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28/06/2018 | FRANCE | N°17VE03166

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 28 juin 2018, 17VE03166


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2016 par lequel le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1704025 du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 octobre 2017, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE

, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par Mme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2016 par lequel le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1704025 du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 octobre 2017, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif.

Le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la commission du titre de séjour n'avait pas été réunie alors que cette dernière a émis un avis le 28 septembre 2016 qui a été adressé le même jour à MmeB... ;

- l'arrêté du 16 décembre 2016 est suffisamment motivé et n'est pas entaché d'un défaut d'examen de la demande de MmeB... ;

- le principe du droit d'être entendu n'a pas été méconnu dès lors que l'intéressée a pu présenter ses observations lors du dépôt de sa demande de titre de séjour ;

- l'arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée à son objet, en méconnaissance des articles L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- Mme B...ne justifie d'aucune circonstance humanitaire ni d'aucun motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré 25 avril 2018, Mme B...conclut au rejet de la requête du préfet, à ce qu'il soit enjoint à ce dernier de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " salarié " ou à défaut " vie privée et familiale ", dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de

100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de

2 000 euros à MeA..., au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la motivation de l'arrêté litigieux est insuffisante ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa demande ;

- elle a été privée du droit d'être entendue, en méconnaissance des articles 41 et 51 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 6 du traité sur l'Union européenne, du principe fondamental de respect des droits de la défense et de l'article 6 de la directive n°2008/115 du 16 décembre 2008 ;

- l'avis de la commission du titre de séjour est irrégulier au regard de l'article R.312-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux articles L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnait le 4. de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'abstenant d'examiner si le métier sur lequel portait son activité professionnelle était caractérisé par des difficultés de recrutement ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'abstenant de statuer sur sa demande de titre sur le fondement de l'article 5 de la convention franco-ivoirienne ;

- l'arrêté a méconnu la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 novembre 2009.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur l'Union européenne ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- la convention conclue le 21 septembre 1992 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire sur la circulation et le séjour des personnes ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Chayvialle a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante ivoirienne née en 1980, a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour le 5 novembre 2015 ; que, par arrêté du

16 décembre 2016, le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ; que, par jugement du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté litigieux ; que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE relève appel de ce jugement ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant que, pour prononcer l'annulation de l'arrêté litigieux, les premiers juges ont estimé qu'il a été pris en méconnaissance des dispositions du deuxième alinéa de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir... /L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a soumis la demande d'admission exceptionnelle au séjour de Mme B...à la commission du titre de séjour laquelle s'est prononcée par un avis du 28 septembre 2016 ; que par suite c'est à tort que le Tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, moyen qui n'était d'ailleurs pas soulevé devant lui, pour annuler l'arrêté du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B...devant le tribunal administratif et la Cour ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

6. Considérant que l'arrêté litigieux comporte l'exposé suffisant des motifs de droit et de fait sur lesquels il est fondé ; que, par suite, le moyen tiré du caractère insuffisant de la motivation, laquelle s'apprécie indépendamment de la pertinence des motifs retenus par l'autorité administrative, ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intimée ; que, contrairement à ce que soutient cette dernière, le préfet n'était tenu ni de statuer sur son droit à obtenir une autorisation de travail, dès lors que la demande correspondante doit être présentée à l'administration par l'employeur préalablement à toute demande de titre de séjour, ni de transmettre sa demande à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

8. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de même valeur juridique que le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et le traité sur l'Union européenne, en vertu de l'article 6 de ce dernier : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

10. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, que les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la charte des droits fondamentaux ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ;

11. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

12. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

13. Considérant qu'ainsi la seule circonstance que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE qui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité par Mme B...en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire n'a pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, convoqué l'intéressée pour lui permettre de présenter des observations spécifiques sur la mesure d'éloignement envisagée ne permet pas de regarder l'intéressée comme ayant été privée de son droit à être entendue, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

14. Considérant que Mme B...ne peut utilement se prévaloir directement de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux pris à son encontre le 16 décembre 2016, dès lors qu'à cette date, ladite directive avait été transposée en droit interne ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article R. 312-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Devant la commission, l'étranger fait valoir les motifs qu'il invoque à l'appui de sa demande d'octroi ou de renouvellement d'un titre de séjour. Un procès-verbal enregistrant ses explications est transmis au préfet avec l'avis motivé de la commission. L'avis de la commission est également communiqué à l'intéressé. " ;

16. Considérant qu'il ressort de l'avis de la commission du titre de séjour en date du

28 septembre 2016, adressé à l'intéressée par courrier du même jour, que cette commission après avoir repris les explications présentées devant elle par MmeB..., relatives à sa vie privée et familiale, notamment le décès de son père, combattant ayant participé à la guerre d'Algérie, et à l'exercice d'une activité professionnelle en tant que garde d'enfant, a indiqué émettre un avis défavorable à la demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié de l'intéressée en raison du caractère insuffisant des éléments présentés ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission du titre de séjour au regard des dispositions précitées manque en fait et doit pour ce motif être écarté ;

17. Considérant qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit " A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus .... L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ; qu'aux termes du 1. de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ;

18. Considérant que l'intimée soutient qu'elle est entrée en France en 1998, qu'elle séjourne de façon continue sur le sol français depuis cette date, que ses parents sont décédés et qu'elle dispose d'attaches familiales en France, l'une de ses soeurs étant ressortissante française, une autre étant titulaire d'une carte de résident ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'elle est célibataire sans charge de famille et elle n'établit pas être dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, en se bornant à affirmer, sans produire aucune justification, que ses deux autres soeurs séjournent au Canada ; que, dans ces conditions, l'arrêté litigieux n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à son objet, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

19. Considérant que si l'intimée soutient qu'elle séjourne en France depuis 2000 et qu'elle exerce une activité professionnelle dans le domaine de l'aide à la personne, dont elle ne justifie que pour quelques mois de l'année 2016, de telles circonstances ne constituent pas des circonstances humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'elle ne conteste pas s'être soustraite à trois précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre les 8 décembre 2005, 3 décembre 2008 et 11 février 2013 ;

20. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant d'exercer son pouvoir discrétionnaire de régularisation, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ou méconnu les dispositions du 4. de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du

16 décembre 2008 ;

21. Considérant qu'en supprimant à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile la référence au troisième alinéa de l'article L. 313-10 du même code, le législateur a entendu, ainsi qu'il ressort des travaux parlementaires préalables à l'adoption de la loi du 16 juin 2011, ne plus limiter le champ de l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, alors annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008 ; que par suite le moyen soulevé par l'intimée et tiré de ce que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE aurait commis une erreur de droit en s'abstenant d'examiner si le métier sur lequel portait son activité professionnelle était caractérisé par des difficultés de recrutement ne peut qu'être écarté ;

22. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la convention franco-ivoirienne : " Pour un séjour de plus de trois mois : / - les ressortissants français à l'entrée sur le territoire de la Côte d'Ivoire doivent être munis d'un visa de long séjour et des justificatifs prévus aux articles 5 à 9 ci-après, en fonction de la nature de leur installation ; / - les ressortissants ivoiriens à l'entrée sur le territoire français doivent être munis d'un visa de long séjour et des justificatifs prévus aux articles 5 à 9 ci-après, en fonction de la nature de leur installation." ; que l'article 5 stipule que : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle salariée doivent en outre, pour être admis sur le territoire de cet État, justifier de la possession : / 1° D'un certificat de contrôle médical établi dans les deux mois précédant le départ et visé : / - en ce qui concerne l'entrée en France, par le consulat de France compétent, après un examen subi sur le territoire de la Côte d'Ivoire devant un médecin agréé par le consulat, en accord avec les autorités ivoiriennes (...) / 2° D'un contrat de travail visé par l'autorité compétente dans les conditions prévues par la législation de l'État d'accueil. " ; qu'enfin, l'article 10 stipule que : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants ivoiriens doivent posséder un titre de séjour. (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'État d'accueil. " ;

23. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que la convention franco-ivoirienne renvoie, par son article 10, à la législation nationale pour la délivrance et le renouvellement des titres de séjour ; que ses articles 4 et 5 se bornent, quant à eux, à régir les conditions d'entrée sur le territoire de l'un des deux Etats de ceux des ressortissants de l'autre Etat qui souhaitent y exercer une activité salariée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE aurait commis une erreur de droit en s'abstenant de statuer sur la demande de titre de séjour de l'intéressée sur le fondement de l'article 5 de la convention franco-ivoirienne doit être écarté ;

24. Considérant que l'intimée ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 novembre 2009 qui est dépourvue de caractère réglementaire et a été, en tout état de cause, abrogée par celle du 28 novembre 2012 ;

25. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement litigieux les premiers juges ont annulé son arrêté du 16 décembre 2016 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction de MmeB... :

26. Considérant que le présent arrêt n'implique pas que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE délivre à l'intimée une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " salarié " ou à défaut " vie privée et familiale " ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de Mme B...doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de Mme B...présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

27. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par MmeB... ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1704025 du 28 septembre 2017 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à

Mme C...B....

Copie en sera adressée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2018, à laquelle siégeaient :

Mme Helmholtz, premier vice-président,

M. Campoy, président assesseur,

M. Chayvialle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 juin 2018.

Le rapporteur,

N. CHAYVIALLELe président,

C.-V. HELMHOLTZLe greffier,

A.-L. PINTEAU

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme

Le greffier,

2

N° 17VE03166


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03166
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Nicolas CHAYVIALLE
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : NUNES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-06-28;17ve03166 ?
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