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03/05/2018 | FRANCE | N°17VE02899

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 03 mai 2018, 17VE02899


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'ETAT DE KOWEÏT a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 ainsi que des intérêts de retard correspondants, d'un montant total de 11 403 263 euros ;

Par un jugement n° 1509090 du 10 juillet 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et

un mémoire enregistrés les 8 septembre 2017 et 12 février 2018, l'ETAT DE KOWEÏT, représenté par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'ETAT DE KOWEÏT a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 ainsi que des intérêts de retard correspondants, d'un montant total de 11 403 263 euros ;

Par un jugement n° 1509090 du 10 juillet 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 septembre 2017 et 12 février 2018, l'ETAT DE KOWEÏT, représenté par Me B...et MeA..., avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des intérêts de retard correspondants ;

3° de prononcer la restitution totale de ces impositions et pénalités d'un montant total de 11 403 263 euros au titre des années 2010 et 2011 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'ETAT DE KOWEÏT soutient que les revenus fonciers retirés de la location nue des bureaux de la Tour Manhattan proviennent d'une activité civile de gestion d'un patrimoine immobilier qui n'est pas de nature commerciale et ne peut donc être regardée comme une activité lucrative au sens du 1. de l'article 206 du code général des impôts dès lors qu'en exerçant cette activité, il poursuit une gestion désintéressée ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention signée le 7 février 1982 entre la France et le Koweït en matière d'impôts sur le revenu, sur la fortune et sur les successions, modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Campoy,

- les conclusions de Mme Belle, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour l'ETAT DE KOWEÏT.

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'ETAT DE KOWEÏT est propriétaire d'un immeuble dénommé " Tour Manhattan " située à Courbevoie (Hauts-de-Seine) ; que la gestion de cet immeuble a été confiée le 3 mars 2009 à la Kuwait Investment Authority qui est une agence publique koweitienne dépendant du ministère des finances de l'ETAT DE KOWEÏT ; que, par un mandat en date du 4 mars 2009, cet organisme a lui-même confié à la société Saint-Martins Property Corporation Limited la gestion de ce bien ; qu'en sa qualité de représentante de l'ETAT DE KOWEÏT, cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés sur ses exercices clos le 31 décembre des années 2010 et 2011 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a assujetti l'ETAT DE KOWEÏT à des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés d'un montant respectif de 10 060 931 euros et 281 653 euros ainsi qu'aux intérêts de retard correspondants d'un montant total de 1 060 679 euros, au titre des années 2010 et 2011, au motif que la location de la Tour Manhattan participait de l'exercice d'une activité lucrative au sens des dispositions du 1 de l'article 206 du code général des impôts, taxable en France en vertu des dispositions combinées du I de l'article 164 B et du I de l'article 209 du même code ainsi que des stipulations du 1. de l'article 5 de la convention fiscale susvisée du 7 février 1982 ; que l'ETAT De KOWEÏT relève appel du jugement du 10 juillet 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et pénalités résultant de cette rectification ;

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 206 du code général des impôts : " (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés (...) les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. " ; qu'il résulte ces dispositions qu'une activité exercée en France par une personne morale de droit public étrangère n'est pas passible de l'impôt sur les sociétés si cette activité ne relève pas, eu égard à son objet ou aux conditions particulières dans lesquelles elle est exercée, d'une exploitation à caractère lucratif ; que la gestion d'un patrimoine immobilier par une telle collectivité peut constituer une opération à caractère lucratif, même si elle n'a pas de caractère commercial, sans qu'y fasse nécessairement obstacle le caractère, en principe, désintéressé de la gestion de cette collectivité;

3. Considérant qu'il n'est pas établi, ni du reste allégué, que l'activité consistant à louer des locaux nus à usage de bureaux qu'exerce en France la Kuwait Investment Authority, même si elle procède de la volonté de l'ETAT DE KOWEIT de faire fructifier ses excédents budgétaires et ses biens dans un but d'intérêt général, traduirait, de la part de ce fonds souverain ou de l'ETAT DE KOWEIT lui-même, l'exercice d'une quelconque activité de service public à caractère administratif, ni même la mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique ; que les conditions dans lesquelles la Kuwait Investment Authority effectue ces prestations qui sont, de la sorte, de la nature de celles que des entreprises privées poursuivant un but lucratif sont susceptibles de fournir, ne font pas apparaître que l'ETAT DE KOWEIT aurait entendu se placer en dehors du cadre d'une exploitation à caractère lucratif ; qu'il n'est pas, en particulier, contesté que la location de la Tour Manhattan est réalisée dans des conditions similaires à celles dans lesquelles des entreprises privées exercent leur activité, avec des prix pratiqués correspondant aux prix du marché et vis-à-vis d'une clientèle composée de sociétés commerciales ;

4. Considérant que l'Etat du Koweït est ainsi passible de l'impôt sur les sociétés en France à raison des revenus qu'il tire de la location de ce bien immobilier, sur le fondement des dispositions précitées du 1 de l'article 206 du code général des impôts ;

Sur l'application de la convention signée le 7 février 1982 entre la France et le Koweït :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la convention précitée : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " résident d'un Etat " désigne : (...) b. en ce qui concerne Koweït, toute personne physique qui est domiciliée ...et toute société qui y a son siège social et son siège de direction effective, y compris l'Etat de Koweït, ses collectivités locales et ses institutions gouvernementales. " ; qu'aux termes de l'article 5 de cette convention : " 1. Les revenus qu'un résident d'un Etat tire de biens immobiliers (...) situés dans l'autre Etat sont imposables dans cet autre Etat. 2. L'expression " biens immobiliers " a le sens que lui attribue le droit de l'Etat où les biens considérés sont situés. (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations que les revenus que L'ETAT DE KOWEIT tire de la location des locaux de la Tour Manhattan qui constitue des biens immobiliers au sens de la législation fiscale française et qui sont situés en France, doivent être imposés dans ce pays ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ETAT DU KOWEÏT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'ETAT DE KOWEÏT est rejetée.

2

N° 17VE02899


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02899
Date de la décision : 03/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Personnes et activités imposables.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Luc CAMPOY
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : SULLIVAN et CROMWELL LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-05-03;17ve02899 ?
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