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03/10/2017 | FRANCE | N°15VE01488

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 03 octobre 2017, 15VE01488


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC CONSTANTY a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner la commune d'Aulnay-sous-Bois à lui verser une somme de 90 000 euros au titre de la dévaluation de son fonds de commerce, 35 847 euros au titre de la perte de son chiffre d'affaires réalisé, et 100 000 euros de provision à valoir sur les pertes à venir assortie des intérêts de droit à compter du 18 juillet 2013 au titre notamment de la faute commise par la commune en autorisant M. A...à transférer un débit de tabac au 2 plac

e Vaillant-Couturier à Aulnay-sous-Bois.

Par un jugement n° 1308884 du 19 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC CONSTANTY a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner la commune d'Aulnay-sous-Bois à lui verser une somme de 90 000 euros au titre de la dévaluation de son fonds de commerce, 35 847 euros au titre de la perte de son chiffre d'affaires réalisé, et 100 000 euros de provision à valoir sur les pertes à venir assortie des intérêts de droit à compter du 18 juillet 2013 au titre notamment de la faute commise par la commune en autorisant M. A...à transférer un débit de tabac au 2 place Vaillant-Couturier à Aulnay-sous-Bois.

Par un jugement n° 1308884 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de

Montreuil a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 mai 2015, la SNC CONSTANTY, dont le siège social est situé 4 avenue Eugène Schueller à Aulnay-sous-Bois (93600), représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 90 000 euros au titre de la dévaluation de son fonds de commerce, 35 847 euros au titre de la perte de son chiffre d'affaires réalisé, et 100 000 euros de provision à valoir sur les pertes à venir assortie des intérêts de droit à compter du 18 juillet 2013, et de la capitalisation de ces intérêts, au titre de la faute commise par la commune en autorisant M. A...à transférer un débit de tabac au 2 place Vaillant-Couturier à Aulnay-sous-Bois ;

3°) subsidiairement, de désigner un expert pour évaluer les préjudices subis ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de

3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité de l'Etat doit être engagée pour faute dès lors que le transfert autorisé méconnaît les articles 9, 11 et 13 du décret du 28 juin 2010 ; que d'ailleurs, la commune n'a pas suivi les avis défavorables de la direction des douanes et droits indirects et de la confédération des buralistes ; que la commune a entaché sa décision d'un détournement de pouvoir ;

- la responsabilité de la commune et de l'Etat doit également être engagée du fait de la rupture d'égalité devant les charges publiques dès lors qu'elle peut justifier d'un préjudice grave, anormal, personnel et spécial ; que, du fait que son concurrent se trouve désormais à 400 mètres, elle a perdu 27 % sur son chiffre d'affaires de tabac et 20 % sur les recettes du bar ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts, notamment son article 568 ;

- le décret n° 2010-720 du 28 juin 2010 relatif à l'exercice du monopole de la vente au détail des tabacs manufacturés ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Margerit,

- et les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,

1. Considérant que la SNC CONSTANTY exploite un bar-tabac à l'enseigne de l'Espérance, situé sur la commune d'Aulnay-sous-Bois ; que le maire de cette commune a, par arrêté en date du 16 juin 2011, autorisé le déplacement de l'autre bar-tabac de la commune, à l'enseigne du Floréal, près d'un ensemble de commerces proche du commerce exploité par la SNC CONSTANTY ; que cette dernière a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner la commune d'Aulnay-sous-Bois à lui verser une somme de 90 000 euros au titre de la dévaluation de son fonds de commerce, 35 847 euros au titre de la perte de son chiffre d'affaires réalisé, et 100 000 euros de provision à valoir sur les pertes à venir assortie des intérêts de droit à compter du 18 juillet 2013 au titre notamment de la faute commise par la commune en autorisant M. A...à transférer un débit de tabac au 2 place Vaillant-Couturier à Aulnay-sous-Bois ; que, par un jugement du 20 octobre 2014, le Tribunal administratif de

Montreuil a rejeté sa requête ; que la société relève régulièrement appel de ce jugement ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Sur la responsabilité pour faute :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret du 28 juin 2010 relatif à l'exercice du monopole de la vente au détail des tabacs manufacturés : " L'implantation d'un débit de tabac ne doit pas avoir pour effet de déséquilibrer le réseau local existant de vente au détail des tabacs. " ; qu'aux termes de l'article 11 du même décret : " Les implantations de débits de tabac sont interdites :/1° Dans les galeries marchandes attenantes à un établissement de vente au détail en libre service qui réalise plus du tiers de son chiffre d'affaires dans la vente de produits alimentaires et dont la surface de vente est supérieure ou égale à 1 000 mètres carrés ; /2° Dans les centres commerciaux, hormis ceux constitués exclusivement de commerces de proximité desservant principalement ou en totalité les résidents d'une commune ou de l'un de ses quartiers ; / 3° Dans le périmètre d'implantation des débits de tabac fermés provisoirement " ; et qu'aux termes de l'article 13 du même décret : " Un débit de tabac ordinaire permanent peut être déplacé à l'intérieur d'une même commune dans les conditions prévues à l'article 70 de la loi du 12 mai 2009 susvisée. Les dispositions des articles 9 et 11 s'appliquent aux déplacements intracommunaux (...)" ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le commerce exploité par la SNC CONSTANTY se situait à 800 mètres du site initial du débit de tabac " le Floréal ", ces deux commerces étant situés dans une zone pavillonnaire dépourvue de places de stationnement dédiées ; que le nouveau site du débit de tabac " Le Floréal " est situé dans la même commune, à environ 400 mètres de la société requérante, dans un ensemble de bâtiments hébergeant un ensemble de commerces comportant une surface Intermarché ; que la zone de chalandise du débit transféré génère un flux de clientèle de 2 000 personnes par jour et se situe dans une zone en progression démographique ; que l'ensemble de la ville ne compte qu'un bureau de tabac pour 4 691 habitants, alors que la moyenne nationale est d'un bureau de tabac pour 2 000 personnes ; que les éléments produits tant en appel qu'en première instance par la requérante, de caractère au demeurant non comptable, ne permettent pas de quantifier les éventuels reports de clientèle entre la société requérante et le Floréal, et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'accroissement de l'offre de tabac dans la zone de chalandise induit par l'implantation du Floréal mettrait en péril l'exploitation de la société requérante et ainsi déséquilibrerait le réseau local existant de vente de tabac au détail ;

4. Considérant, ainsi qu'il a été dit en première instance, que la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que l'autorisation de transfert ait méconnu l'avis de direction des douanes et droits indirects qui n'avait pas le caractère d'un avis conforme ;

5. Considérant que la requérante se borne à soutenir que l'arrêté de transfert méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article 11 du décret du 28 juin 2010 ; qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que le débit de tabac " Le Floréal " serait situé au sein de la galerie marchande d'un établissement de vente au détail en libre service qui réalise plus du tiers de son chiffre d'affaires dans la vente de produits alimentaires et d'une superficie supérieure à 1 000 m2, ni qu'il serait implanté dans un centre commercial n'étant pas constitué exclusivement de commerces de proximité desservant principalement ou en totalité les résidents d'une commune ou de l'un de ses quartiers ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du décret du 28 juin 2010 précité doit être écarté ;

6. Considérant, enfin, qu'à elle seule, la circonstance que l'arrêté d'autorisation de transfert du Floreal mentionnerait la situation difficile de son propriétaire n'est pas de nature à établir un détournement de pouvoir ;

Sur la responsabilité sans faute :

7. Considérant enfin que la SNC CONSTANTY soutient que la responsabilité de l'Etat est engagée sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques qui résulterait pour elle-même de l'autorisation de transfert accordé ; que, toutefois, dans un contexte global de forte réduction de la consommation de tabac et d'augmentation des ventes de cigarettes électroniques, la société requérante admet elle-même que les commerces du quartier " périclitent les uns après les autres " ; qu'une brasserie s'est également installée à proximité de son établissement ; qu'au regard de ces évolutions, toutes susceptibles d'avoir entraîné une perte de clientèle pour cette dernière, la société ne démontre pas que la perte de chiffre d'affaires qu'elle a subie, d'environ 15% par an entre 20012 et 2014, résulterait du transfert du Floreal ; que s'il résulte de l'instruction que le Floreal a enregistré une importante hausse de son chiffre d'affaires, la société requérante n'établit pas que cette hausse résulterait d'une captation de clientèle et non des effets du changement de gérance et des projets commerciaux du Floréal ; qu'en outre, et ainsi qu'il a été dit, la baisse de chiffre d'affaires enregistrée par la SNC CONSTANTY est limitée ; qu'ainsi, celle-ci n'établit avoir subi, du fait de l'autorisation de transfert dont s'agit, ni un préjudice certain, ni un préjudice anormal et spécial de nature à lui ouvrir droit à réparation sur le fondement de la rupture d'égalité des citoyens devant les charges publiques ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que la SNC CONSTANTY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée au titre des frais exposés par la SNC CONSTANTY et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SNC CONSTANTY est rejetée.

2

N° 15VE01488


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE01488
Date de la décision : 03/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-02-01-01 Domaine. Domaine public. Régime. Occupation. Utilisations privatives du domaine.


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: Mme Diane MARGERIT
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : SCP WUILQUE-BOSQUE-TAOUIL-BARANIACK-

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-10-03;15ve01488 ?
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