Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 8 février 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1702358 du 13 décembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2018, M. A..., représenté par Me Alleg, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation et lui délivrer durant ce réexamen un récépissé ou une autorisation provisoire de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé en toutes ses dispositions ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, le préfet lui ayant opposé à tort une condition de détention de visa de long séjour qu'il remplit et l'absence de contrat de travail visé par l'autorité compétente, alors qu'il avait joint à sa demande son contrat de travail et la demande d'autorisation de travail signée de son employeur ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où le préfet ne pouvait statuer sur sa demande de titre de séjour en qualité de salarié sans consulter préalablement la direction régionale des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l'emploi comme le prévoit l'article L. 5221-2 du code du travail ;
- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Livenais a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. A..., ressortissant marocain né le 1er décembre 1980, relève appel du jugement 13 décembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;
Sur la légalité des décisions attaquées, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Considérant, en premier lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le précise l'article L. 111-2 du même code : " sous réserve des conventions internationales ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) " ; et qu'aux termes de l'article 9 du même accord bilatéral : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque État délivre notamment aux ressortissants de l'autre État tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation " ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile, auquel l'accord franco-marocain ne déroge pas : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois" ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travai. " ;
5. Considérant qu'il résulte de la combinaison des stipulations conventionnelles et des dispositions précitées que l'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en oeuvre ; qu'il en va notamment ainsi, pour le titre de séjour portant la mention " salarié " mentionné à l'article 3 cité ci-dessus, qui est délivré, conformément à l'article L. 5221-2 du code du travail, aux ressortissants marocains entrés sur le territoire français sous couvert d'un visa de long séjour et titulaires d'un contrat de travail " visé par les autorités compétentes " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces au dossier que M.A..., qui bénéficiait jusqu'au 2 octobre 2014 d'un titre de séjour obtenu en qualité de conjoint d'un ressortissant français, a demandé, après que la vie commune avec son épouse a cessé, le renouvellement de ce titre en qualité de salarié, sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé ; qu'il a présenté, à l'appui de cette demande, un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec l'association " Les Jours Heureux " ainsi qu'une demande d'autorisation de travail souscrite à son profit par le représentant légal de son employeur ; que le préfet du Val-d'Oise a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité par M. A...au double motif qu'il ne justifiait pas être entré en France sous couvert d'un visa de long séjour obtenu en qualité de salarié et qu'il ne présentait pas, à l'appui de sa demande, un contrat de travail visé par l'autorité administrative ;
7. Considérant, cependant, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France le 9 octobre 2013 sous couvert d'un visa d'une durée supérieure à trois mois, obtenu en sa qualité de conjoint de ressortissant français ; qu'il satisfait donc à la condition prévue par l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet du Val-d'Oise ne pouvait ainsi légalement opposer au requérant le défaut de présentation d'un visa de long séjour obtenu en qualité de travailleur salarié, dans la mesure où aucune disposition législative ou réglementaire ne subordonne l'appréciation de la condition de détention d'un visa de long séjour à la correspondance entre le motif pour lequel celui-ci a été délivré à l'étranger et le fondement de sa demande de titre de séjour ; qu'il a, ainsi, entaché sur ce point sa décision de refus de titre de séjour d'erreur de droit ;
8. Considérant, en outre, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait nécessairement pris à l'encontre de M. A...la décision de refus de titre de séjour contestée s'il s'était exclusivement fondé sur la circonstance selon laquelle le requérant n'aurait pas présenté un contrat de travail visé par l'autorité administrative compétente ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour attaquée est illégale, ainsi que, par voie de conséquence, celles portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que M. A...est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Considérant qu'eu égard au motif énoncé ci-dessus, le présent arrêt implique seulement que le préfet du Val-d'Oise statue à nouveau sur la demande de titre de séjour présentée par M. A...; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1702358 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 13 décembre 2017 et l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 8 février 2017 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de statuer à nouveau sur la demande de titre de séjour présentée par M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à M.A....
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.
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N° 18VE00137