Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ou, à titre subsidiaire, la réduction de cette cotisation.
Par un jugement n° 1510858 du 18 avril 2017, le tribunal administratif a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 août 2017 et 5 avril 2018,
M. et MmeA..., représentés par la SELARL " COLISEE AVOCATS", société d'avocats, demandent à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge demandée ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le gain d'acquisition réalisé par Monsieur A...en 2009 devait être qualifié de complément de salaire et imposé en France dans la catégorie des traitements et salaires, alors que l'attribution des options venait pour partie récompenser son activité de mandataire social au sein de la société ;
- l'imposition du gain d'acquisition doit être proratisée selon le nombre de jours pendant lesquels il a effectivement exercé son activité salariée en France, dès lors que le gain d'acquisition qui a la nature d'un complément de salaire n'est imposable en France qu'au prorata de la période de référence, c'est-à-dire la période qui court de la date d'attribution des options à la date à laquelle le salarié est devenu définitivement propriétaire des options ;
- même avant le 1er septembre 2008, M. A...exerçait une partie de son activité hors de France, à concurrence de 74 jours d'expatriation du 21 mars 2005 au 1er septembre 2008 qu'il convient de déduire des 1258 jours, de sorte que la période de référence ne comprend plus que 1184 jours ;
- du fait de l'imposition de ces gains au Royaume-Uni, ils subissent une double imposition ;
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Munoz-Pauziès,
- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. En 2005, La société Air Liquide a attribué à M.A..., qui était l'un de ses salariés exerçant en France, des options de souscription d'actions. En 2011, alors que M. A... résidait désormais au Royaume-Uni, il a levé les options et cédé les actions ainsi acquises, réalisant un gain de levée de 654 737 euros qui n'a pas été déclaré en France. Toutefois, par une proposition de rectification du 3 juillet 2014, l'administration a taxé ce gain, dans la catégorie des traitements et salaires. M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 18 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande tendant à la décharge de cette imposition.
Sur l'application de la loi française :
2. D'une part, aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française. ". Aux termes du 1 de l'article 164 B du même code : " Sont considérés comme revenus de source française : (..) d. Les revenus tirés d'activités professionnelles, salariées ou non, exercées en France ou d'opérations de caractère lucratif au sens de l'article 92 et réalisées en France ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 80 bis du même code : " I. L'avantage correspondant à la différence entre la valeur réelle de l'action à la date de levée d'une option accordée dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce, et le prix de souscription ou d'achat de cette action constitue pour le bénéficiaire un complément de salaire imposable dans les conditions prévues au II de l'article 163 bis C. ". L'article 163 bis C du même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige, prévoit une dérogation au principe d'imposition du gain de levée d'option à l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires en soumettant cet avantage à un régime d'imposition spécifique, prévu au 6 de l'article 200 A du même code, lorsque le bénéficiaire respecte un délai légal d'indisponibilité avant la cession et que les actions acquises revêtent la forme nominative.
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'avantage égal à la différence entre la valeur réelle d'une action à la date de la levée de l'option et le prix de souscription ou d'achat de cette action constitue pour le bénéficiaire un complément de salaire imposable, alors même que ce gain serait imposé selon le régime spécifique d'imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières.
5. Les options de souscription d'actions accordées dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 et suivants du code de commerce, visent à récompenser et à fidéliser leurs bénéficiaires, qu'ils soient mandataires sociaux ou salariés, en leur offrant la perspective à long terme de divers gains à réaliser lors de la souscription ou l'achat, puis la cession, d'actions. L'exercice du droit d'option entraîne, quelle que soit la catégorie dont relèvent les revenus de son bénéficiaire, une imposition dans la catégorie des traitements et salaires par application de l'article 80 bis du code général des impôts. En application du 1 de l'article 164 B du même code, les salaires sont considérés comme revenus de source française lorsque l'activité professionnelle est exercées en France.
6. Il résulte de l'instruction que la société Air Liquide a attribué à M. A...des options de souscription d'actions en 2005 que ce dernier a levées en 2011, réalisant un gain de levée d'options de 654 737 euros. En application des règles rappelées ci-dessus, ce gain doit être regardé comme un complément de salaire imposable en France, que l'attribution des options soit venue rémunérer l'exercice en France de fonctions de salarié ou celles de mandataire. Dès lors, sur le terrain de la loi fiscale, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les gains de levée d'options en cause étaient imposables en France.
Sur l'application de la convention franco-britannique :
7. Aux termes de l'article 22 de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 : " Les éléments de revenu bénéficiant à un résident d'un Etat contractant, d'où qu'ils proviennent, qui ne sont pas traités dans les articles précédents de la présente convention ne sont imposables que dans cet Etat " ; qu'aux termes de l'article 15 de la même convention :
" 1. Sous réserve des dispositions des articles 16 (...), les salaires, traitements et autres rémunérations similaires qu'un résident d'un Etat contractant reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'emploi ne soit exercé dans l'autre Etat contractant. Si l'emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre Etat (...) ". Ces stipulations doivent être comprises conformément au principe d'interprétation posé au 2 l'article 2 aux termes duquel : " Pour l'application des dispositions de la présente Convention par un Etat contractant, toute expression qui n'est pas autrement définie a le sens qui lui est attribué par la législation dudit Etat régissant les impôts faisant l'objet de la Convention, à moins que le contexte exige une interprétation différente ".
8. En premier lieu, si les requérants soutiennent que l'attribution d'options de souscription d'actions en 2005 venait récompenser, pour partie, l'activité de M. A...en tant que mandataire social et non de salarié, et que le gain réalisé ne pourrait dès lors, dans cette mesure, être regardé comme un salaire imposable en France en application de l'article 22 de la convention franco-britannique, il résulte du protocole transactionnel conclu le 30 juin 2008 dans le cadre de la rupture du contrat de travail entre la société Air Liquide et M.A..., et notamment de son article 1.5, que M. A...s'y engage à restituer toute action qu'il aurait pu détenir au titre de ses mandats sociaux. Ainsi, à la date de levée des options en 2011, M. A... ne possédait plus d'actions ou d'options de souscription d'actions rémunérant son activité en tant que mandataire social, et n'a dès lors pu lever que des options rémunérant des fonctions exercées en qualité de salarié. C'est par suite à bon droit que l'administration a estimé que le gain de levée d'option était intégralement imposable en France en application des stipulations de l'article 15 de la convention franco-britannique.
9. En deuxième lieu, il résulte de la combinaison des dispositions du code général des impôts et des stipulations de la convention fiscale franco-britannique précitées que le gain de levée d'option perçu par un résident fiscal britannique n'est imposable en France que pour autant que l'activité que rémunère l'attribution d'options de souscription ou d'achat d'actions a été exercée sur le territoire français. Lorsque le règlement du plan d'options arrêté par l'entreprise ou le cas échéant la lettre d'attribution des options adressée au bénéficiaire soumet l'exercice de ces options à une ou plusieurs conditions, l'activité rémunérée par l'attribution de ces options est, en principe, dès lors qu'est en général prévue une condition de présence du bénéficiaire dans l'entreprise à la date à laquelle il lève l'option, celle qui a été exercée entre la date de cette attribution et la date à compter de laquelle le bénéficiaire est en droit de lever ces options. Dans le cas particulier où le règlement du plan d'options ou la lettre d'attribution des options permet que le bénéficiaire ait quitté l'entreprise à la date à laquelle il est en droit de lever les options, tout en exigeant de sa part une durée minimale de présence dans l'entreprise à compter de la date d'attribution des options, faute de quoi celles-ci deviennent caduques, l'activité rémunérée par l'attribution des options est alors celle qui a été exercée entre la date de cette attribution et la date à compter de laquelle le bénéficiaire est en droit de quitter l'entreprise sans perdre le bénéfice des options.
10. Il résulte de l'instruction que le règlement du plan d'options prévoit que les options ne pourront être levées qu'à l'issue d'une période de blocage de quatre ans à compter de leur date d'attribution, soit le 21 mars 2009, mais qu'une levée anticipée est possible en cas de licenciement pour une cause autre que la faute grave ou lourde. Si les requérants font valoir que M. A...a été licencié le 1er septembre 2008 et a quitté la France, il résulte des règles rappelées au point 9 que l'activité rémunérée par l'attribution des options est celle qui a été exercée entre la date d'attribution et la date à compter de laquelle M. A...était en droit de lever ces options, soit le 1er septembre 2008, date de son licenciement. Cette activité ayant été intégralement exercée en France, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que, pour la période postérieure au licenciement mais antérieur au 21 mars 2009, le gain de levée d'option ne serait pas imposable en France.
11. En troisième lieu, les nombreux déplacements à l'étranger effectués par M. A...dans le cadre de ses fonctions de directeur financier de la société Air liquide sont sans influence sur la circonstance qu'en application des stipulations et dispositions précitées, il doit être regardé comme ayant exercé son activité en France.
12. Enfin, en quatrième et dernier lieu, la circonstance, à la supposer établie, que
M. et Mme A...aurait déjà été imposés au Royaume-Uni ne saurait remettre en cause le
bien-fondé de leur imposition en France.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
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N° 17VE02696