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20/07/2017 | FRANCE | N°16VE00638

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 20 juillet 2017, 16VE00638


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge, en qualité de société " tête de groupe ", au titre des exercices clos le 31 octobre des années 2000, 2001 et 2002.

Par un jugement n° 0708716 du 26 mai 2011, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise

a rejeté sa demande.

Première procédure devant la Cour :

Par une requête et de nouveaux mém...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge, en qualité de société " tête de groupe ", au titre des exercices clos le 31 octobre des années 2000, 2001 et 2002.

Par un jugement n° 0708716 du 26 mai 2011, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Première procédure devant la Cour :

Par une requête et de nouveaux mémoires, enregistrés les 13 juillet 2011,

18 octobre 2011, 23 avril 2013, la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE, représentée par Me Zamour, avocat, a demandé à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0708716 du 26 mai 2011 par lequel le

Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution de 10 % à l'impôt sur les sociétés, ainsi que des pénalités y afférentes au titre des exercices clos en 2000, 2001 et 2002 ;

2° de prononcer la décharge de ces impositions ;

.........................................................................................................

Par un arrêt n° 11VE02628 du 21 mai 2013, la Cour a rejeté la requête formée par la

SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE.

Procédure devant le Conseil d'Etat :

Par une décision n° 371258 du 10 février 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt, en tant qu'il porte sur les redevances d'utilisation de la marque " Le Fouquet's ", et a renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la Cour.

Seconde procédure devant la Cour :

Par des mémoires enregistrés les 27 mai 2016 et 5 juin 2017, la

SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE, représentée par Me Zamour, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement, en tant qu'il porte sur les redevances d'utilisation de la marque " Le Fouquet's " ;

2° de lui accorder la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge, en qualité de société " tête de groupe ", au titre des exercices clos le 31 octobre des années 2000, 2001 et 2002, en tant que ces suppléments procèdent de la rectification portant sur les redevances d'utilisation de la marque " Le Fouquet's " ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le remboursement des dépens, ainsi que le versement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE soutient que :

- l'administration ne pouvait réintégrer aux résultats imposables de la

SA société d'exploitation de la marque " Le Fouquet's " (SEMF) le montant des redevances de marque que celle-ci s'est abstenue de percevoir de la SA société d'exploitation du restaurant " Le Fouquet's " (SERF), au cours des exercices en litige, au motif que cette renonciation à recettes était constitutive d'un acte anormal de gestion, alors que l'avantage ainsi accordé présentait, pour la SEMF, la contrepartie de ne pas aggraver les difficultés financières de la SERF et, par suite, de ne pas dévaloriser la marque " Le Fouquet's " ;

- en tout état de cause, la renonciation à recettes litigieuse constitue une subvention intra-groupe devant être fiscalement neutralisée en application de l'article 223 B du code général des impôts et de l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au même code.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutain,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., substituant Me Zamour, pour la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE.

1. Considérant que la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE est la société mère d'un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d'intégration fiscale prévu aux articles 223 A et suivants du code général des impôts, dont font notamment partie la SA société d'exploitation de la marque " Le Fouquet's " (SEMF), qui a pour activité l'exploitation et le développement de cette marque, et la SA société d'exploitation du restaurant " Le Fouquet's " (SERF), laquelle gère, en particulier, le restaurant éponyme situé sur l'avenue des Champs Elysées, à Paris ; que la SEMF a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er novembre 1999 au 31 octobre 2002 ; qu'à la suite de ce contrôle, l'administration, suivant la procédure contradictoire, a, d'une part, rehaussé, à hauteur de 914 694 euros, la valeur des actifs immobilisés figurant au bilan de clôture de la SEMF au titre de l'exercice clos en 2000 et, d'autre part, réintégré aux résultats imposables de l'intéressée le montant des redevances qu'elle avait renoncé à percevoir de la SERF pour l'utilisation par celle-ci de la marque " Le Fouquet's " ; que ce montant a été évalué par le service à 3 % du chiffre d'affaires de l'utilisatrice, par comparaison avec les stipulations des concessions de licence de marques conclues par la SEMF avec d'autres sociétés du groupe ; qu'il a été chiffré à 502 214 euros au titre de l'exercice clos en 2000, à 496 712 euros au titre de l'exercice clos en 2001 et à

453 650 euros au titre de l'exercice clos en 2002 ; que, par jugement n° 0708716 du 26 mai 2011, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de la

SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE tendant à obtenir la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été consécutivement assujettie en qualité de société " tête de groupe ", à raison des deux rectifications susmentionnées, au titre des exercices clos le 31 octobre des années 2000, 2001 et 2002 ; qu'ayant relevé appel de ce jugement, la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE ne demande plus, dans le dernier état de ses écritures, que la réduction, en droits et pénalités, desdits suppléments d'impositions, en tant qu'ils procèdent de la rectification afférente aux redevances d'utilisation de la marque " Le Fouquet's " ;

Sur les conclusions à fin de réduction et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

2. Considérant, d'une part, que le fait de renoncer à obtenir une contrepartie financière à une concession de licence de marque ne relève pas en règle générale d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant un tel avantage, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; qu'il incombe à cette entreprise de justifier de l'existence d'une contrepartie à un tel choix, tant dans son principe que dans son montant ; que si, d'autre part, la valorisation potentielle d'actifs ne constitue en principe pas un mode de rémunération normale d'une concession de licence de marque, une entreprise peut en revanche apporter les justifications nécessaires en démontrant que l'avantage a été consenti en vue de la préservation de l'existence même d'actifs dont dépend la pérennité de sa propre activité économique ou de la prévention d'une dévalorisation certaine dans des conditions compromettant durablement leur usage comme source de revenus ; qu'il appartient, le cas échéant, à l'administration de démontrer que ces contreparties sont inexistantes, dépourvues d'intérêt pour l'entreprise ou insuffisantes ;

3. Considérant, en l'espèce, qu'il est constant qu'en renonçant à percevoir, au cours des exercices en litige, les redevances qu'impliquait en principe l'usage par la SERF, dans le cadre de l'exploitation de son restaurant parisien, de la marque " Le Fouquet's ", la SEMF a consenti un avantage à sa société soeur ; que la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE fait notamment valoir que l'avantage ainsi accordé avait pour but de ne pas aggraver les difficultés financières que rencontrait à l'époque la SERF ; qu'une éventuelle fermeture du restaurant " Le Fouquet's " aurait en effet porté gravement atteinte au renom de la marque " Le Fouquet's ", sur la valeur de laquelle repose l'activité économique de la SEMF ; que la requérante, contrairement à ce que soutient l'administration, justifie des difficultés financières ainsi alléguées, les résultats de la SERF s'étant avérés déficitaires sur l'ensemble de la période en litige, à hauteur respective de 1 471 087 euros au titre de l'exercice clos en 2000, de 5 478 305 euros au titre de l'exercice clos en 2001 et de 1 596 569 euros au titre de l'exercice clos en 2002 ; que, par ailleurs, il n'est pas sérieusement contesté que si elle n'aurait pas nécessairement entraîné la disparition même de la marque " Le Fouquet's ", dont la SEMF avait également concédé l'usage pour d'autres établissements situés à Cannes et à Toulouse, la fermeture du restaurant parisien exploité par la SERF, dont a procédé la réputation internationale de cette marque, aurait emporté une dévalorisation certaine et durable dudit actif ; que, dans ces conditions, la requérante établit que la SEMF, en accordant à sa société soeur l'avantage en cause, a agi dans son propre intérêt économique ; qu'enfin, le service ne démontre pas, de son côté, qu'eu égard aux caractéristiques de cette aide, la prévention du risque de dévalorisation susmentionné n'aurait pas constitué, pour la SEMF, une contrepartie suffisante ; qu'il suit de là que la SA HOTELS ET CASINO

DE DEAUVILLE est fondée à soutenir que la renonciation à recettes litigieuse ne peut être qualifiée d'acte anormal de gestion ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA HOTELS ET CASINO

DE DEAUVILLE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions à fin de décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impositions assis sur la rectification examinée aux points 2 et 3 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE ne justifie pas avoir, à l'occasion de la présente instance, exposé de dépens, au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions à fin de remboursement présentées, à ce titre, par l'intéressée ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la requérante d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du même code ;

DECIDE :

Article 1er : Les bases d'imposition de la SA société d'exploitation de la marque " Le Fouquet's " (SEMF) à l'impôt sur les sociétés sont respectivement réduites de 502 214 euros au titre de l'exercice clos le 31 octobre 2000, de 496 712 euros au titre de l'exercice clos le

31 octobre 2001 et de 453 650 euros au titre de l'exercice clos le 31 octobre 2002.

Article 2 : Il est accordé à la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, en qualité de société " tête de groupe ", au titre des exercices clos en 2000, 2001 et 2002, pour la part formant surtaxe à raison de la réduction de base prononcée à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : L'Etat versera à la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la SA HOTELS ET CASINO DE DEAUVILLE est rejeté.

Article 5 : Le jugement rendu par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 26 mai 2011 sous le n° 0708716 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

2

N° 16VE00638


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00638
Date de la décision : 20/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Eric TOUTAIN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SELARL ZAMOUR ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-07-20;16ve00638 ?
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