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15/03/2018 | FRANCE | N°16VE00026

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 15 mars 2018, 16VE00026


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA CREDIT AGRICOLE a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la minoration du résultat fiscal de l'exercice 2012 de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Centre-Ouest et le dégrèvement consécutif à cette minoration au niveau du groupe d'intégration fiscale Crédit agricole.

Par un jugement n° 1402207 du 5 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregis

trés respectivement le 5 janvier et

le 21 juillet 2016, la SA CREDIT AGRICOLE demande à la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA CREDIT AGRICOLE a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la minoration du résultat fiscal de l'exercice 2012 de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Centre-Ouest et le dégrèvement consécutif à cette minoration au niveau du groupe d'intégration fiscale Crédit agricole.

Par un jugement n° 1402207 du 5 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 5 janvier et

le 21 juillet 2016, la SA CREDIT AGRICOLE demande à la Cour d'annuler ce jugement, de faire droit à sa demande de première instance et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, faute de répondre au moyen tiré de ce que l'étalement des frais de dossiers sur toute la durée du crédit est prévu par une norme comptable qui s'impose à l'administration fiscale en vertu de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts ;

- compte tenu de la nature de prestation continue de ces frais de dossier, l'administration a méconnu les dispositions du a) du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, qui prévoient la prise en compte fiscale de ce type de prestations au fur et à mesure de leur exécution et l'article 4 du règlement du comité de la réglementation comptable du 3 décembre 2009 ;

- les dispositions générales contenues au premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts ne peuvent servir de fondement pour écarter le principe de convergence fiscalo-comptable, mentionné à l'article 38 de l'annexe III à ce code.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le règlement n° 2009-03 du 3 décembre 2009 du comité de réglementation comptable ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la SA CREDIT AGRICOLE.

1. Considérant que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel (CRCAM) du Centre-Ouest, membre d'un groupe fiscalement intégré, a porté sur sa liasse fiscale 2012 des commissions de frais de dossiers non comptabilisées pour un montant de 269 323 euros ; qu'estimant que la Caisse n'aurait pas dû procéder à cette réintégration au regard des prescriptions de l'article 4 du règlement du 3 décembre 2009 du comité de la règlementation comptable (CRC), la SA CREDIT AGRICOLE, en sa qualité de tête de groupe, a demandé à l'administration la correction du résultat individuel de la CRCAM du Centre-Ouest pour un montant en base de 269 323 euros ; que, par jugement du 5 novembre 2015, dont la société requérante forme appel, le Tribunal administratif de Montreuil a confirmé le rejet par l'administration de cette demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, rendu applicable aux bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 de ce code : " (...) 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. /Toutefois, ces produits doivent être pris en compte :/ a. Pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers et pour les prestations discontinues mais à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, au fur et à mesure de l'exécution (...) " ; qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au même code : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt " ; et qu'aux termes de l'article 4 du règlement du comité de la règlementation comptable (CRC) n° 2009-03 du 3 décembre 2009 : " Les commissions reçues et les coûts marginaux de transaction sont étalés sur la durée de vie effective du crédit (...) " ;

3. Considérant que, dans le paragraphe 2 des motifs du jugement attaqué, les premiers juges ont rappelé le principe institué par le premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, selon lequel la créance à laquelle se rapporte la fourniture d'un service doit être rattachée à l'exercice au cours duquel intervient l'achèvement de la prestation ; qu'ils ont estimé, dans le paragraphe 5 des motifs de ce jugement, que l'article 4 précité du règlement du 3 décembre 2009 susvisé, qui prévoit l'étalement des frais de dossier sur la durée du crédit accordé, était incompatible avec cette règle fiscale et entrait dans les réserves, prévues à l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts, au principe de convergence

fiscalo-comptable ; qu'ainsi, le tribunal administratif a suffisamment répondu au moyen tiré de ce que le premier alinéa du 2 bis de l'article 38 de ce code ne constituait pas une disposition fiscale autorisant l'administration à s'écarter, pour les commissions de frais de dossier, de ce principe de convergence ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant que, d'une part, l'instruction d'un dossier de prêt consiste notamment à réunir des documents, à analyser la situation d'un emprunteur, son profil de risque, et à définir les conditions et modalités du prêt ; que cette prestation prend fin au moment où le contrat de prêt est proposé ou, au contraire, refusé par l'établissement de crédit ; que, par suite, la commission de frais de dossiers, perçue par l'établissement à l'occasion de la souscription de chaque emprunt, ne saurait être assimilée à la rémunération d'une prestation fournie jusqu'au terme du crédit accordé, à la différence d'une garantie ; que, d'autre part, l'intérêt perçu par l'établissement de crédit pendant la durée de ce prêt est la contrepartie de la mise à disposition des fonds, du suivi de la gestion de ce prêt et du risque supporté par le prêteur, mais ne rémunère pas l'instruction du dossier de prêt ; qu'en outre sont sans influence sur les modalités d'imposition de ces frais de dossier, les circonstances qu'ils sont le préalable à l'octroi du prêt lui-même, que la banque est engagée à consentir le prêt dès la notification à l'emprunteur de son acceptation, que ces frais seraient fixés en fonction du montant emprunté ou qu'ils sont pris en compte dans le calcul du taux effectif global, lequel n'a qu'une valeur informative à l'égard des clients recherchant un prêt afin de leur permettre de procéder à des comparaisons entre les offres de divers établissements de crédit ; qu'ainsi, les commissions de frais de dossier doivent être rattachées à l'exercice au cours duquel l'établissement de crédit offre, le cas échéant, le prêt, conformément aux dispositions du premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, et non étalées sur les exercices correspondant à la durée du crédit accordé, comme les prestations continues fournies sur plusieurs exercices et mentionnées au a) du 2 bis de ce même article ;

5. Considérant que si la SA CREDIT AGRICOLE soutient qu'en vertu du principe de convergence fiscalo-comptable, les commissions de frais de dossier doivent être étalées sur la durée de vie effective du crédit, en application de l'article 4 précité du règlement du

3 décembre 2009 du comité de la règlementation comptable, il résulte de ce qui a été dit au paragraphe 4 que cette prescription est incompatible avec le mode de comptabilisation des produits prévu au premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts ;

6. Considérant que si la SA CREDIT AGRICOLE relève que l'administration ne se prévaut d'aucune disposition législative expresse l'autorisant à s'écarter du principe de convergence fiscalo-comptable, les dispositions précitées du premier alinéa du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts constituent la disposition législative sur laquelle est fondé le principe de comptabilisation et d'imposition de tous les produits découlant d'une prestation de service fournie au cours d'un seul exercice ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que l'imposition des commissions litigieuses serait dépourvue de base légale ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA CREDIT AGRICOLE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA CREDIT AGRICOLE est rejetée.

2

N° 16VE00026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00026
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SCP WAQUET FARGE HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-15;16ve00026 ?
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