La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/05/2018 | FRANCE | N°16VE01075

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 17 mai 2018, 16VE01075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 5 juin 2014 par laquelle le maire de Poissy a prononcé son licenciement, d'enjoindre à la COMMUNE DE POISSY de le réintégrer dans ses fonctions et de condamner celle-ci au versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1405829 du 9 février 2016, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision contestée du 5 juin 2014, mis à l

a charge de la COMMUNE DE POISSY le versement à M. D...d'une somme de 1 500 euro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 5 juin 2014 par laquelle le maire de Poissy a prononcé son licenciement, d'enjoindre à la COMMUNE DE POISSY de le réintégrer dans ses fonctions et de condamner celle-ci au versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1405829 du 9 février 2016, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision contestée du 5 juin 2014, mis à la charge de la COMMUNE DE POISSY le versement à M. D...d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et de nouveaux mémoires, enregistrés les 11 avril 2016, 8 mars 2018, 20 mars 2018 et 19 avril 2018, la COMMUNE DE POISSY, représentée par Me Lerat, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande qu'avait présentée M. D...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3° de mettre à la charge de M. D...le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La COMMUNE DE POISSY soutient que :

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les motifs énoncés dans la décision contestée du 5 juin 2014 permettaient de justifier le licenciement de M.D... ;

- par ailleurs, aucun des autres moyens soulevés par M. D...en première instance n'est fondé.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutain,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me Lerat, pour la COMMUNE DE POISSY.

1. Considérant que M. D...a été recruté par la COMMUNE DE POISSY, en qualité d'agent non titulaire, pour exercer les fonctions de directeur des ressources humaines, par acte d'engagement conclu pour une durée de trois ans à compter du 1er septembre 2012 ; que, par décision du 5 juin 2014, le maire de la COMMUNE DE POISSY a prononcé le licenciement de M. D... ; que, par jugement n° 1405829 du 9 février 2016, dont la COMMUNE DE POISSY relève appel, le Tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, des mentions de la décision contestée du 5 juin 2014 que, pour prononcer, " dans l'intérêt du service ", le licenciement de M. D..., le maire s'est fondé, d'une part, sur l'existence de difficultés relationnelles incompatibles avec les fonctions managériales de l'intéressé et, d'autre part, sur l'irrégularité de l'engagement de ce dernier par la COMMUNE DE POISSY, tenant à l'absence de nécessité de recourir au recrutement d'un agent non titulaire, à l'absence de procédure préalable de recrutement et à l'absence de vacance réelle de l'emploi en cause ;

3. Considérant, en premier lieu, que pour justifier, pour la première fois en cause d'appel, du bien-fondé du motif de licenciement tiré des difficultés relationnelles qu'aurait rencontrées M.D..., la COMMUNE DE POISSY a initialement soutenu, devant la Cour, que celles-ci seraient survenues à compter de l'élection du nouveau maire, le 23 mars 2014 ; que, toutefois, la requérante n'a produit aucun élément ni aucune pièce justificative de nature à corroborer ces premières affirmations ; que celles-ci ne peuvent ainsi être tenues pour établies, alors surtout qu'il est constant que le maire avait informé M. D..., dès le 31 mars 2014, de ce qu'il envisageait de le licencier et l'a, à compter du lendemain, dispensé d'être présent dans les locaux du service ; que la COMMUNE DE POISSY a ensuite prétendu, au cours de la présente instance, que de telles difficultés relationnelles auraient, en fait, existé depuis le recrutement de M. D... le 1er septembre 2012 ; que, toutefois, ces nouvelles allégations sont clairement contredites, comme les premiers juges l'ont retenu, par les fiches d'évaluation de M. D... au titre des années 2012 et 2013 ; que si elle soutient que ces évaluations favorables seraient à relativiser du fait qu'elles avaient été établies par M. E..., alors directeur général des services et ancien collègue de M. D... au sein de la commune de Romainville, la COMMUNE DE POISSY n'apporte aucun élément permettant de justifier, comme elle l'allègue, que celles-ci seraient, à raison d'un tel lien professionnel, entachées d'un défaut d'objectivité et, par suite, dépourvues de caractère probant ; que, par ailleurs, la requérante produit également des attestations respectivement dressées les 7 mars, 28 mars et

5 avril 2018 par quatre agents municipaux ayant travaillé avec M. D...et faisant notamment état, de manière circonstanciée, des méthodes de management autoritaires que l'intéressé aurait alors mises en oeuvre et qui auraient généré des tensions et une désorganisation du service ; qu'à cet égard, la circonstance que ces attestations n'ont été rédigées que tardivement, pour les besoins de la cause, par des agents encore employés par la COMMUNE DE POISSY, ne suffit pas, contrairement à ce que soutient M.D..., à exclure qu'elles puissent constituer un commencement de preuve des faits y étant relatés ; qu'en revanche, les seules pièces versées aux débats par la COMMUNE DE POISSY et rédigées à l'époque considérée, à savoir les courriers électroniques qu'il avait respectivement adressés à Mme F... le 24 septembre 2012, à Mme A...le 15 octobre 2012 et à M. C...le 26 décembre 2012, ne permettent pas, à elles seules, de corroborer la réalité des agissements ainsi reprochés à l'intéressé, qui sont expressément contestés par ce dernier, courriers dont l'expression demeure dans les limites d'échanges à caractère professionnel ; qu'enfin, ces accusations graves ne sont pas davantage étayées par les extraits d'un rapport d'observations dressé par la Chambre régionale des comptes d'Ile-de-France le 15 décembre 2017, que la COMMUNE DE POISSY a versé aux débats, lequel analyse uniquement la gestion des ressources humaines au sein de la commune, à compter de l'année 2012, sans faire aucune mention nominative de M. D... ; que, dans ces conditions et en l'état des seules pièces produites, la COMMUNE DE POISSY ne démontre pas la réalité des difficultés relationnelles qu'aurait rencontrées M.D... ; qu'à défaut, le premier motif du licenciement contesté doit donc être regardé comme reposant sur des faits matériellement inexacts ;

4. Considérant, en second lieu, que, sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de

celui-ci ; que, lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, notamment parce qu'il méconnaît une disposition législative ou réglementaire applicable à la catégorie d'agents dont relève l'agent contractuel en cause, l'administration est tenue de proposer à celui-ci une régularisation de son contrat afin que son exécution puisse se poursuive régulièrement ; que si le contrat ne peut être régularisé, il appartient à l'administration, dans la limite des droits résultant du contrat initial, de proposer à l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi, afin de régulariser sa situation ; que, si l'intéressé refuse la régularisation de son contrat ou si la régularisation de sa situation, dans les conditions précisées ci-dessus, est impossible, l'administration est tenue de le licencier ;

5. Considérant que si la COMMUNE DE POISSY, qui ne soutient pas que le recrutement de M.D..., à compter du 1er septembre 2012, aurait présenté un caractère fictif ou frauduleux, s'est également fondée, pour prononcer le licenciement de l'intéressé, sur une prétendue irrégularité de son engagement, pour les motifs déjà exposés au point 2, elle n'établit, ni même n'allègue, avoir préalablement proposé à l'intéressé une régularisation de son contrat ou, à défaut, de sa situation, conformément aux principes rappelés au point 4 ; qu'enfin, la COMMUNE DE POISSY ne justifie pas davantage qu'une telle régularisation aurait été impossible en se bornant à avancer, sans autre précision ou élément probant, que M. D...aurait fait montre d'une " absence de volonté de travailler avec la nouvelle équipe municipale et de difficultés relationnelles " ; qu'à défaut, la requérante ne pouvait donc légalement prononcer, pour ce second motif, le licenciement de M. D... ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE POISSY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision contestée du 5 juin 2014 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M.D..., qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, le versement à la COMMUNE DE POISSY d'une somme en remboursement des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE POISSY le versement à M. D...d'une somme de

2 000 euros en remboursement des frais que celui-ci a exposés à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE POISSY est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE POISSY versera à M. D...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 16VE01075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01075
Date de la décision : 17/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Eric TOUTAIN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-05-17;16ve01075 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award