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31/05/2018 | FRANCE | N°17VE01428

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 31 mai 2018, 17VE01428


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... F...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

1°) d'annuler la décision née du silence gardé par le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Lasserre sur ses demandes du

5 août 2014 tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle pour faits de harcèlement moral et à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 6 juin 2013 ;

2°) de condamner l'EHPAD Lasserre à procéder à la reconstitution

de sa carrière, au besoin sous astreinte, à compter du 6 juin 2013 ;

3°) de condamner l'EHPAD Lass...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... F...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

1°) d'annuler la décision née du silence gardé par le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Lasserre sur ses demandes du

5 août 2014 tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle pour faits de harcèlement moral et à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 6 juin 2013 ;

2°) de condamner l'EHPAD Lasserre à procéder à la reconstitution de sa carrière, au besoin sous astreinte, à compter du 6 juin 2013 ;

3°) de condamner l'EHPAD Lasserre à prendre en charge intégralement ses frais de procédure ainsi que tous les frais afférents à sa réhabilitation au sein du service au titre de la protection fonctionnelle ;

4°) de condamner l'EHPAD Lasserre à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

5°) d'ordonner à l'EHPAD Lasserre de lui communiquer son dossier administratif et médical.

Par un jugement n° 1411583 du 7 mars 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 mai 2017, Mme F..., représentée par

Me Tourniquet, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler la décision née du silence gardé par le directeur de l'EHPAD Lasserre sur ses demandes du 5 août 2014 tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle pour faits de harcèlement moral et à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du

6 juin 2013 ;

3° d'enjoindre à l'EHPAD Lasserre de procéder à la reconstitution de sa carrière, au besoin sous astreinte, à compter du 6 juin 2013 et de prendre en charge l'ensemble de ses frais de procédure au titre de la protection fonctionnelle ;

4° de condamner l'EHPAD Lasserre à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi ;

5° de mettre à la charge de l'EHPAD Lasserre le versement de la somme de

3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme F... soutient que :

- la décision du 6 octobre 2014 rejetant implicitement sa demande de protection fonctionnelle pour faits de harcèlement moral méconnaît l'article 11 de la loi n°83-634 du

13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; elle a subi des agissements qui relèvent, par leur nature, leur caractère répétitif et leur durée, de la définition légale du harcèlement moral telle que prévue par les dispositions de l'article 6 quinquies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la décision de I'EHPAD LASSERRE refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 6 juin 2013 est entachée d'une erreur de droit et d'un détournement de pouvoir ;

- l'EHPAD a commis une faute de nature à lui ouvrir droit à indemnisation en ne saisissant pas la commission de réforme ; elle est ainsi fondée à réclamer l'indemnisation du préjudice de carrière et financier qu'elle a subi du fait de sa mise en disponibilité ; à compter du 1er avril 2014, elle n'a plus perçu aucune rémunération et a perdu ses droits à avancement et à la retraite alors qu'elle aurait dû bénéficier d'un congé maladie à plein traitement à la suite de l'accident de service du 6 juin 2013 ; en outre, jusqu'à l'issue de la procédure auprès de la commission de réforme, elle aurait dû continuer à percevoir son plein traitement, ce qui n'a pu être le cas du fait de la carence de son employeur ; elle est aujourd'hui dans l'impossibilité de se projeter professionnellement et de poursuivre sa carrière ; elle est toujours en situation de disponibilité jusqu'en avril 2018 ; elle est également fondée à réclamer l'indemnisation du préjudice moral et de santé qu'elle a subi du fait de la méconnaissance par son employeur de la circulaire n°DGOS/RH3/2011/491 du 23 décembre 2011 relative aux obligations en matière d'évaluation des risques professionnels dans la fonction publique hospitalière et aux articles

L. 4121-1 à L. 4121-3 du code du travail ;

- l'annulation de la décision de I'EHPAD Lasserre refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 6 juin 2013 implique la reconstitution de sa carrière et le rétablissement de son plein traitement ainsi que de ses droits à avancement et à la retraite rétroactivement au jour de sa mise en disponibilité.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le décret n°86-442 du 14 mars 1986 relatif à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

- le décret n°88-386 du 19 avril 1988 modifié relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraites des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Campoy,

- les conclusions de Mme Belle, rapporteur public,

- et les observations de Me Tourniquet, pour Mme F... et de MeD..., pour l'EHPAD Lasserre.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme F... a été recrutée par l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Lasserre le 21 octobre 1991 sous contrat à durée déterminée en qualité d'agent des services hospitaliers et titularisée dans ce grade au mois de janvier 1995 ; qu'elle a été nommée maître-ouvrier le 1er janvier 2008 ; qu'elle a été placée en congé de maladie à compter du 6 juin 2013 ; que le comité médical départemental des Yvelines ayant estimé le 25 mars 2014 que son état ne justifiait pas l'octroi de congés de longue maladie, elle a sollicité une mise en disponibilité pour convenances personnelles qui lui a été accordée à compter du 1er avril 2014, renouvelée à sa demande pour un an à compter du 1er avril 2015 ; qu'elle a sollicité le 5 août 2014 de l'EHPAD Lasserre l'octroi de la protection fonctionnelle prévue par l'article 11 de la loi n°83-634 du

13 juillet 1983 pour des faits de harcèlement moral dont elle s'estimait victime depuis 2011 en raison de ses activités syndicales, la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident survenu le 6 juin 2013 à l'occasion de l'un de ces faits de harcèlement ainsi que la reconstitution de sa carrière et la régularisation de son traitement, le versement d'une indemnité de

20 000 euros en réparation des préjudices physique et moral qu'elle estimait avoir subis du fait de ce harcèlement, et du préjudice professionnel résultant de sa mise en disponibilité depuis le

1er avril 2014 alors qu'elle aurait dû, selon elle, bénéficier d'un congé maladie à plein traitement à la suite de l'accident de service du 6 juin 2013, ainsi que la communication de son dossier administratif et médical ; que, par un jugement du 7 mars 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête dirigée contre les décisions implicites de la directrice de l'EHPAD Lasserre rejetant ces différentes demandes, tendant à ce qu'il soit enjoint à cet établissement de prendre en charge intégralement ses frais de procédure et tous les frais afférents à sa réhabilitation au sein du service au titre de la protection fonctionnelle ainsi qu'à procéder à la reconstitution de sa carrière à compter du 6 juin 2013, à la condamnation dudit établissement à lui verser une indemnité de 20 000 euros en réparation de ses différents chefs de préjudice et à la communication de son dossier administratif et médical ; que Mme F... relève appel de ce jugement sauf en ce qu'il rejette ses conclusions tendant à la communication de son dossier médical et administratif ;

Sur le rejet de la demande de protection fonctionnelle :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) " ; qu'aux termes de l'article 11 de cette même loi : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (... ). " ; qu'il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

3. Considérant que Mme F... fait valoir qu'à compter de sa désignation en tant que déléguée syndicale au sein de I'EHPAD Lasserre au mois d'octobre 2011, elle a subi une baisse de sa notation annuelle, que ses attributions professionnelles ont été revues à la baisse en dépit de la progression de sa qualification, qu'elle a fait l'objet de contrôles plus nombreux et d'exigences accrues dans l'exercice de ses missions ainsi que d'une mesure de suspension qui ne s'est finalement traduite par aucune sanction, et qu'elle a finalement été victime de la part de sa hiérarchie d'une " agression " le 6 juin 2013 à la suite de laquelle l'administration a délibérément cherché à retarder la procédure de saisine de la commission de réforme, agissements qui relèvent, selon elle, de par leur nature, leur caractère répétitif et leur durée, de la définition légale du harcèlement moral telle que prévue par les dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des fiches de notation produites par l'EHPAD Lasserre que la notation de Mme F... s'est dégradée avant même le début ses responsabilités syndicales et qu'inversement, cette notation s'est améliorée en 2012 alors même qu'elle assumait toujours ces responsabilités ; que ces documents font d'ailleurs apparaître qu'indépendamment des conditions d'exercice de son mandat syndical, les variations de notation de l'intéressée sont essentiellement liées à son manque de constance dans sa manière de servir ainsi qu'à ses graves difficultés relationnelles, ce que confirment plusieurs autres documents fournis par l'administration dont Mme F... ne conteste pas réellement le contenu et, en particulier, le " Rapport relatif aux incidents du 8 et 9 mars 2012 " ainsi que le rapport du

12 mars 2012 établi par la directrice de l'établissement, MmeB..., M. E...et

Mme C...qui témoignent de son comportement inadapté vis-à-vis de sa hiérarchie et de certains de ses collègues de travail ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des fiches de poste fournies par Mme F... que, contrairement à ce qu'elle soutient, le périmètre de ses attributions professionnelles est demeuré globalement inchangé et qu'elle n'a été placée en tant que conseillère hôtelière au pôle logistique, hôtelier, gestion et clientèle sous l'autorité hiérarchique du responsable des services techniques et logistiques de l'établissement, le 16 mars 2012 qu'en raison de ses manquements non justifiés à ses tâches en 2011 et à son comportement consistant à s'attribuer des heures supplémentaires qu'elle n'accomplissait pas réellement, ce qui est d'ailleurs partiellement à l'origine de la dégradation de sa notation et de son appréciation au titre de la même année ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier dont le contenu n'est pas contesté sur ce point, que c'est l'intégration d'un cadre supérieur de santé dans le tour de garde administrative, qui a permis de libérer la requérante des astreintes que celle-ci assumait avec les membres de l'équipe de direction de manière transitoire d'août 2011 à janvier 2012 ; que toutes ces mesures, même si elles se sont traduites par une légère diminution des attributions de l'intéressée, n'excèdent pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et étaient justifiées par l'intérêt du service ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si Mme F...se plaint d'avoir fait l'objet de mesures de surveillance personnelle renforcée, ces mesures dont il ressort d'ailleurs des pièces du dossier qu'elles se limitaient au simple respect par l'intéressée de ses obligations de service, étaient, notamment, justifiées par ses manquements à ses tâches constatés en 2011 dont il est fait état au point 5 ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 que la suspension d'un agent public est seulement une mesure conservatoire qui a pour objet d'écarter l'intéressé du service pendant la durée nécessaire à l'administration pour tirer les conséquences de ce dont il est fait grief à l'agent et qu'elle peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure, à la date de la décision litigieuse, d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave ; qu'en l'espèce, la suspension dont a fait l'objet Mme F...du 28 mars 2012 au 1er juin suivant se fondait, notamment, sur son comportement agressif avec les membres de l'équipe de direction lequel ressort notamment des deux rapports mentionnés au point 4, sur ses manquements à ses tâches, l'attribution excessive à son profit d'indemnités et de jours de congés ainsi que sur une mauvaise gestion des plannings ayant, volontairement ou non, permis, les fins de semaine et jours fériés, le recours à l'embauche de personnel de remplacement coûteux pour l'établissement parmi lequel figurait d'ailleurs la fille et la soeur de MmeF... ; qu'il ressort également des pièces du dossier que l'établissement n'a finalement renoncé à sanctionner l'intéressée qu'en raison des pressions du syndicat auquel celle-ci appartenait qui menaçait la direction de déclencher un conflit social en cas de poursuite de la procédure contre la requérante ; que cette mesure de suspension qui se fondait ainsi sur des griefs ayant un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettaient de présumer que l'intéressée avait commis des fautes graves, était ainsi justifiée par un motif rationnel, en rapport avec le comportement de l'agent, sans excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ; qu'elle ne relevait donc pas d'une quelconque tentative de harcèlement de la part de l'établissement ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il n'est pas contesté que l'EHPAD Lasserre a adopté le dispositif d'évaluation ouvert, à titre dérogatoire, en 2011, 2012, 2013 dans la fonction publique hospitalière, par les dispositions de l'article 65-1 de la loi du 9 janvier 1986 et l'article 6 du décret n° 2010-1153 du 29 septembre 2010 pris pour l'application de ce texte qui prévoit notamment que les commissions administratives paritaires peuvent être saisies à la demande des intéressés eux-mêmes d'une demande de modification de leur évaluation ; que, dans ces conditions, Mme F...qui n'a d'ailleurs pas saisi, le 21 juin 2012, le président de la commission administrative paritaire locale comme elle le soutient mais le député-maire d'Issy-les-Moulineaux qui ne présidait pas cette commission, et qui n'a, de toute façon, pas davantage saisi l'autorité investie du pouvoir de nomination d'un recours contre sa notation de l'année 2011 qui était un préalable à la saisine de cette commission, ne saurait soutenir que le prétendu refus de cette commission d'examiner le recours contre sa notation de l'année 2011 résulterait d'une quelconque manoeuvre de la part de l'administration ;

9. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'à l'exception de ses propres écritures, Mme F...n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'elle aurait fait l'objet, lors de la réunion du 6 juin 2013 d'une " agression " par la directrice de l'établissement ; qu'ainsi que l'a jugé à juste titre le tribunal administratif, le courriel que Mme F...a adressé le lendemain de cette réunion à la responsable des ressources humaines, demandant " un imprimé d'accident du travail " ne constituait pas une demande de reconnaissance d'accident de service, ni, à plus forte raison, de saisine à cet effet de la commission de réforme ce qui implique qu'en ne saisissant pas cette commission, l'administration n'a pas nécessairement cherché à entraver la mise en oeuvre de la procédure légale relative aux accidents de service ; qu'à supposer même que l'EHPAD Lasserre ait saisi tardivement cette commission le 11 février 2015 à la suite de la demande de saisine de cette même commission par l'appelante le 6 août 2014, cette seule circonstance qui peut d'ailleurs s'expliquer par la confusion des écritures de l'intéressée, n'implique pas pour autant que l'administration ait cherché à harceler MmeF... ;

10. Considérant qu'en refusant d'assurer à l'appelante la protection fonctionnelle à raison des prétendus faits de harcèlement moral dont elle se prétend victime depuis 2011 en raison de ses activités syndicales, l'EHPAD Lasserre n'a donc pas méconnu les dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ;

Sur le refus de l'EHPAD Lasserre de reconnaître un accident de service :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) / Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) " ; qu'aux termes de l'article 16 du décret susvisé du 19 avril 1988 : " La commission départementale de réforme des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée si la maladie provient de l'une des causes prévues au deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé. / La commission de réforme n'est pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. (...) " ; qu'aux termes de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé : " La demande d'inscription à l'ordre du jour de la commission de réforme est adressée au secrétariat de celle-ci par l'employeur de l'agent concerné. / L'agent concerné peut également adresser une demande de saisine de la commission à son employeur, qui doit la transmettre au secrétariat de celle-ci dans un délai de trois semaines ; (...) passé ce délai de trois semaines, l'agent concerné peut faire parvenir directement au secrétariat de la commission un double de sa demande par lettre recommandée avec accusé de réception ; cette transmission vaut saisine de la commission. (...) / Le traitement auquel l'agent avait droit, avant épuisement des délais en cours à la date de saisine de la commission de réforme, lui est maintenu durant les délais mentionnés et en tout état de cause jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisine de la commission de réforme. " ;

12. Considérant qu'un accident, événement extérieur à l'agent survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service ; qu'il appartient au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce ;

13. Considérant que si Mme F...soutient que lors d'une réunion du

6 juin 2013 à laquelle elle participait, elle aurait été violemment mise en cause par la directrice de l'EHPAD Lasserre, elle ne produit à l'exception de ses propres écrits, aucun témoignage indiquant qu'elle aurait fait au cours de cette réunion l'objet de remarques ou d'attaques pouvant être à l'origine de la pathologie anxio-dépressive dont elle souffre, ce qui rend, en toute hypothèse, impossible de déterminer si celle-ci est en relation directe avec des circonstances particulières du service ou si cette pathologie trouve son origine dans sa propre personnalité ; que, dans ces conditions, la réunion du 6 juin 2013, ne peut être considérée comme présentant le caractère d'un fait accidentel à l'origine de l'état de santé de la requérante ; que, c'est, par suite, sans commettre d'erreur de droit, ni de détournement de pouvoir, que la directrice de l'EHPAD Lasserre a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de ce prétendu accident ;

Sur la responsabilité pour faute de l'administration :

14. Considérant, d'une part, que, comme il a été dit au point 10, le courriel que

Mme F...a adressé le lendemain de la réunion susmentionnée du 6 juin 2013 à la responsable des ressources humaines, demandant " un imprimé d'accident du travail " ne constituait pas une demande de reconnaissance d'accident de service, ni, à plus forte raison, de saisine à cet effet de la commission de réforme en application de l'article 13 de l'arrêté du

4 août 2004 ; que l'EHPAD Lasserre qui n'était alors saisi d'aucune demande d'imputabilité au service de cet événement, n'a commis aucune faute en ne diligentant pas une procédure d'accident de service de son propre chef ;

15. Considérant, d'autre part, qu'à supposer même que cet établissement ait saisi tardivement le 11 février 2015 la commission de réforme de la demande de reconnaissance d'accident de service faite par Mme F... le 6 août 2014, il n'existe aucun lien direct et certain entre un tel retard et le préjudice financier et de carrière dont se prévaut l'intéressée dès lors qu'il est constant que cette dernière a elle-même saisi cette commission le 3 décembre 2014 et qu'il n'est, de toute façon, pas établi, ni même allégué qu'après s'être réunie, ladite commission aurait été d'avis que l'évènement du 6 juin 2013 aurait été à l'origine de l'état " anxio-dépressif " de l'appelante ;

16. Considérant, enfin, qu'à défaut de tout harcèlement de Mme F... par l'EHPAD Lasserre, celle-ci n'est pas fondée à demander l'indemnisation du préjudice lié à la dégradation de son état de santé et qui résulterait, selon elle, des agissements de l'administration à son encontre ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F... le versement de la somme de

2 000 euros au titre des frais exposés par l'EHPAD Lasserre et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Mme F... versera à l'EHPAD Lasserre une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 17VE01428


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01428
Date de la décision : 31/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-07-10-005 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Garanties et avantages divers. Protection contre les attaques.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Luc CAMPOY
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : SELARL HORUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-05-31;17ve01428 ?
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