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28/09/2017 | FRANCE | N°15VE02566

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 28 septembre 2017, 15VE02566


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) a demandé au

Tribunal administratif de Montreuil la réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011 ;

Par un jugement n° 1308087 du 1er juin 2015, le Tribunal administratif de

Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 30 juillet 2015, 31 mars 2016 et

7 septembr

e 2017, la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE), représentée par

Me B...et MeA..., avocats, demande à la Cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) a demandé au

Tribunal administratif de Montreuil la réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011 ;

Par un jugement n° 1308087 du 1er juin 2015, le Tribunal administratif de

Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 30 juillet 2015, 31 mars 2016 et

7 septembre 2017, la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE), représentée par

Me B...et MeA..., avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer les dégrèvements d'impôt sur les sociétés pour les montants correspondants aux bases concernées ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en matière d'acte anormal de gestion, la charge de la preuve repose sur l'administration même si la jurisprudence du Conseil d'Etat retient que le contribuable doit justifier de la déductibilité de ses charges ; or l'objet du bureau de représentation de Shangaï s'inscrivait dans le cadre des activités de la banque et répondait à son intérêt propre ; l'activité de gestion collective consistait en effet à exercer l'activité dans des conditions identiques à celles menées par la requérante en France, soit par l'intermédiaire d'une filiale ou par une participation dans une société locale exerçant ce métier ; l'objet du bureau de Shangaï est de développer l'ensemble des activités de la banque et non celle de ses filiales ;

- l'activité du bureau de représentation n'a donc pas eu pour effet de réaliser des prestations dans l'intérêt des filiales du groupe, de nature à caractériser un acte anormal de gestion ;

- la banque exerce, parmi ses activités, celle de holding du groupe et il lui revient d'animer ce réseau de filiales et de s'intéresser à cette activité de gestion collective ; rien ne lui interdisait d'exercer directement cette activité en Chine et de prévoir des participations dans ce domaine d'activité ;

- l'intérêt de la banque peut rejoindre celle du groupe auquel elle appartient et l'activité exercée lui être ainsi profitable ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société requérante.

1. Considérant que la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE), qui exerce une activité de banque et une activité de gestion privée dite de gestion sous mandat, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des rectifications lui ont été proposées en matière d'impôt sur les sociétés, puis d'un contrôle sur place à la suite duquel elle a demandé, par réclamation du 26 décembre 2012, que soient déduits de ses résultats imposables en France des frais qu'elle avait engagés pour le fonctionnement de son bureau de représentation à Shanghai et qu'elle avait initialement omis de comptabiliser en charges déductibles ; qu'elle demande, à raison de la déduction de ces frais, la réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos entre 2008 et 2011 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; que, toutefois, lorsque le contribuable conteste une imposition primitive établie conformément à sa déclaration, il lui appartient d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues ;

3. Considérant que pour demander la déduction de dépenses de 780 870,50 euros,

1 324 960,94 euros, 1 656 621,02 euros et 2 040 064,03 euros, respectivement au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011, la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) fait valoir qu'elles correspondent à des frais de personnel, de location de bureaux, de réception, de déplacement et de fournitures, ainsi qu'à des honoraires d'avocats, engagés pour le fonctionnement de son bureau de représentation à Shanghaï dont l'objet était, selon elle, de mettre en place des prises de participations dans des sociétés communes ou de constituer des filiales avec des résidents chinois, en particulier dans les secteurs de la banque privée, de la banque d'affaires et de la gestion d'actifs ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que ce bureau de représentation à Shangaï, avait pour principal objectif, comme cela est précisé dans le contrat de travail de son représentant M.C..., d'étudier l'opportunité de développer localement les activités de gestion du groupe de la banque, qu'il s'agisse de gestion privée ou de gestion collective, et de réunir les conditions permettant la création d'une joint-venture en asset management avec un partenaire local ; que ces activités se sont manifestées notamment par la mise en place d'un partenariat avec une société chinoise de gestion d'actifs et l'entrée au capital de cette société par la requérante ainsi que par la signature d'un protocole prévoyant l'entrée de la Bank of China dans le capital de la requérante ; que si l'administration a estimé que la société requérante ne pouvait déduire de son bénéfice les charges afférentes à cette activité de gestion collective, confiée en France à ses filiales, il n'est aucunement établi que cette activité aurait bénéficié à ses filiales françaises ou à des filiales chinoises, qui, au demeurant, n'avaient pas été constituées ; qu'en outre, si l'administration relève que l'activité de ce bureau de représentation a eu pour effet de développer l'activité de l'ensemble du groupe bancaire et non de la seule société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) et s'il résulte de l'instruction que ce bureau avait pour mission de " développer les activités de gestion du groupe de la banque ", la société requérante allègue, sans être démentie, que la banque exerce notamment les activités de holding d'un groupe de filiales, se consacrant en particulier à la gestion collective ; que, dès lors, en confiant à son bureau de représentation de Shangaï le suivi de cette activité de gestion collective, la société requérante a entendu développer une activité en lien avec son objet social d'animation de son réseau de filiales ; que, la société requérante apporte ainsi les éléments suffisants de nature à établir que les dépenses mentionnées au point 3 ont été exposées dans son intérêt propre ; que la société

EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) est ainsi fondée à demander la réduction des bases imposables pour les années susmentionnées ainsi que la réduction des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011 pour les parts formant surtaxe à raison de ces réductions de base ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société

EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande de réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercice clos en 2008, 2009, 2010 et 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle dans l'instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les résultats imposables de la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) sont réduits au titre de l'exercice clos en 2008 d'un montant de 780 870,50 euros, au titre de l'exercice clos en 2009 d'un montant de 1 324 960,94 euros, au titre de l'exercice clos en 2010 d'un montant de 1 656 621,02 euros et au titre de l'exercice clos en 2011 d'un montant de

2 040 064,03 euros. La société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) est déchargée des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011 pour les parts formant surtaxe à raison des réductions de bases susmentionnées.

Article 2 : L'Etat versera à la société EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

4

N° 15VE02566


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02566
Date de la décision : 28/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-09 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Charges diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-09-28;15ve02566 ?
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