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09/05/2017 | FRANCE | N°15VE03455

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 mai 2017, 15VE03455


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1401568 du 18 septembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur d'un dégrèvement accordé par décision du 28 août 2014 et a rejet

le surplus de la demande de M. et Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1401568 du 18 septembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur d'un dégrèvement accordé par décision du 28 août 2014 et a rejeté le surplus de la demande de M. et Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 novembre 2015 et le 3 novembre 2016, M. et Mme A..., représentés par Me Desmoineaux, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2° de leur accorder la décharge des impositions restant en litige ainsi que des pénalités correspondantes ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme A... soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'ils n'étaient pas en mesure de répondre aux demandes d'éclaircissements et de justifications, leurs relevés bancaires ayant été saisis dans le cadre d'une procédure pénale et l'administration, qui en avait copie, ne leur ayant pas communiqué ces relevés ;

- la procédure est irrégulière car elle n'a pas été contradictoire, les deux entretiens organisés au cours du contrôle n'ayant permis aucune discussion ;

- l'administration a méconnu la règle du double ; comme les comptes des requérants étaient des comptes mixtes, l'application de cette règle impliquait de comparer les crédits avec les recettes commerciales et les revenus salariaux ;

- la taxation en revenus d'origine indéterminée est irrégulière car l'administration n'a pas établi que les sommes portées au crédit de leurs comptes avaient une source autre que commerciale ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen relatif à la qualification des revenus alors qu'il existait des indices de ce qu'ils disposaient d'autres sources de revenus que l'activité commerciale de la société ;

- il convient de déduire des revenus d'origine indéterminée la quote-part des bénéfices industriels et commerciaux de la société de fait Le Gavroche pour 18 010 euros ; 3 263,48 euros proviennent d'un virement depuis un compte d'épargne à l'occasion de sa clôture ;

- le défaut de communication des relevés du compte d'épargne 1647030940450 entraîne l'irrégularité de la procédure pour 2003 ;

- le caractère délibéré du manquement n'est pas établi ;

- le tribunal n'a pas motivé sa décision sur le moyen tiré du caractère infondé des pénalités pour manquement délibéré.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Skzryerbak,

- et les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 avril 2017, présentée par M. et MmeA....

1. Considérant qu'à la suite d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, M. et Mme A...ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2002 et 2003 ainsi que des pénalités ; qu'ils relèvent appel du jugement en date du 18 septembre 2015 en tant que, par celui-ci, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande de décharge des impositions et pénalités restées en litige après un dégrèvement intervenu en cours d'instance ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une décision du 13 avril 2017, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé un dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A...ont été assujettis au titre de l'année 2003, pour un montant total de 1 723 euros en droits et 963 euros en pénalités ; que les conclusions de la requête de M. et Mme A...sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que si le tribunal n'a pas expressément statué sur le moyen tiré de ce que l'administration n'établissait pas que M. et Mme A...avaient une source de revenus autre que l'activité commerciale de la société de fait " Le Gavroche ", ce moyen était sans incidence sur la régularité de la demande de justifications qui pouvait être justifiée par le seul constat d'une discordance entre les crédits bancaires et les revenus déclarés ; que, par suite, M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité à raison de cette omission ;

4. Considérant en revanche que le tribunal n'a pas statué sur le moyen tiré du caractère infondé des pénalités pour manquement délibéré ; qu'il y a lieu d'annuler son jugement en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré ;

5. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. " ; que si l'administration est tenue, avant d'adresser une demande de justifications à un contribuable, de lui restituer les documents qu'il avait remis au vérificateur, aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige, pour les documents obtenus auprès des tiers, qu'une copie soit transmise au contribuable avant l'envoi d'une demande de justifications ; que, par suite, M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que la procédure de taxation d'office serait entachée d'irrégularité au motif que l'administration ne leur aurait pas spontanément transmis les relevés bancaires qu'elle a obtenus dans le cadre de son droit de communication ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, telles qu'éclairées par la jurisprudence, que l'administration, lorsqu'elle entend comparer les crédits figurant sur les comptes bancaires ou les comptes courants d'un contribuable au montant brut de ses revenus déclarés en vue d'établir l'existence d'indices de revenus dissimulés, n'est en droit d'user de cette procédure de demande de justifications à l'égard de ce contribuable qu'à la condition que les sommes ainsi portées au crédit de ses comptes équivalent au moins au double de ses revenus connus ; que lorsque les comptes examinés par l'administration retracent à la fois des mouvements de fonds liés à l'activité professionnelle du contribuable et des opérations étrangères à cette activité, les revenus auxquels les crédits recensés sont comparés doivent inclure les montants bruts des recettes professionnelles du contribuable ;

8. Considérant que l'administration a constaté que les sommes portées au crédit des comptes personnels de M. et Mme A...excédaient le double de leurs revenus déclarés ; que si les requérants font valoir que ces comptes sont employés pour les besoins de l'activité de la société de fait Le Gavroche, dont M. A...est l'associé à hauteur de 49 %, cette circonstance, à la supposer établie, n'impose pas d'inclure les recettes de cette société dans les revenus auxquels les crédits recensés sont comparés ; qu'en effet, les revenus à prendre en compte pour la comparaison doivent être ceux du contribuable et, parmi eux, ceux qu'il a déclarés ; que, par suite, M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que l'administration ne pouvait leur adresser une demande de justifications sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales au motif que les crédits recensés sur leurs comptes seraient inférieurs au double de la somme de leurs revenus et des recettes de la société de fait Le Gavroche ;

9. Considérant que l'administration ayant établi que les sommes portées au crédit des comptes de M. et Mme A...équivalaient au moins au double de leurs revenus connus, elle était en droit de leur adresser une demande de justifications et, en l'absence de réponse permettant d'établir l'origine des sommes inexpliquées, de les taxer d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; que l'administration n'était pas tenue d'établir au préalable que les sommes inexpliquées avait une autre origine que l'activité commerciale de la société de fait Le Gavroche ;

10. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " ; que, dans sa version remise aux contribuables avec l'avis de vérification qui leur a été adressé, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié prévoyait les dispositions suivantes : " Dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, le dialogue joue également un rôle très important tout au long de la procédure. Il vous permet de présenter vos explications sur les discordances relevées par le vérificateur à partir des informations dont il dispose " ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions que le vérificateur était tenu, avant d'avoir recours à la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, d'engager avec le contribuable un dialogue sur les discordances relevées par lui ;

11. Considérant que M. et Mme A...ne peut utilement soutenir que la procédure d'imposition des revenus d'origine indéterminée est irrégulière au motif que le vérificateur n'a pas engagé avec eux un dialogue sur les rectifications qu'il envisageait de proposer avant de les leur notifier dès lors que ces revenus ont été taxés d'office ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; que si M. et Mme A... soutiennent que l'administration ne leur a pas communiqué, malgré leur demande, copie des relevés d'un de leur compte d'épargne pour l'année 2003, les seules sommes figurant au crédit de ce compte et imposées comme des revenus d'origine indéterminée ont fait l'objet du dégrèvement mentionné au point 2 ; que, par suite, l'administration ne s'est pas fondée sur ces relevés pour établir les impositions en litige et le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

13. Considérant que si M. et Mme A...soutiennent que plusieurs crédits qualifiés par l'administration de revenus d'origine indéterminée correspondent à des recettes de nature professionnelle et que la somme de 18 010 euros correspond à la quote-part de bénéfices industriels et commerciaux perçus par M. A...de la société de fait Le Gavroche, ils ne l'établissent pas ; que l'administration a, par suite, pu à bon droit qualifier ces sommes de revenus d'origine indéterminée ;

Sur les pénalités :

14. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : /a. 40 % en cas de manquement délibéré ; " et qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. " ;

15. Considérant que, pour appliquer les pénalités pour manquement délibéré en litige, l'administration s'est notamment fondée sur l'importance de la discordance entre les sommes créditées sur les comptes des requérants et leurs revenus déclarés et le caractère systématique et régulier de la perception de sommes non déclarées ; que l'administration établit ainsi l'intention de M. et Mme A...d'éluder l'impôt ; que, par suite, les pénalités pour manquement délibéré ont été appliquées à bon droit ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme dont M. et Mme A...demandent le versement au titre des frais qu'ils ont exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer à hauteur du dégrèvement intervenu en cours d'instance.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03455
Date de la décision : 09/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Arnaud SKZRYERBAK
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : CABINET VEYSSADE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-05-09;15ve03455 ?
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