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05/04/2018 | FRANCE | N°17VE03837

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 05 avril 2018, 17VE03837


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé de son transfert aux autorités bulgares responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par ordonnance du 28 septembre 2017 le vice président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transmis sa demande au Tribunal administratif de Versailles.

Par un jugement n° 1706820 du 9 novembre 2017, le magistrat désigné par le président Trib

unal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé de son transfert aux autorités bulgares responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par ordonnance du 28 septembre 2017 le vice président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transmis sa demande au Tribunal administratif de Versailles.

Par un jugement n° 1706820 du 9 novembre 2017, le magistrat désigné par le président Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2017, M.B..., représenté par Me Scanvic, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de la renouveler jusqu'à ce qu'il ait été statué définitivement sur sa demande d'asile en France, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013, en raison de l'irrégularité de l'entretien individuel ;

- il a été pris en méconnaissance de l'article 3 de ce même règlement.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chayvialle,

- les observations de MeA..., pour M.B....

1. Considérant que M.B..., ressortissant afghan né en 1992, est entré irrégulièrement en France où il a sollicité le statut de réfugié ; que la consultation du système Eurodac a permis de constater que ses empreintes digitales avaient déjà été relevées par les autorités bulgares ; que, par arrêté du 26 septembre 2017, le préfet des Hauts-de-Seine a ordonné la remise de M. B...aux autorités bulgares responsables de l'examen de sa demande d'asile ; que, par un jugement du 9 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. B...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n°604/2013 du

26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. /3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1./ 4.L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel./ 5.L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national./ 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type.... " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a bénéficié le 31 juillet 2017 d'un entretien individuel avec un agent de la préfecture des Hauts-de-Seine ; qu'il a été assisté à cette occasion par un interprète en langue pachto, qu'il a déclarée comprendre, et qu'il a été amené à fournir divers renseignements sur sa situation individuelle, notamment, sur les conditions dans lesquelles il a séjourné dans d'autres Etats membres de l'Union européenne avant son entrée en France ; qu'il n'est pas allégué que le requérant aurait fait part à l'agent de la préfecture de craintes relatives au traitement de sa demande d'asile par les autorités bulgares ; que dans ces conditions, la seule circonstance que l'entretien individuel a duré trois minutes, ne suffit pas à établir que cet entretien ne se serait pas déroulé dans des conditions conformes à son objet, lequel est de faciliter la détermination de l'Etat membre responsable de la demande d'asile de M. B...; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : "(...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable " ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions citées au point précédent que, si un État membre de l'Union européenne appliquant le règlement dit " Dublin III " est présumé respecter ses obligations découlant de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, cette présomption est susceptible d'être renversée en cas de défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'État membre en cause, exposant ceux-ci à un risque de traitement inhumain ou dégradant prohibé par les stipulations de ce même article ; qu'en application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, il appartient au juge administratif de rechercher si, à la date d'édiction de la décision litigieuse et eu égard aux éléments produits devant lui et se rapportant à la procédure d'asile appliquée dans l'Etat membre initialement désigné comme responsable au sens de ces dispositions, il existait des motifs sérieux et avérés de croire qu'en cas de remise aux autorités de ce même Etat membre du demandeur d'asile, ce dernier n'aurait pu bénéficier d'un examen effectif de sa demande d'asile, notamment en raison d'un refus opposé à tout enregistrement des demandes d'asile ou d'une incapacité structurelle à mettre en oeuvre les règles afférentes à la procédure d'asile, ou si la situation générale du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile dans ce même Etat était telle qu'un renvoi à destination de ce pays aurait exposé l'intéressé, de ce seul fait, à un risque de traitement prohibé par l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

6. Considérant que M. B...soutient qu'il a été retenu par les autorités bulgares en rétention d'abord dans la prison de Burgas, pendant 78 jours, puis à Sofia, pendant 45 jours, dans des conditions matérielles déplorables ; qu'il produit, à l'appui de ses dires, une déclaration publique du comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants qui dénonce des risques sérieux de maltraitance pour les personnes, le rapport d'une visite réalisée en Bulgarie par ce comité du 13 au 20 février 2015, ainsi que le rapport annuel d'Amnesty International pour 2016 faisant état de moyens insuffisants pour la prise en charge adéquate des demandeurs d'asile par les autorités bulgares ; qu'enfin, il se prévaut également d'un rapport de l'organisation non gouvernementale A.I.D.A. faisant état du taux d'octroi de la qualité de réfugié aux ressortissants afghans par les autorités bulgares en première instance ; qu'il n'est toutefois pas suffisamment établi, par les documents que le requérant produit, que la Bulgarie ne traiterait pas sa demande d'asile dans le respect du droit d'asile et qu'à la date de la décision contestée, il existait dans cet Etat des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs qui entraîneraient, pour lui-même, un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; qu'au demeurant, à la suite des recommandations issues du rapport du Haut commissariat aux réfugiés édictées au mois de janvier 2014 et demandant la suspension temporaire des réadmissions vers la Bulgarie, ce pays a reçu des crédits supplémentaires de l'Union européenne pour le traitement des demandes d'asile et a bénéficié d'un soutien du Bureau européen en matière d'asile et le Haut commissariat aux réfugiés a suspendu sa recommandation en avril 2014, tout en maintenant des réserves " pour le transfert de certains groupes vulnérables" ; qu'enfin, les allégations du requérant sur sa rétention en Bulgarie ne sont assorties d'aucune justification ; que les éléments avancés par

M. B...ne donnent pas de raisons sérieuses de croire qu'existeraient dans la procédure d'asile susceptible de lui être appliquée en Bulgarie des défaillances systémiques, au sens du 2 de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 mentionné ci-dessus, aptes à renverser la présomption mentionnée au point 5. ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

2

N° 17VE03837


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03837
Date de la décision : 05/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Nicolas CHAYVIALLE
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : CABINET FOLEY HOAG AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-04-05;17ve03837 ?
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