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01/03/2018 | FRANCE | N°16VE00649

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 01 mars 2018, 16VE00649


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MJ Développement a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision en date du 16 avril 2015 par laquelle le maire de Villemomble a préempté un immeuble situé 95 et 97, avenue de Rosny, 32, rue du Docteur Calmette et, sans numéro, allée du Cimetière, à Villemomble.

Par un jugement n° 1505066 en date du 21 janvier 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregi

strés respectivement le 19 février 2016 et le

4 septembre 2017, la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MJ Développement a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision en date du 16 avril 2015 par laquelle le maire de Villemomble a préempté un immeuble situé 95 et 97, avenue de Rosny, 32, rue du Docteur Calmette et, sans numéro, allée du Cimetière, à Villemomble.

Par un jugement n° 1505066 en date du 21 janvier 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 19 février 2016 et le

4 septembre 2017, la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, représentée par Me Renaudin, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de la SAS MJ Développement présentée en première instance ;

2° de mettre à la charge de la SAS MJ Développement la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la délibération du 28 septembre 1987 instituant le droit de préemption urbain de la commune de Villemomble est certifiée exécutoire le 13 octobre 1987 par monsieur le maire ;

- le conseil municipal de la commune a donné délégation au maire pour préempter ;

- la décision du 16 avril 2015 est motivée en partie par référence et est suffisamment motivée ;

- la création de 40 logements sociaux est une priorité d'intérêt général ;

- la création de ces logements a été convenue antérieurement à la décision du

16 avril 2015 ;

- la décision contestée ne constitue pas une atteinte à la liberté de commerce ;

- la circonstance que la décision de préemption, signée par le maire en date du

16 avril 2015, mentionne une lettre de l'OPH du même jour alors que cette dernière laisse apparaitre un tampon de réception en mairie du 21 avril 2015, ne constitue pas un détournement de pouvoir.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.

Une note en délibéré, présentée pour la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, a été enregistrée le 16 février 2018.

1. Considérant que la SAS MJ Développement a conclu une promesse de vente, le

27 janvier 2015, avec MmeA..., d'un immeuble situé 95 et 97, avenue de Rosny, 32, rue du Docteur Calmette et, sans numéro, allée du Cimetière, à Villemomble ; que, par une décision du 16 avril 2015, le maire de la COMMUNE DE VILLEMOMBLE a décidé d'exercer le droit de préemption sur ce bien ; que cette décision a été annulée par un jugement du Tribunal administratif de Montreuil en date du 21 janvier 2016, sur recours de la SAS MJ Développement ; que la COMMUNE DE VILLEMOMBLE relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que, pour annuler la décision susmentionnée, les premiers juges se sont fondés sur l'incompétence du maire de Villemomble ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat (...)15° D'exercer, au nom de la commune, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme, que la commune en soit titulaire ou délégataire, de déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien selon les dispositions prévues au premier alinéa de l'article L. 213-3 de ce même code dans les conditions que fixe le conseil municipal. " ; et qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du même code : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. (...) Le maire certifie, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du

9 avril 2014, affichée le 14 avril 2014 et transmise en préfecture le même jour, le conseil municipal de Villemomble a délégué à son maire, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, le droit de préemption de la commune ; que, par ailleurs, le maire de la commune a certifié sur ladite délibération que celle-ci était exécutoire en application des dispositions de l'article L. 2131-1 susmentionné ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le maire de la COMMUNE DE VILLEMOMBLE ne bénéficiait pas d'une délégation régulière et n'était, par suite, pas compétent pour prendre la décision attaquée, doit être écarté ; que, par suite, la COMMUNE DE VILLEMOMBLE est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision contestée ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SAS MJ Développement devant le tribunal administratif ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. / L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations. " ;

7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le titulaire du droit de préemption urbain peut légalement exercer ce droit, d'une part, s'il justifie, à la date à laquelle il l'exerce, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date et, d'autre part, s'il fait apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ;

8. Considérant que la décision litigieuse en date du 16 avril 2015 indique que l'acquisition, par voie de préemption, de la parcelle située 95 et 97, avenue de Rosny, a pour objet de construire " un programme immobilier de 2 616 m² de surface plancher de l'ordre de

40 logements sociaux de qualité dans un environnement urbain attractif et d'assurer le maintien de la mixité sociale dans ce secteur de la commune ", que le projet " a pour vocation de permettre à l'OPH de Villemomble d'accroître son patrimoine et son offre sur le territoire de la Commune de Villemomble " ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, le fait que la COMMUNE DE VILLEMOMBLE se trouve en situation de carence au regard des objectifs définis par la loi dite " solidarité et renouvellement urbains " (SRU) en matière de logement social ne saurait permettre de justifier l'exercice du droit de préemption en l'absence de toute politique de l'habitat préalablement définie, à laquelle elle aurait été partie prenante ; que par ailleurs la convention d'utilité sociale à laquelle elle se réfère est signée uniquement entre l'office public de l'habitat de la ville de Villemomble et l'Etat ; que cette convention, qui se borne à mentionner la création de 150 nouvelles unités sur la période 2011-2016, ne comporte de surcroît aucun projet réel d'aménagement, préexistant à la décision de préemption, dans le secteur concerné ; que, dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune justifie de la réalité, à la date de la décision en litige, d'une politique locale de l'habitat qui aurait eu en particulier pour objectif de développer l'offre de logements sociaux dans le quartier où se situe l'immeuble préempté, par la création de quarante logements sociaux ; que, par suite, l'arrêté du 16 avril 2015 a été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

9. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à justifier l'annulation de l'arrêté attaqué ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE VILLEMOMBLE n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision de préemption du 16 avril 2015 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SAS MJ Développement, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la COMMUNE DE VILLEMOMBLE la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune, sur ce fondement, le versement à la SAS MJ Développement d'une somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE VILLEMOMBLE est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE VILLEMOMBLE versera à la SAS MJ Développement une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 16VE00649


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00649
Date de la décision : 01/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption. Droit de préemption urbain.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SELARL ETCHE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-01;16ve00649 ?
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