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15/03/2018 | FRANCE | N°16VE01068

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 15 mars 2018, 16VE01068


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société LOCAM a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- à titre principal, de condamner l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) à lui verser la somme de 27 543,04 euros TTC au titre de l'indemnité de résiliation du contrat du 1er mars 2010 portant sur la location de divers matériels, indemnité assortie des intérêts moratoires au taux de la principale facilité de refinancement appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refina

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société LOCAM a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- à titre principal, de condamner l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) à lui verser la somme de 27 543,04 euros TTC au titre de l'indemnité de résiliation du contrat du 1er mars 2010 portant sur la location de divers matériels, indemnité assortie des intérêts moratoires au taux de la principale facilité de refinancement appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points à compter du 21 août 2012 avec capitalisation de ces intérêts ;

- à titre subsidiaire, de condamner l'ONAC à lui verser la somme de 24 111,36 euros TTC au titre du manque à gagner et de l'arriéré de loyers, assortie des intérêts moratoires au même taux et capitalisation de ces intérêts ;

- d'enjoindre à l'ONAC de restituer à ses frais le matériel à son siège social dans un délai d'un mois suivant la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'ONAC la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1401116 du 11 février 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint à l'ONAC de procéder à la restitution du matériel objet du contrat conclu le 1er mars 2010 avec la société LOCAM, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 8 avril 2016 et 5 janvier 2017, la société LOCAM, représentée par Me Riva, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2° de condamner l'ONAC à lui verser, à titre principal, la somme de 27 543,04 euros TTC au titre de l'indemnité de résiliation prévue au contrat, outre les intérêts et leur capitalisation, à titre subsidiaire, la somme de 24 111,36 euros TTC au titre du manque à gagner et des arriérés de loyers, outre les intérêts et leur capitalisation et, à titre infiniment subsidiaire, la somme de 12 396,38 euros au titre du manque à gagner, outre les intérêts et leur capitalisation.

Elle soutient que :

- elle est fondée à solliciter à titre principal la condamnation de l'ONAC à lui verser de la somme totale de 27 543,04 euros en application du 2) du b) de l'article 12 du contrat de location ;

- à titre subsidiaire, elle est fondée à solliciter une indemnité de 24 111,36 euros correspondant à un arriéré de loyers de 5 166,72 euros et à la perte de gain escompté si le contrat n'avait pas été résilié soit la somme de 18 944,64 euros ;

- à titre très subsidiaire, dès lors qu'elle n'a perçu que sept loyers pour un montant total de 12 055,68 euros et a acheté le matériel pour la somme de 24 452,06 euros, son manque à gagner s'établit a minima à la somme de 12 396,38 euros ; si ces éléments ne sont pas suffisants, la Cour doit ordonner une expertise.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Camenen,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour l'ONAC.

1. Considérant que la société LOCAM, société de crédit-bail ayant pour objet la location auprès de professionnels, a conclu le 1er mars 2010 avec la maison de retraite des anciens combattants, située à Boulogne-Billancourt, relevant de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), un contrat portant sur la location d'un serveur vidéo, six caméras, un écran et deux téléphones mobiles, pour une durée fixe de 20 trimestres en contrepartie d'un loyer trimestriel de 1 722,24 euros TTC ; que le matériel objet de ce contrat a été livré par le fournisseur, la société Azman, le 9 mars 2010 ; que, par courrier du 5 juillet 2011, dont la société LOCAM a accusé réception par lettre du 12 juillet 2011, l'ONAC a prononcé la résiliation de ce contrat ; que, par un courrier du 20 août 2012, la société LOCAM a réclamé, en vain, le paiement des sommes restant dues au titre du contrat, soit la somme de 27 543,04 euros TTC correspondant à trois loyers impayés, augmentés d'une indemnité et d'intérêts de retard, et aux onze loyers à échoir, augmentés d'une indemnité de 10 % ; que la société LOCAM relève appel du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 11 février 2016 en tant que le tribunal, après avoir fait droit à sa demande de restitution du matériel, a rejeté ses demandes indemnitaires ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant que lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ; qu'ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige ; que, par exception, il en va autrement lorsque, eu égard d'une part à la gravité de l'illégalité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ;

3. Considérant que si le contrat de location litigieux a été conclu en méconnaissance des règles de la commande publique, il ne résulte pas de l'instruction qu'eu égard, d'une part, à la gravité de l'illégalité ainsi commise et, d'autre part, aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ;

4. Considérant que si les stipulations du b) de l'article 12 de ce contrat prévoient notamment, sa " résiliation automatique ou de plein droit (...) si le locataire ne respecte pas l'un de ses engagements envers la société LOCAM SAS ou d'autres sociétés du groupe COFAM (...) ", ces stipulations ne sont pas applicables en l'espèce dès lors qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que le contrat de location litigieux a fait l'objet, non d'une résiliation automatique ou de plein droit, mais d'une résiliation par l'ONAC pour un motif d'intérêt général ; qu'ainsi, la société LOCAM ne peut utilement se prévaloir des stipulations du 2) du b) de ce même article 12 du contrat de location qui détermine les conditions d'indemnisation du loueur en cas de résiliation automatique ou de plein droit ;

5. Considérant toutefois que, conformément aux principes applicables aux contrats administratifs, le loueur peut prétendre à une indemnité correspondant à la perte subie et au gain manqué du fait de la résiliation du contrat pour motif d'intérêt général ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société LOCAM a acheté à la société Azman un serveur vidéo, six caméras et deux téléphones mobiles pour un montant de 24 452,06 euros en mars 2010 ; que ce matériel a été installé au sein de la maison de retraite par la société Azman ; que le contrat souscrit par l'ONAC pour une durée de cinq ans prévoyait que la société LOCAM serait rémunérée par le versement d'un loyer trimestriel de 1 722, 24 euros, soit la somme totale de 34 444, 80 euros sur la durée du contrat ; qu'ainsi, après déduction du prix d'achat du matériel, le gain escompté était de 9 992, 74 euros, soit 499, 64 euros par trimestre ; que, la société LOCAM indiquant, dans ses dernières écritures, avoir perçu sept loyers, soit la somme de 12 055, 68 euros, le gain manqué de la requérante sur la partie du contrat restant à courir peut, dès lors, être évalué à la somme de 6 495,28 euros ; que, par ailleurs, il n'est pas établi que le manque de diligence de la société LOCAM pour récupérer le matériel loué à la suite de la résiliation du contrat pour motif d'intérêt général, n'a pas permis à cette dernière de le relouer et d'en amortir le coût d'achat, de sorte qu'elle devrait être regardée comme étant intégralement à l'origine du préjudice dont elle sollicite l'indemnisation ; qu'en effet, la société fait valoir, sans être sérieusement contestée, que ce matériel est soumis à une forte obsolescence et qu'il ne peut être remis sur le marché dès lors qu'il a été installé chez un client ; qu'elle ne sollicite d'ailleurs aucune indemnisation au titre de la valeur vénale du matériel loué à l'ONAC et devant être repris en fin de contrat par le loueur ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la nature des prestations de location assurées par la société LOCAM, il sera fait une juste appréciation de sa marge nette sur la partie du contrat restant à courir en l'évaluant, après déduction de l'ensemble de ses charges, à la somme de 6 000 euros ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de prescrire une expertise avant dire droit, que l'ONAC doit être condamné à verser à la société LOCAM la somme de 6 000 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 21 août 2012, date de réception de la demande préalable par l'administration, ces intérêts étant capitalisés au 5 février 2014, date à laquelle la capitalisation des intérêts a été demandée devant le tribunal administratif et à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société LOCAM, qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à verser à l'ONAC la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ONAC est condamné à verser à la société LOCAM la somme de 6 000 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 21 août 2012, ces intérêts étant capitalisés au 5 février 2014 et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 2 : Le jugement n° 1401116 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 11 février 2016 est réformé en ce qu'il a du contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société LOCAM est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de l'ONAC présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 16VE01068 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01068
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation. Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : SCP MAURICE RIVA VACHERON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-15;16ve01068 ?
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