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21/12/2017 | FRANCE | N°17VE01763

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 21 décembre 2017, 17VE01763


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 27 juillet 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1611399 du 9 mai 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 juin 2017, Mme A..., représentée par Me Msi

ka, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 27 juillet 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1611399 du 9 mai 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 juin 2017, Mme A..., représentée par Me Msika, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de quinze jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- le jugement est irrégulier faute d'avoir respecté le droit à un procès équitable et le principe du contradictoire ;

- il n'est pas justifié de la compétence du signataire de l'acte attaqué ni de l'empêchement du préfet ;

- l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé n'est pas suffisamment motivé ;

- elle n'a pas été entendue avant l'intervention de la décision attaquée, en méconnaissance du droit européen ;

- son état de santé ne peut être pris en charge dans son pays d'origine, son traitement pour insuffisance rénale n'y étant pas disponible ;

- elle n'a plus de famille au Cameroun où elle serait isolée ;

- l'arrêté attaqué méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- et les observations de Me Msika pour MmeA....

1. Considérant que MmeA..., ressortissante camerounaise, relève appel du jugement en date du 9 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise daté du 27 juillet 2016 refusant de renouveler son titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a communiqué aux parties les mémoires et pièces jointes produites en première instance conformément aux dispositions applicables du code de justice administrative ; que la requérante n'établit pas que le jugement attaqué serait intervenu en méconnaissance du droit à un procès équitable et du principe du contradictoire ; que, par suite, sa contestation du caractère régulier du jugement doit être écartée ;

Sur le fond du litige :

3. Considérant que MmeB..., chef de service à la préfecture du Val-d'Oise et signataire de l'acte attaqué, a reçu délégation pour signer ce type de décision par un arrêté du préfet en date du 2 mai 2016, régulièrement publié ; que Mme A...n'établit pas que le préfet n'aurait pas été absent ou empêché ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté ;

4. Considérant que l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé du 2 juin 2016 qui précise que l'état de santé de la requérante nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une extrême gravité mais qu'un traitement approprié peut être poursuivi dans son pays d'origine est, en tout état de cause, suffisamment motivé ;

5. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, laquelle, en vertu du premier alinéa du paragraphe 1 de l'article 6 du traité sur l'Union européenne, a la même valeur juridique que les traités : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ; que, si les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que le rappelle la Cour de justice de l'Union européenne notamment dans son arrêt du 5 novembre 2014, Mukarabega, aff. C-166-13, ne sont pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union, relatif au respect des droits de la défense, imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée ;

6. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que, lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; qu'en l'espèce, il n'est pas sérieusement allégué que Mme A...ait sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux ni qu'elle ait été empêchée de présenter ses observations avant que ne soit prise la décision litigieuse ; que, par suite, le moyen tiré de ce que son droit à être entendue garanti par le droit européen doit être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° : A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) :/ 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié" ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ;-si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. (...) " ; que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ; que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

8. Considérant que, si la requérante a fait le don d'un rein à une personne de sa famille et doit, à ce titre faire l'objet d'une surveillance régulière, les deux attestations médicales des docteurs Renaud et Azoulay, datées du 24 mars 2016 et du 14 avril 2016, rédigées en termes peu circonstanciés, ne sont pas de nature à infirmer l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé aux termes duquel la requérante peut faire l'objet d'un suivi adapté à son état de santé, qui ne nécessite pas de dialyse, dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que

Mme A...ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié au Cameroun doit être écarté ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que Mme A...ne conteste pas avoir vécu au Cameroun jusqu'à l'âge de 53 ans et y avoir encore une soeur ; qu'elle ne justifie pas d'une vie privée et familiale constituée en France ; que, par suite, elle ne démontre pas que le préfet aurait porté au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées une atteinte disproportionnée ;

10. Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux méconnaitrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est dépourvu des précisions permettant d'en apprécier la portée ; qu'il doit donc être rejeté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

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N° 17VE01763


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01763
Date de la décision : 21/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : SCP GUILLEMIN et MSIKA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-12-21;17ve01763 ?
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