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22/06/2017 | FRANCE | N°15VE01729

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 22 juin 2017, 15VE01729


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune d'Antony à lui verser une indemnité de 45 000 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, en réparation des préjudices moral et financier qu'il estime avoir subis. Par un jugement n° 1305425 du 2 avril 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2015, M.A..., représenté par Me Boukhel

oua, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement, ensemble la décision du 3 mai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune d'Antony à lui verser une indemnité de 45 000 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, en réparation des préjudices moral et financier qu'il estime avoir subis. Par un jugement n° 1305425 du 2 avril 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2015, M.A..., représenté par Me Boukheloua, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement, ensemble la décision du 3 mai 2013 par laquelle le maire d'Antony a rejeté sa réclamation indemnitaire préalable ;

2° de condamner la commune d'Antony à lui verser une indemnité de 45 000 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, en réparation des préjudices moral et financier qu'il estime avoir subis ;

3° de mettre à la charge de la commune d'Antony le versement d'une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

- la minute du jugement attaqué n'est pas signée, en méconnaissance de l'article

R. 741-7 du code de justice administrative ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il rapporte des éléments suffisants pour permettre de faire présumer qu'il a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral, au sens de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, éléments qui ne sont pas, en l'espèce, utilement combattus par l'administration et qui sont, par suite, constitutifs d'une faute de nature à engager la responsabilité de celle-ci ;

- au nombre de ces agissements figurent, notamment, les décisions des 16 octobre et 7 novembre 2008 lui retirant les fonctions de chef de bassin, ainsi que l'abaissement de sa notation au titre de l'année 2008, décisions qui ont été annulées par les tribunaux administratifs et dont l'illégalité engage également la responsabilité de l'administration ;

- ces fautes lui ont directement causé des préjudices moral et financier, évalués à un total de 45 000 euros.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutain,

- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.

1. Considérant que M.A..., éducateur des activités physiques et sportives titulaire employé par la commune d'Antony, exerçait, depuis 2007, les fonctions de maître-nageur sauveteur au sein de la piscine municipale des Iris, jusqu'au transfert de cet équipement et des personnels y étant affectés, en mars 2010, au profit de la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre ; que, par réclamation préalable adressée à la commune d'Antony le 5 mars 2013, M. A... a sollicité le versement d'une indemnité de 45 000 euros, en réparation des préjudices moral et financier qu'il estimait avoir subis à raison, notamment, d'agissements répétés de harcèlement moral dont il aurait été victime au cours de la période de 2007 à 2010 ; qu'après rejet de cette réclamation, par décision du 3 mai 2013, M. A...a réitéré sa demande devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ; que, par jugement n°1305425 du

2 avril 2015, dont M. A... relève appel, ledit Tribunal a rejeté cette demande indemnitaire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ;

3. Considérant que d'une part, il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ; que, d'autre part, la circonstance que l'ampliation de ce jugement adressée à M. A... n'aurait pas comporté ces mêmes signatures demeure sans incidence sur le respect des dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait, à ce titre, entaché d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Considérant, en premier lieu, que si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'administration, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise ; qu'en l'espèce, M. A...se prévaut notamment de ce que le Tribunal administratif de Versailles, par un jugement rendu le 1er avril 2011 sous le n° 0900580 et devenu définitif, a annulé les décisions des 16 octobre et 7 novembre 2008 par lesquelles la commune d'Antony lui avait retiré les fonctions de chef de bassin de la piscine l'Iris qu'il exerçait jusqu'alors, motif pris de ce que ces décisions, qui avaient été prises en considération de la personne de l'intéressé, n'avaient pas été précédées de la communication de son dossier, en méconnaissance de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, et étaient, par suite, entachées d'un vice de procédure ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que ces décisions étaient, à l'époque, justifiées, d'une part, par les difficultés qu'avaient rencontrées M. A...dans l'exercice des fonctions de chef de bassin, ainsi qu'il ressort notamment de la lettre que l'intéressé avait adressée au maire d'Antony le 31 août 2008, et, d'autre part, par la circonstance que la commune avait entendu, dans le cadre de l'organisation du service, placer les deux piscines municipales sous la responsabilité d'un unique chef de bassin, en la personne de M.B... ; que, dans ces conditions, les deux décisions ainsi annulées auraient pu, dans le cadre d'une procédure régulière, être légalement prises ; qu'en conséquence, les préjudices allégués par le requérant ne peuvent être regardés comme la conséquence du vice de procédure dont ces décisions étaient entachées ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que, par un jugement n° 0908546 du 16 décembre 2013 et devenu définitif, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la notation de

M. A...au titre de l'année 2008, qui accusait une baisse de 0,75 points par rapport à celle de l'année précédente sans justification fournie par la commune d'Antony, comme étant entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'illégalité fautive de cette notation, qu'invoque également M.A..., est bien de nature à engager la responsabilité de la commune d'Antony ; que, toutefois, aucun des chefs de préjudices moral et financier dont le requérant sollicite réparation à l'occasion de la présente instance, à savoir un état dépressif, une atteinte à sa réputation professionnelle et diverses pertes de rémunération, préjudices que l'intéressé impute au retrait de ses fonctions de chef de bassin, tel que mentionné au point 5, et à des agissements allégués de harcèlement moral, examinés ci-après aux points 7 à 10, ne présente de lien de causalité directe avec l'illégalité de sa notation au titre de l'année 2008 ; que, dans ces conditions, les conclusions indemnitaires présentées à ce dernier titre ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en

considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés (...) " ;

7. Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

8. Considérant, d'autre part, que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;

9. Considérant, en l'espèce, que, pour soutenir qu'il aurait subi, au cours de la période de 2007 à 2010, des agissements répétés de harcèlement moral, M. A...se prévaut de son retrait des fonctions de chef de bassin, dans les conditions rappelées au point 4, et soutient qu'il aurait, en outre, été victime d'une mise à l'écart, se traduisant notamment par le fait qu'il n'aurait plus été consulté sur l'établissement des plannings et des manifestations organisées à la piscine des Iris, qu'il aurait été privé de certaines attributions, qu'il se serait vu imposer de multiples modifications d'emploi du temps, heures supplémentaires et refus de congés sans motifs ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que les décisions des 16 octobre et 7 novembre 2008 ayant retiré au requérant ses fonctions de chef de bassin, bien qu'entachées d'un vice de procédure, s'avéraient, comme exposé au point 4, justifiées dans l'intérêt du service ; que, pour le surplus, aucune des pièces produites par l'intéressé ne permet de corroborer les diverses allégations susmentionnées, selon lesquelles il aurait été victime, alors que M. B...avait repris les fonctions de chef de bassin, d'une mise à l'écart dans l'exercice des fonctions, qu'il avait conservées, de maître-nageur sauveteur ; que si M. A... se plaint également de ce qu'il ne disposait pas d'un bureau et d'un ordinateur personnels, l'intéressé ne conteste pas que tel était le cas des autres maîtres-nageurs sauveteurs, ni n'établit davantage en quoi ces équipements auraient été indispensables à l'exercice de ses fonctions ; que, par ailleurs, le rappel à l'ordre adressé au requérant le 26 février 2009 concernant les règles d'hygiène à respecter pour l'usage de son propre vestiaire n'excédait pas, contrairement à ce que soutient l'intéressé, l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ; que, dans ces conditions, M. A... ne peut être regardé comme rapportant, à l'égard de chacun des griefs ainsi adressés à la commune d'Antony, un commencement de preuve suffisant, de nature à permettre de faire présumer l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral ; qu'enfin, à défaut d'autres faits avérés, ne saurait, à lui-seul, constituer de tels agissements l'abaissement injustifié de la notation de M. A...au titre de l'année 2008, laquelle a, pour ce motif, été annulée dans les conditions rappelées au point 5 ; qu'il en résulte que les conclusions indemnitaires présentées par le requérant, sur le fondement d'une méconnaissance fautive des dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, doivent être rejetées ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; qu'en conséquence, ne peuvent qu'être également rejetées les conclusions présentées par l'intéressé devant la Cour de céans tendant au versement d'intérêts légaux et capitalisés, ainsi que, en tout état de cause, ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 mai 2013 par laquelle sa réclamation indemnitaire préalable a été rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Antony, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, le versement à M. A...d'une somme en remboursement des frais que celui-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

12. Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Antony en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Antony sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 15VE01729


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE01729
Date de la décision : 22/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: M. Eric TOUTAIN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : BOUKHELOUA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-06-22;15ve01729 ?
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