
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N° 15VE03826