Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SOCIETE MOFA a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 13 novembre 2014 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour un montant total de 19 574 euros.
Par un jugement n° 1502695 du 5 janvier 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2017, la SOCIETE MOFA, représentée par Me Halimi, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement et la décision du directeur général de l'OFII du
13 novembre 2014 ;
2° de mettre à la charge de l'OFII la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société requérante soutient que :
- le procès-verbal de constat des infractions n'a pas été transmis par l'OFII à l'appui de sa décision ;
- la matérialité des faits n'est pas établie dès lors que M.B... n'a jamais fait partie de son personnel ;
- elle n'a fait l'objet d'aucune condamnation pénale et le principe de la double peine ne peut s'appliquer ;
- le montant de la contribution spéciale est manifestement erroné ;
- la contribution forfaitaire n'est pas due, et aucun élément de preuve n'est rapporté quant au réacheminement de M.B... ;
- la mise à sa charge des contributions contestées, qui la met en péril, est entachée d'une erreur manifeste.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Besson-Ledey,
- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public.
1. Considérant que lors d'un contrôle effectué le 19 novembre 2013 dans une boulangerie située à Limay (Yvelines), exploitée par la SARL MOFA, l'inspecteur du travail a constaté la présence d'un employé en situation de travail, M.B..., de nationalité marocaine, dépourvu de titres l'autorisant à séjourner et à travailler en France ; que, par une décision du 13 novembre 2014, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à la charge de la SOCIETE MOFA, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, pour un montant de 17 450 euros et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour un montant de 2 124 euros ; que la SOCIETE MOFA relève appel du jugement du 5 janvier 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 8253-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 applicables au présent litige dès lors qu'il s'agit d'un litige de plein contentieux et que ces dispositions sont plus douces que celles antérieurement applicables : "Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-467 du 4 juin 2013 : " I.-Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. / II.-Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 applicables au présent litige dès lors qu'il s'agit d'un litige de plein contentieux et que ces dispositions sont plus douces que celles antérieurement applicables : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. / Le montant total des sanctions pécuniaires prévues, pour l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler, au premier alinéa du présent article et à l'article L. 8253-1 du code du travail ne peut excéder le montant des sanctions pénales prévues par les articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 du code du travail ou, si l'employeur entre dans le champ d'application de ces articles, le montant des sanctions pénales prévues par le chapitre II du présent titre. " ; qu'aux termes de l'article R. 626-1 du même code : " I.-La contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 est due pour chaque employé en situation irrégulière au regard du droit au séjour. / Cette contribution est à la charge de l'employeur qui, en violation de l'article L. 8251-1 du code du travail, a embauché ou employé un travailleur étranger dépourvu de titre de séjour. / II.-Le montant de cette contribution forfaitaire est fixé par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé du budget, en fonction du coût moyen des opérations d'éloignement vers la zone géographique de réacheminement du salarié, dans la limite prescrite à l'alinéa 2 de l'article L. 626-1. " ;
3. Considérant, en premier lieu, que s'agissant des mesures à caractère de sanction, le respect du principe général des droits de la défense suppose que la personne concernée soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et puisse avoir accès aux pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus, à tout le moins lorsqu'elle en fait la demande ; que dès lors, si ni les articles L. 8253-1 et suivants du code du travail, ni l'article L. 8271-17 du même code ne prévoient expressément que le procès-verbal constatant l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler en France, et fondant le versement de la contribution spéciale, soit communiqué au contrevenant, le silence de ces dispositions sur ce point ne saurait faire obstacle à cette communication, en particulier lorsque la personne visée en fait la demande, afin d'assurer le respect de la procédure contradictoire préalable à la liquidation de la contribution spéciale, qui revêt le caractère d'une sanction administrative ;
4. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la SOCIETE MOFA aurait sollicité, préalablement à la liquidation de la contribution spéciale en litige, la communication du procès-verbal fondant le versement de cette contribution ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense pour défaut de communication du procès-verbal doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre une décision mettant à la charge d'un employeur la contribution spéciale prévue par les dispositions précitées de l'article L. 8253-1 du code du travail, pour avoir méconnu les dispositions de l'article L. 8251-1 du même code, de vérifier la matérialité des faits reprochés à l'employeur et leur qualification juridique au regard de ces dispositions ; qu'il lui appartient, également, de décider, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir la sanction prononcée, soit d'en diminuer le montant jusqu'au minimum prévu par les dispositions applicables au litige, soit d'en décharger l'employeur ; que, par ailleurs, pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 8251-1 du code du travail, il appartient à l'autorité administrative de relever, sous le contrôle du juge, les indices objectifs de subordination permettant d'établir la nature salariale des liens contractuels existant entre un employeur et le travailleur qu'il emploie ;
6. Considérant que pour mettre à la charge de la société requérante les contributions litigieuses, le directeur de l'OFII s'est fondé sur un procès-verbal établi le 19 novembre 2013 par l'inspecteur du travail ; qu'il ressort de ce procès-verbal, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, que lors du contrôle au sein de la boulangerie exploitée par la SARL requérante, il a été constaté la présence en situation de travail de M.B..., ressortissant marocain, titulaire d'un titre de séjour espagnol, mais dépourvu de titres l'autorisant à séjourner et à travailler en France ; que si la SOCIETE MOFA soutient que M. A...n'a jamais fait partie de son personnel et se prévaut à ce titre de son registre d'entrée et de sortie du personnel et d'un contrat de travail en Espagne de l'intéressé, il résulte toutefois des mentions du procès-verbal du
19 novembre 2013, que M. A...a déclaré, lors de son audition par les services de police, avoir été embauché par la société requérante au début du mois de novembre 2013 pour apprendre à confectionner du pain et que le frère du gérant de la société requérante a également déclaré, après avoir changé de versions à plusieurs reprises, que M. A...travaillait au sein de la boulangerie depuis une vingtaine de jours afin de pouvoir le remplacer pendant ses congés en décembre 2013 ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision en litige reposerait sur des faits matériellement inexacts ne peut être que rejeté ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la SARL MOFA a embauché un ressortissant marocain dépourvu de titre de séjour et d'un titre l'autorisant à travailler en France ; qu'eu égard au cumul des infractions constatées et alors que la SARL MOFA ne justifie pas s'être acquittée des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 du code du travail dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le directeur de l'OFII a mis à sa charge la somme de 17 450 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du même code ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que la société requérante soutient elle-même n'avoir fait l'objet d'aucune condamnation pénale pour les faits ayant servi de fondement à la sanction contestée ; que, par suite, son moyen tiré de la méconnaissance du principe de non cumul des sanctions ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant, en cinquième lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne subordonnent pas la mise à la charge de l'employeur de la contribution représentative des frais de réacheminement des étrangers dans leur pays d'origine qu'elles prévoient à la justification par l'administration du caractère effectif de ce réacheminement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration n'aurait pas justifié du réacheminement du travailleur en situation irrégulière est sans influence sur la légalité de la contribution litigieuse ;
10. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance, à la supposer établie, que la contribution spéciale et la contribution forfaitaire pèseraient sur la capacité financière de la société requérante est sans influence sur la légalité de la décision attaquée ; que le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation ne peut dès lors qu'être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE MOFA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision 13 novembre 2014 ; que sa requête doit, par suite, être rejetée y compris par voie de conséquence ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros au bénéfice de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au titre des frais qu'il a exposés, non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE MOFA est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE MOFA versera à l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 17VE00296