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20/02/2018 | FRANCE | N°17VE03486

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 20 février 2018, 17VE03486


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme AL...AY..., M. A...K..., M. AT...AG..., Mme AN...AD..., M. F...J..., M. D...AQ..., M. R... X..., M. AE...AW..., Mme AA...Z..., M. Q...AR..., M. AF... H..., M. S...AZ..., Mme AX... L..., Mme AO...AP..., M. AE...AB..., Mme Y...M..., M. P...AJ..., Mme AV...AH..., M. E... AU..., Mme AS...AM..., Mme N...U..., M. W...G..., Mme AK...T..., Mme BA...AI..., Mme AS...V..., M. B...BB...AC...et Mme O...I..., ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à titre principal, d'annuler la décision du 27 avril 2017

par laquelle le Directeur régional des entreprises, de la concur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme AL...AY..., M. A...K..., M. AT...AG..., Mme AN...AD..., M. F...J..., M. D...AQ..., M. R... X..., M. AE...AW..., Mme AA...Z..., M. Q...AR..., M. AF... H..., M. S...AZ..., Mme AX... L..., Mme AO...AP..., M. AE...AB..., Mme Y...M..., M. P...AJ..., Mme AV...AH..., M. E... AU..., Mme AS...AM..., Mme N...U..., M. W...G..., Mme AK...T..., Mme BA...AI..., Mme AS...V..., M. B...BB...AC...et Mme O...I..., ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à titre principal, d'annuler la décision du 27 avril 2017 par laquelle le Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), Unité territoriale du Val-d'Oise, a homologué le document unilatéral de leur employeur, la société DSV Air and Sea France portant plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), à titre subsidiaire, de déclarer inopposable les dispositions de ce document unilatéral.

Par un jugement n° 1705917 du 26 septembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 novembre 2017, Mme AS...V..., Mme AL...AY..., M. B... BB...AC..., Mme AN...AD..., M. F... J..., M. D...AQ..., M. R... X..., M. AE...AW..., Mme AV...AH..., Mme BA...AI...et Mme O...I..., représentés par Me Dalençon, avocate, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement et la décision du 27 avril 2017 par laquelle le Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), Unité territoriale du Val-d'Oise, a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société DSV Air and Sea France ;

2° de mettre à la charge de l'État, au bénéfice de chacun d'eux, la somme de 350 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'homologation litigieuse est illégale en ce que l'employeur a frauduleusement entendu se soustraire aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ; le projet de licenciement collectif, intervenu quatre mois après le transfert de patrimoine de la société UTI vers la société DSV Air and Sea par suite d'une fusion-absorption réalisée le 1er octobre 2016, laquelle emporte automatiquement transfert des contrats de travail, vise en effet à faire échec à ces dispositions dès lors que les postes supprimés selon le projet de réorganisation concernent les postes d'anciens salariés d'UTI et que la société DSV Air and Sea a, grâce à l'acquisition d'UTI, presque doublé son chiffre d'affaires et accroît encore sa place sur le marché mondial ; la DIRECCTE n'a pas opéré son contrôle sur ce point ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions l'article 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l'article L. 1233-24-1 du code du travail dès lors que le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été établi par l'employeur sans chercher préalablement à conclure un accord collectif majoritaire et sans que la DIRECCTE censure un tel manquement en se rapprochant notamment des différents acteurs alors qu'elle y est tenue par les dispositions de la circulaire DGEFP 2013-10 du 26 juin 2013 ;

- la procédure d'information-consultation du comité d'entreprise prévue par l'article L. 1233-30 du code du travail est viciée dès lors que ses membres qui n'ont été destinataires que d'un extrait du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) dans une version " projet " ne faisant pas apparaître le nombre de suppressions d'emplois, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre, le calendrier prévisionnel des licenciements, les personnes prioritaires, la liste des postes disponibles, n'ont pas été mis à même de donner leur avis en toute connaissance de cause dans un délai suffisant au terme des réunions des 6, 17 et 27 février 2017 ;

- les observations de la DIRECCTE, particulièrement graves, portant sur le défaut d'information sur les caractéristiques des salariés dont le poste sera supprimé, l'absence de fiche de poste permettant d'apprécier l'objectivité des catégories professionnelles, l'absence d'éléments financiers permettant d'apprécier les moyens dont dispose l'entreprise, ne sont intervenues que postérieurement à la consultation du comité d'entreprise et les modifications apportées aux documents transmis à l'administration ne lui ont pas été présentées ; qu'elle aurait dû intervenir dès le démarrage de la procédure en vertu des articles L. 1233-57-6, L. 1233-46 du code du travail et de l'instruction DGEFP n° 2013-10 du 26 juin 2013 ;

- la décision critiquée est insuffisamment motivée ;

- les mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) sont insuffisantes au regard des moyens de l'entreprise et du groupe auquel elle appartient et ne répondent donc pas aux conditions posées à cet égard par les dispositions combinées des articles L. 1233-57-3 et L. 1233-62 du code du travail ; les premiers juges n'ont pas répondu à l'insuffisance des reclassements ou des mesures d'accompagnement à l'étranger ni sur l'absence de dispositions spécifiques dans le PSE permettant de contrôler le respect du principe d'égalité entre salariés s'agissant du congé de reclassement ; les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 du code du travail sont inexistants ; en homologuant un tel document unilatéral, la DIRECCTE, qui ne disposait en outre d'aucun élément suffisant pour apprécier la réalité des moyens de l'entreprise ou la suffisance des mesures prises a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'article 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

- la directive européenne n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Besson-Ledey,

- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,

- et les observations de Me Dalençon pour Mme V...et autres, de Me AF...pour la société DSV Air et Sea France et de M. C...pour le ministère du travail.

1. Considérant que la société DSV Air et Sea France, qui exerce des activités de transports routier, aérien et maritime et de commissionnaire en douane a, après avoir acquis la totalité du capital social de la société UTI France, élaboré un projet de réorganisation afin de maintenir sa compétitivité dans un secteur très concurrentiel, conduisant à la suppression de 48 postes répartis au sein de trois de ses agences situées à Roissy, Le Havre et Mulhouse et de son département finances et à la modification d'un contrat de travail au sein du département ressources humaines ; que, par une décision du 27 avril 2017, le Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), Unité territoriale du Val-d'Oise, a homologué le document unilatéral de la société DSV Air and Sea France portant plan de sauvegarde de l'emploi ; que Mme V...et autres, salariés de l'entreprise, touchés par le projet de réorganisation, relèvent appel du jugement du 26 septembre 2017 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui a rejeté leur demande d'annulation de cette décision d'homologation ;

Sur le moyen tiré d'une fraude aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " ;

3. Considérant qu'alors que le plan de sauvegarde de l'emploi litigieux est justifié par un motif d'ordre économique de sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise dans un secteur très concurrentiel, que la société DSV Air et Sea France a repris les 99 contrats de travail des employés transférés après la fusion-absorption de la société UTI France et que seuls 26 de ces emplois sont susceptibles de faire l'objet d'un licenciement économique, les requérants n'établissent pas, en se fondant principalement sur la brièveté du délai qui s'est écoulé entre le transfert des contrats et le lancement de la procédure de mise en oeuvre d'un projet de réorganisation et de licenciements collectifs, que la société DSV Air et Sea France aurait mis en oeuvre ce projet aux seules fins de contourner la règle édictée à l'article L. 1224-1 du code du travail ; que le moyen tiré d'une fraude à la loi doit, par suite, être écarté ;

Sur les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée, d'une violation des dispositions de l'article 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, de l'article L. 1233-24-1 du code du travail et de la circulaire DGEFP 2013-10 du 26 juin 2013 en ce que le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été établi par l'employeur sans chercher préalablement à conclure un accord collectif majoritaire :

4. Considérant qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur le moyen tiré de ce que la DIRECCTE n'aurait pas exercé son contrôle sur le respect des règles du droit du travail :

5. Considérant que si les salariés requérants soutiennent que la DIRECCTE ne se serait pas assurée au travers de son contrôle du respect par le PSE de l'application des règles du droit du travail notamment celles de l'article L. 1224-1, il résulte des dispositions du code du travail, et notamment de son article L. 1233-57-3, que l'administration n'a pas à se prononcer, lorsqu'elle statue sur une demande d'homologation d'un document fixant un plan de sauvegarde de l'emploi, sur le motif économique du projet de licenciement collectif dont il n'appartient qu'au juge du licenciement, le cas échéant ultérieurement saisi, d'apprécier le bien-fondé ; que, dès lors, les moyens tiré de ce que la cause économique invoquée ne serait pas étrangère à la cession du capital social de la société UTI France et que la DIRECCTE n'a pas exercer son contrôle sur le respect des dispositions de l'article L. 1224-1 sont inopérants ;

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'information-consultation du comité d'entreprise :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code dans sa rédaction applicable : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. " ; que l'article L. 1233-30 du même code, s'agissant des entreprises ou établissements qui emploient habituellement au moins cinquante salariés, dispose que : " (...) l'employeur réunit et consulte le comité d'entreprise sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi. (...) Le comité d'entreprise tient au moins deux réunions espacées d'au moins quinze jours. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-31 : " L'employeur adresse au représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique: / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; 2° Le nombre de licenciements envisagé ; 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; 6° Les mesures de nature économique envisagées. " ; qu'enfin aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " En l'absence d'accord collectif (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise (...) et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 " ; que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise a été régulière ; qu'elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité d'entreprise, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause ; que l'homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi ne peut être légalement accordée si le comité d'entreprise n'a pas disposé des informations, notamment sur les raisons économiques, financières ou techniques invoquées par l'employeur, lui permettant de formuler en toute connaissance de cause ses avis sur l'opération projetée et sur le projet de licenciement ;

7. Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article L. 1233-57-6 du même code : " L'administration peut, à tout moment en cours de procédure, faire toute observation ou proposition à l'employeur concernant le déroulement de la procédure ou les mesures sociales prévues à l'article L. 1233-32. Elle envoie simultanément copie de ses observations au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et, lorsque la négociation de l'accord visé à l'article L. 1233-24-1 est engagée, aux organisations syndicales représentatives dans l'entreprise. / L'employeur répond à ces observations et adresse copie de sa réponse aux représentants du personnel et, le cas échéant, aux organisations syndicales " ; que l'obligation qui incombe à l'administration d'envoyer copie au comité d'entreprise des observations qu'elle adresse à l'employeur sur le fondement de ces dispositions vise à ce que le comité d'entreprise, saisi en vertu des dispositions rappelées au point ci-dessus, dispose de tous les éléments utiles pour formuler ses avis en toute connaissance de cause ; que le respect de cette obligation doit, par suite, être pris en compte dans l'appréciation globale de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise à laquelle doit se livrer l'administration à la date où elle statue sur la demande d'homologation ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux de réunion du comité d'entreprise que ce dernier a disposé, dès sa première réunion le 27 janvier 2017 du livre I intitulé " projet de licenciement collectif pour motif économique - projet plan de sauvegarde de l'emploi - document unilatéral ", lequel faisait notamment apparaître le nombre de suppressions de postes, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre, le calendrier prévisionnel des licenciements, les personnes prioritaires et la liste des postes disponibles ; que les requérants ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que les membres du comité d'entreprise n'auraient disposé que d'un extrait du plan de sauvegarde de l'emploi ne faisant pas apparaître les informations susmentionnées ;

9. Considérant que le délai de quinze jours minimum prévu par l'article L. 1233-30 du code du travail qui doit séparer la tenue des réunions du comité d'entreprise a été en l'espèce respecté dès lors, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, qu'un délai de 21 jours a séparé la première réunion d'information qui s'est tenue le 6 février 2017, portant ouverture de la procédure d'information-consultation, de la troisième et dernière en date du 27 février 2017 à l'occasion de laquelle le comité d'entreprise a rendu un avis favorable à l'unanimité de ses membres, étant précisé que l'employeur n'était légalement tenu d'organiser que deux réunions ;

10. Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter le moyen tiré de ce que l'administration devait intervenir dès le démarrage de la procédure en vertu des articles L. 1233-57-6, L. 1233-46 du code du travail et de l'instruction DGEFP n° 2013-10 du 26 juin 2013 ;

11. Considérant que postérieurement à l'avis rendu par le comité d'entreprise, la DIRECCTE a adressé, le 14 mars 2017, une lettre d'observations à la société DSV Air and Sea France aux termes de laquelle elle faisait notamment état de ce que le projet présenté n'apportait pas d'informations sur les caractéristiques des salariés dont le poste serait supprimé permettant une évaluation des mesures d'accompagnement mises en oeuvre, qu'aucune précision n'était apportée sur la méthode retenue pour déterminer l'ensemble des catégories professionnelles ni sur le périmètre retenu, que les informations financières données étaient insuffisantes pour juger de la pertinence des moyens alloués au budget formation et création d'entreprise et qu'aucune mesure d'aménagement ne semblait avoir été prévue pour les salariés les plus fragiles ; qu'en réponse à ces observations, la société DSV Air and Sea France a adressé à la DIRECCTE une extraction des données sociales du 31 décembre 2016 avec les informations demandées, a précisé les descriptifs de poste justifiant les différentes catégories professionnelles retenues, confirmé que les deux sites du Havre et de Saint-Vigor-d'Ymonville appartenaient bien à la même zone d'emploi, transmis les données financières permettant une analyse des moyens mis en oeuvre et précisé que s'agissant des budgets de formation et des aides aux créateurs d'entreprise aucun budget n'était fixé pour les salariés bénéficiant d'une solution de reclassement en interne et que pour les salariés dont le licenciement n'aurait pu être évité la proposition de la direction en matière de formation et d'aide aux créateurs d'entreprise a été établie en tenant compte de la qualification des salariés, des montants et dispositifs proposés dans le cadre d'un précédent PSE et que, s'agissant des salariés les plus fragilisés, des mesures spécifiques avaient bien été prévues dans le livre 1 sous le terme de salariés prioritaires ; qu'il ressort des pièces du dossier que la lettre d'observations de la DIRECCTE et les réponses apportées par l'entrepreneur ont été transmises aux membres du comité d'entreprise et que ce dernier avait déjà abordé avec la direction lors de ses réunions des 6, 17 et 27 février 2017, les questions évoquées par la DIRECCTE et a pu, à cette occasion, obtenir les justificatifs que l'employeur a apporté à l'administration en réponse à ses observations ; qu'il avait par ailleurs, dans le cadre du livre 1 qui lui a été communiqué, l'ensemble des éléments d'information qui ont fait l'objet d'un rappel par l'employeur à la DIRECCTE ; que, par suite, et alors que le document unilatéral n'a pas fait l'objet de modification après la réponse de l'employeur à la DIRECCTE, la circonstance que cette dernière ait émis des observations dont le comité d'entreprise n'a eu connaissance qu'après avoir émis son avis n'a pas, en l'espèce, vicié la procédure d'information et de consultation de ce dernier qui a pu émettre un avis en toute connaissance de cause ;

Sur le moyen tiré de ce que les mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) sont insuffisantes au regard des moyens de l'entreprise et du groupe auquel elle appartient et ne répondent pas aux conditions posées à cet égard par les dispositions combinées des articles L. 1233-57-3, L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1233-63 du code du travail :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " En l'absence d'accord collectif ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à 1233-63 en fonction des critères suivants : 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. / Elle prend en compte le rapport le plus récent établi par le comité d'entreprise au titre de l'article L. 2323-56, concernant l'utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi. / Elle s'assure que l'employeur a prévu le recours au contrat de sécurisation professionnelle mentionné à l'article L. 1233-65 ou la mise en place du congé de reclassement mentionné à l'article L. 1233-71. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-61 du même code : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : 1° Des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; 1° bis Des actions favorisant la reprise de tout ou partie des activités en vue d'éviter la fermeture d'un ou de plusieurs établissements ; 2° Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; 4° Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; 6° Des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires réalisées de manière régulière lorsque ce volume montre que l'organisation du travail de l'entreprise est établie sur la base d'une durée collective manifestement supérieure à trente-cinq heures hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou partie des emplois dont la suppression est envisagée. " ; et qu'aux termes de l'article L. 1233-63 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi détermine les modalités de suivi de la mise en oeuvre effective des mesures contenues dans le plan de reclassement prévu à l'article L. 1233-61. / Ce suivi fait l'objet d'une consultation régulière et détaillée du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel dont les avis sont transmis à l'autorité administrative. / L'autorité administrative est associée au suivi de ces mesures et reçoit un bilan, établi par l'employeur, de la mise en oeuvre effective du plan de sauvegarde de l'emploi. " ;

13. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code ; qu'à ce titre elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe ;

14. Considérant qu'à ce titre, il revient notamment à l'autorité administrative de s'assurer que le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité ; que l'employeur doit, à cette fin, avoir identifié dans le plan l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise ; qu'en outre, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, l'employeur, seul débiteur de l'obligation de reclassement, doit avoir procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement dans les autres entreprises du groupe ; que pour l'ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, l'employeur doit avoir indiqué dans le plan leur nombre, leur nature et leur localisation ;

15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'administration a disposé, pour exercer son contrôle, des éléments d'information suffisants quant aux moyens financiers de l'entreprise et du groupe lesquels figuraient dans le Livre 2 qui lui a été communiqué et qui indique le chiffre d'affaires, les données financières, les données sociales 2016, enfin des données complémentaires pour l'année 2016, que la société DSV Air et Sea France lui a en outre adressé le 3 avril 2017 des informations complémentaires sur sa situation financière ainsi que sur les budgets alloués en matière de formation et d'aides aux créateurs d'entreprises, arrêtés après négociations et, le 14 avril 2017, des éléments d'information supplémentaires relatifs à la situation financière du groupe DSV, à savoir les comptes de résultat consolidés et les bilans des trois dernières années ;

16. Considérant que le plan de sauvegarde de l'emploi homologué par l'autorité administrative prévoit, au bénéfice des 49 salariés licenciés, une somme de plus de 2 400 000 euros permettant la mise en oeuvre d'un ensemble de mesures propres à éviter les licenciements parmi lesquelles la priorité donnée aux départs volontaires des salariés dont l'emploi est supprimé en prévoyant des conditions propres à s'assurer de la réalité et du sérieux du projet professionnel, une procédure de reclassement interne sur les postes disponibles au sein de l'entreprise en France ou dans une autre entreprise du groupe située à l'étranger dont la liste jointe n'est pas limitée à 5 pays européens mais est indicative et actualisable, auxquels les salariés intéressés auront directement accès, une reprise intégrale de l'ancienneté acquise au bénéfice des salariés reclassés ainsi qu'une formation adaptation en cas de besoin prise en charge par l'employeur, de même que les frais de transport et d'hébergement, des aides à la mobilité géographique et notamment, en cas de reclassement dans un poste situé à l'étranger, dans le cadre d'une période d'adaptation, un voyage de reconnaissance par le salarié et sa famille et la prise en charge pendant une durée de trois mois des frais liés à la recherche d'un nouveau logement et des frais de déménagement intégraux sur la base de trois devis, enfin une prime de mobilité géographique ; que sont également prévues des mesures destinées à favoriser le reclassement externe des salariés dont le licenciement n'a pu être évité par la constitution d'une cellule de reclassement confiée à un cabinet spécialisé ayant pour mission d'aider les intéressés, pendant une durée de 12 mois, à retrouver un emploi par divers moyens, notamment en dressant un bilan professionnel et en aidant à la formalisation d'un projet professionnel, par des conseils, y compris en matière de formation et par une aide à la création d'entreprises ; que le plan prévoit à cet égard que chaque salarié licencié doit se voir proposer deux offres valables d'emploi correspondant à son profil et dans une zone géographique limitée, un congé de reclassement au bénéfice des salariés licenciés ou des salariés candidats à un départ volontaire, variant de 4, 6 ou 8 mois selon qu'il s'agit d'un salarié dont le départ volontaire aura été accepté, d'un salarié licencié ou d'un salarié reconnu comme personne prioritaire, pour leur permettre de se consacrer entièrement à la réalisation de leur projet professionnel avec maintien du contrat de travail et de leur rémunération pendant la durée du préavis et partiellement au-delà de cette période ; que le plan prévoit enfin une validation des acquis d'expérience, le versement d'une allocation temporaire dégressive au profit des salariés licenciés en cas d'écart défavorable entre le salaire initial et celui perçu dans le nouvel emploi, sans qu'il ne ressorte des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige la société DSV Air and Sea France n'aurait pas été éligible à une allocation et une priorité de réembauchage pendant 12 mois pour les cadres et 24 mois pour les non cadres à compter de la date de rupture du contrat et 30 mois pour les salariés prioritaires ; que s'agissant plus précisément des mesures de formation d'adaptation nécessaires aux salariés concernés par un reclassement interne, la direction de l'entreprise ne s'est fixée aucune limite budgétaire pour satisfaire de tels besoins ; que pour les salariés dont le licenciement n'aura pas pu être évité, il a été prévu 3 000 euros par salarié pour une formation d'adaptation outre la prise en charge des frais de déplacement et d'hébergement dans la limite de 500 euros, 5 000 euros pour une formation de reconversion outre la prise en charge des frais de déplacement et d'hébergement dans la limite de 1 000 euros, 3 000 euros en cas de création ou de reprise d'entreprise outre une aide de 7 000 euros ; que s'agissant plus spécifiquement des salariés prioritaires, le congé de reclassement est porté à 8 mois avec possibilité de suspension, pour les mesures d'aide à la création d'entreprise, la création ou la reprise doit intervenir dans un délai de 12 mois contre 9 pour les autres salariés et la priorité de réembauchage est portée à 30 mois ; que ces mesures précises et concrètes, prises dans leur ensemble, sont de nature à faciliter le reclassement tant interne qu'externe du personnel et à limiter ainsi le nombre des licenciements, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que certaines mesures, prises isolément, auraient pu faire l'objet de mesures plus favorables ; qu'ainsi, alors même que, comme le fait valoir les requérants, la société DSV France emploie sur le seul territoire français 913 salariés dans 34 agences et a un chiffre d'affaires global d'environ 297 millions d'euros, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi contenant ces mesures, l'autorité administrative n'aurait pas tenu compte des moyens dont disposent l'entreprise et le groupe et aurait ainsi méconnu les dispositions des articles L. 1233-57-3, L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1233-63 du code du travail ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges, lesquels s'étant livrés à une appréciation globale des mesures envisagées et n'étaient pas tenus de répondre spécifiquement à chacun des arguments pris isolement soulevés par les requérants à l'appui de leurs moyens, ont pu les écarter ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée en défense, que Mme V...et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation la décision du 27 avril 2017 de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi homologuant le document unilatéral de la société DSV Air and Sea France portant plan de sauvegarde de l'emploi, ni, par suite, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande ; que leur requête doit, dès lors, être rejetée, y compris les conclusions qu'ils ont présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société DSV Air and Sea France au titre de ces mêmes dispositions et de mettre solidairement à la charge des requérants une somme de 1 500 euros au titre des frais qu'elle a exposés non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme V...et autres est rejetée.

Article 2 : Mme AS...V..., Mme AL...AY..., M. B... BB...AC..., Mme AN...AD..., M. F...J..., M. D...AQ..., M. R... X..., M. AE...AW..., Mme AV...AH..., Mme BA...AI...et Mme O...I...verseront solidairement une somme de 1 500 euros à la société DSV Air and Sea France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 17VE03486


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