Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France (CRAMIF) a demandé au Tribunal administratif de Montreuil :
- d'enjoindre à l'Etablissement français du sang (EFS) de communiquer l'ensemble des documents relatifs à la transfusion de M. B... ;
- de dire que l'EFS doit garantir le remboursement de sa créance et fixer le montant du préjudice total à la somme de 597 223,21 euros ;
- de condamner l'EFS à lui verser la somme de 210 048,16 euros, en règlement de sa créance, assortis des intérêts de droit au taux légal à compter de sa première demande en justice.
La Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Paris a demandé, pour sa part, dans le cadre de l'instance introduite par la CRAMIF devant le Tribunal administratif de Montreuil de condamner l'EFS à lui verser la somme de 243 071,90 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2015 sur la somme de 108 306,42 euros, puis à compter du 28 août 2015 sur la somme de 243 071,91 euros.
Par un jugement n° 1407893 du 26 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté les demandes de la CRAMIF et de la CPAM de Paris.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 22 janvier 2016, sous le numéro 16VE00226, et deux mémoires enregistrés respectivement les 3 mars et 5 avril 2017, la CRAMIF, représentée par Me Fergon, avocat, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'enjoindre à l'Etablissement français du sang (EFS) de communiquer l'ensemble des justificatifs relatifs aux démarches effectuées pour identifier le centre de transfusion fournisseur du produit sanguin transfusé à M. B... ;
3° de condamner l'EFS à lui verser la somme de 219 332,82 euros, en règlement de sa créance, avec intérêts de droit au taux légal à compter de sa première demande en justice ;
4° de mettre à la charge de l'EFS la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'Etablissement français du sang ne saurait, pour d'autres motifs que ceux limitativement énumérés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, échapper au droit des tiers payeurs d'exercer à son encontre une action subrogatoire ;
- la circonstance que plusieurs centres de transfusion sanguine aient fourni des produits sanguins au centre hospitalier de Verdun, sans qu'il soit possible de déterminer avec certitude le centre ayant fourni le produit défectueux à l'origine de la contamination de M. B...par le virus de l'hépatite C, ne saurait permettre à l'EFS de se soustraire à son obligation légale ; qu'il doit à tout le moins apporter la preuve des diligences qu'il a effectuées pour identifier ce centre ;
- l'existence d'une transfusion sanguine responsable de la contamination de M. B... a été considérée comme établie par l'ONIAM.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ;
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Besson-Ledey,
- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant Me Fergon, pour la CRAMIF.
1. Considérant que les requêtes susvisées nos 16VE00226 et 16VE00243 présentent à juger des questions communes et ont fait l'objet d'une même instruction ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;
2. Considérant que M.B..., victime d'un accident de la circulation le 17 septembre 1977, a été hospitalisé au centre hospitalier de Verdun du 17 septembre au 25 octobre 1977 ou il a subi une laparotomie en urgence pour splénectomie ; qu'en novembre 2002, un diagnostic de contamination par le virus de l'hépatite C (VHC) a été posé ; que l'intéressé a présenté en 2010 une demande d'indemnisation auprès de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux et des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) qui a, par une décision en date du 19 juin 2012, estimé qu'il apportait un faisceau d'indices concordants permettant de faire présumer que sa contamination par le VHC trouvait son origine dans une transfusion de sang reçue au cours de son hospitalisation après son accident de la route et lui a fait une offre d'indemnisation qu'il a acceptée ; que la CRAMIF et la CPAM de Paris ont saisi le Tribunal administratif de Montreuil d'une action subrogatoire à l'encontre de l'EFS aux fins d'obtenir le remboursement des débours qu'elles ont versés à M. B... ; que, par un jugement du 26 novembre 2015, dont elles relèvent appel, le tribunal administratif a rejeté leur demande ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique : " Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite B ou C ou le virus T-lymphotropique humain causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang réalisée sur les territoires auxquels s'applique le présent chapitre sont indemnisées au titre de la solidarité nationale par l'office mentionné à l'article L. 1142-22 dans les conditions prévues à la seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 3122-1, aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3122-2, au premier alinéa de l'article L. 3122-3 et à l'article L. 3122-4, à l'exception de la seconde phrase du premier alinéa. / (...) L'office et les tiers payeurs ne peuvent exercer d'action subrogatoire contre l'Etablissement français du sang, venu aux droits et obligations des structures mentionnées à l'avant-dernier alinéa, si l'établissement de transfusion sanguine n'est pas assuré, si sa couverture d'assurance est épuisée ou encore dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré. (...) " ;
4. Considérant que s'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique que, même en l'absence de faute, les tiers payeurs sont en droit d'exercer à l'encontre de l'EFS une action subrogatoire à hauteur des sommes versées à la victime d'une contamination par le VHC, c'est seulement lorsque l'EFS peut lui-même bénéficier d'une garantie par les assureurs des structures qu'il a reprises ou par ses propres assureurs ; qu'une telle garantie n'est possible qu'à la condition que le ou les centres de transfusion sanguine fournisseurs du ou des produits effectivement administrés à la victime soient identifiés et qu'ils soient assurés, que leur couverture d'assurance ne soit pas épuisée et que le délai de validité de cette couverture ne soit pas expiré ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise amiable, que le centre hospitalier de Verdun n'a pas été en mesure de retrouver le dossier médical de M. B...en raison de sa destruction probable lors d'une inondation de ses archives dans les années 80 et que l'enquête transfusionnelle n'a en conséquence pas pu aboutir, les archives de l'EFS ne faisant pas état de transfusions de sang au profit de M. B...; que si l'ONIAM a toutefois estimé que M. B...avait apporté la preuve, par des indices concordants, qu'il avait reçu une transfusion dans les suites de son accident de septembre 1977, il n'est pas possible, en raison de la perte des documents médicaux du patient, d'identifier le centre de transfusion fournisseur des produits sanguins administrés à l'intéressé, alors que le centre de transfusion sanguine de Verdun n'était pas le seul distributeur de produits sanguins du centre hospitalier de Verdun ; que, dans ces conditions, il n'est pas possible d'imputer la fourniture d'un produit contaminé à une structure aux droits et obligations de la laquelle vient l'EFS ; qu'ainsi, et alors au demeurant que les démarches de l'EFS auprès de la SHAM, assureur des centres de transfusion sanguine les plus proches du centre hospitalier, sont restées infructueuses, la condition tenant à la couverture assurantielle des centres de transfusion sanguine ne peut être regardée comme remplie ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir ni d'ordonner à l'EFS la communication des justificatifs relatifs aux démarches effectuées pour identifier le centre de transfusion fournisseur du produit sanguin transfusé à M. B..., que ni la CRAMIF ni la CPAM de Paris ne sont fondées à solliciter de l'EFS le remboursement de leurs débours ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leurs demandes ; que leur requête doit, par suite, être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elles ont présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'EFS au titre de ces mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France et de la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'EFS au titre de l'article L. 761-1 du code de justice sont rejetées.
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Nos 16VE00226, 16VE00243