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03/07/2018 | FRANCE | N°16VE02787

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 03 juillet 2018, 16VE02787


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de les décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010, ainsi que des majorités correspondantes.

Par un jugement n° 1406487 du 6 juillet 2016, le Tribunal administratif de Cergy -Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 août 2016, M. et MmeD..., représ

entés par MeA..., demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de les décharger des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de les décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010, ainsi que des majorités correspondantes.

Par un jugement n° 1406487 du 6 juillet 2016, le Tribunal administratif de Cergy -Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 août 2016, M. et MmeD..., représentés par MeA..., demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de les décharger des impositions litigieuses et des pénalités correspondantes ;

3° de leur accorder le sursis de paiement pendant la durée de la procédure contentieuse.

M. et Mme D...soutiennent que :

S'agissant de régularité de la procédure d'imposition :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée faute pour l'administration d'indiquer selon quels critères elle a conclu que M. D...était le destinataire des chèques émis par l'association Johnny Rock ;

- l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, le principe du contradictoire et les stipulations de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en leur opposant sans leur communiquer les pièces de procédures auxquelles ils n'étaient pas parties, à savoir la les propositions de rectification notifiées à l'association Johnny Rock et à la société Chougrani, ainsi que les autres renseignements qu'elle détenait qui lui permettaient de conclure que les chèques comptabilisés dans le compte fournisseur Chougrani de l'association Johnny Rock les concernaient ;

S'agissant du bien-fondé de l'imposition :

- l'article 109 et le c) de l'article 111 du code général des impôts ne s'appliquent pas aux associations régies par la loi du 1er juillet 1901, sauf à ce que l'association ait opté pour l'impôt sur les sociétés et à la condition que les avantages aient été consentis à des associés ; aucune de ces conditions n'étant remplie, ils ne pouvaient pas être taxés dans la catégorie des revenus distribués sur ces fondements ;

- la réintégration dans leur revenu imposable des chèques émis par l'association Johnny Rock en tant que revenus réputés distribués sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts n'est pas fondée dès lors que l'administration n'a pas justifié du rejet de ces sommes en tant que passif injustifié de l'association Johnny Rock et qu'en tout état de cause ces sommes correspondent à des remboursements de frais pour des prestations réalisées à titre bénévole ;

S'agissant des pénalités pour manquement délibéré :

- elles ne sont pas fondées dès lors que l'administration n'apporte pas la preuve de leur intention délibérée d'éluder l'impôt ;

S'agissant du sursis de paiement :

- ils sont fondés à demander le sursis de paiement.

Vu les pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bruno-Salel, rapporteur ;

- les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme D...ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2010 à l'issue duquel l'administration leur a notifié, selon la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2010, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à raison de la réintégration dans leur revenu imposable de sommes regardées comme des rémunérations ou avantages occultes sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts ; que M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 6 juillet 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par une décision du 5 juin 2018, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé, au bénéfice de M. et Mme C..., un dégrèvement à concurrence de 429 euros en droits et de 206 euros en pénalités des contributions sociales auxquelles les requérants ont été assujettis au titre de l'année 2010, correspondant au montant des contributions sociales résultant de l'application du coefficient multiplicateur de 1,25 prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts ; que les conclusions de M. et Mme C... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le surplus des conclusions aux fins de décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 13 février 2013 mentionne l'impôt concerné et l'année d'imposition ; qu'elle indique que, dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'association Johnny Rock, les éléments recueillis par l'exercice du droit de communication prévu à l'article L. 80 du livre des procédures fiscales auprès de la Caisse d'Epargne Ile-de-France qui détient le compte bancaire de l'association ont permis au service de constater que des chèques débités sur son compte fournisseur " Chougrani MC Déménagement" ont été libellés à l'ordre de M. C... et encaissés par lui pour un montant total de 15 107,10 euros ; qu'elle indique également que l'association est soumise à l'impôt sur les sociétés sur option, que M. et Mme C... n'en sont ni salariés ni fournisseurs et que la société n'ayant apporté aucune justification sur les raisons de ces remises de chèques, le service en a déduit qu'il s'agissait de rémunérations et avantages occultes au sens du c) de l'article 111 du code général des impôts imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que cette proposition de rectification comporte en pièces jointes un listing mentionnant les numéros de chèques, leur date d'émission et les montants concernés ainsi qu'une copie de chacun des chèques listés ; que les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, l'administration a indiqué dans la proposition de rectification du 13 février 2013 qu'elle avait recueilli, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès de la Caisse d'Epargne Ile-de-France qui détient le compte bancaire de l'association Johnny Rock, la copie des chèques émis par cette association et qu'elle les a joint à cette notification ; que les requérants ont ainsi été suffisamment informés de l'origine et de la teneur des renseignements et documents obtenus par l'administration dans le cadre de son droit de communication, qui lui ont été en outre spontanément communiqués ; que si M. et MmeD..., qui n'établissent ni même n'allèguent avoir formé une quelconque demande de communication auprès de l'administration, soutiennent qu'elle ne leur a pas communiqué tous les documents qu'elle aurait obtenus dans le cadre de son droit de communication, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration se serait fondée sur des documents issus du droit de communication autres que les copies des chèques mentionnées ci-avant ; que, par suite, M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que la procédure d'imposition dont ils ont fait l'objet a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et le principe du contradictoire ;

6. Considérant, en dernier lieu, que M. et Mme D...ne peuvent utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et invoquer, sur ce fondement, l'atteinte au principe du contradictoire pour contester les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales devant le juge de l'impôt, dès lors que ces stipulations ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

7. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) les rémunérations et avantages occultes (...) " ;

8. Considérant, d'une part, que les rehaussements contestés ayant été notifiés sur le fondement des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts, le moyen tiré de ce que les requérants ne pouvaient pas être imposés sur le fondement de l'article 109 du même code est inopérant ;

9. Considérant, d'autre part, que le c) de l'article 111 de ce code, qui s'applique aux associations régies par la loi du 1er juillet 1901 qui comme en l'espèce, ont opté pour l'impôt sur les sociétés, permet de taxer dans la catégorie des revenus distribués tout bénéficiaire de rémunérations et avantages occultes, même non dirigeant ou associé, sans que l'administration soit tenue d'apporter la preuve du rejet des sommes en tant que passif injustifié de l'association ;

10. Considérant, enfin, que les impositions ayant été établies selon la procédure contradictoire, il appartient à l'administration d'établir le caractère insuffisant des déclarations des contribuables ; qu'en revanche, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier à quelle catégorie de revenus se rattachent des revenus imposables ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'association Johnny Rock, qui a une activité commerciale consistant en l'organisation de déménagements, a, au cours de l'année 2010, adressé dix-neuf chèques à M.D..., pour un montant total finalement retenu par l'administration, dans sa réponse aux observations du contribuable du 25 avril 2013, de 13 950 euros, débités dans la comptabilité de l'association d'un compte fournisseur " Chougrani MC Déménagement " ; que M. et MmeD..., qui ne contestent ni avoir encaissé ces sommes, ni avoir omis de les déclarer, soutiennent que ces chèques correspondent à des remboursements de frais avancés par M. D...pour réaliser à titre bénévole des déménagements et travaux divers au profit de l'association Johnny Rock, notamment des frais d'essence, d'achats de matériaux et de matériels ; que, toutefois, ils n'apportent aucun élément, qu'eux seuls peuvent détenir, au soutien de leurs allégations ; que, dès lors, les sommes encaissées doivent être considérées comme des revenus réputés distribués, sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts ;

En ce qui concerne les pénalités :

12. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter le moyen de la requête, tiré de l'absence de bien-fondé des pénalités pour manquement délibéré ;

Sur la demande tendant au bénéfice du sursis de paiement pendant la durée de la procédure contentieuse :

13. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 277 et suivants du livre des procédures fiscales, le sursis de paiement accordé par l'administration fiscale n'a de portée que pendant la durée de l'instruction de la réclamation et de l'instance devant le tribunal administratif ; que l'administration fait par ailleurs valoir, sans être contestée, que suite à la demande de sursis de paiement formé par M. et Mme D...par lettre du 23 octobre 2013, régularisée quant à son absence de signature par lettre du 23 avril 2014, elle a, conformément aux dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, suspendu les poursuites jusqu'au jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 juillet 2016 ; qu'enfin, aucune disposition légale n'ayant prévu une procédure de sursis de paiement pendant la durée de l'instance d'appel, les requérants ne sont pas recevables à demander à la Cour de prononcer en leur faveur le sursis de paiement du rehaussement contesté ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. et Mme D...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions en décharge de M. et Mme D... à concurrence de 429 euros en droits et de 206 euros en pénalités en ce qui concerne les contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme D...est rejeté.

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N°16VE02787


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02787
Date de la décision : 03/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : SELARL JEAN YVES LE GOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-07-03;16ve02787 ?
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