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20/04/2017 | FRANCE | N°16VE01782

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 20 avril 2017, 16VE01782


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) LES LABORATOIRES A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ses exercices clos en 2009, 2010 et 2011 pour un montant de 716 978 euros en droits et pénalités, ainsi que la restitution des sommes qu'elle a acquittées à ce titre, majorées des intérêts de retard.

Par un j

ugement n° 1411165 du 14 avril 2016, le Tribunal Administratif de Montreuil a rejeté sa de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) LES LABORATOIRES A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ses exercices clos en 2009, 2010 et 2011 pour un montant de 716 978 euros en droits et pénalités, ainsi que la restitution des sommes qu'elle a acquittées à ce titre, majorées des intérêts de retard.

Par un jugement n° 1411165 du 14 avril 2016, le Tribunal Administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 14 juin 2016 et le 15 mars 2017, la SAS LES LABORATOIRESA..., représentée par Me Balas, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de lui accorder la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ses exercices clos en 2009, 2010 et 2011 ainsi que la restitution des sommes acquittées à ce titre, majorées des intérêts de retard ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 16 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SAS LES LABORATOIRES A...soutient que :

- la procédure dont elle a fait l'objet est irrégulière faute pour l'administration d'avoir mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit ;

- le service a méconnu les règles prévues par le livre des procédures fiscales afin de garantir au contribuable le respect des règles en matière de débat contradictoire ; l'administration l'a, en agissant ainsi, privé des " garanties substantielles devant être respectées en cas de vérification de comptabilité " ;

- aucun dialogue, ni aucun débat contradictoire n'a pu s'établir lors de l'interlocution départementale ;

- l'administration qui supporte la charge de la preuve, n'apporte aucun élément permettant d'établir l'absence d'effectivité du travail de Mme B...A... ; elle apporte pour sa part la preuve de l'enregistrement comptable des charges concernées, de l'existence d'un contrat de travail et de plusieurs avenants ainsi que de la nature des missions réalisées au regard du contexte particulier et de la contrepartie en résultant pour la société ;

- le service n'apporte aucun élément justifiant d'une quelconque intention délibérée de sa part de rémunérer Mme A...pour un emploi n'ayant aucune contrepartie effective ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Campoy,

- les conclusions de Mme Belle, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., pour la SAS LES LABORATOIRESA....

Une note en délibéré présentée pour la SAS LES LABORATOIRES A...a été enregistrée le 27 mars 2017.

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SAS LES LABORATOIRES A...qui exerce une activité de fabrication et distribution de produits pharmaceutiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur ses exercices clos le 30 septembre des années 2009, 2010 et 2011 ; qu'à la suite de ce contrôle, l'administration fiscale a remis en cause la déduction de son résultat imposable des dépenses afférentes aux rémunérations versées à Mme B...A...dont elle a estimé qu'elles ne correspondaient à aucun travail effectif de la part de cette dernière ; que les rehaussements d'impôt sur les sociétés correspondants ont été assortis de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts ; que la SAS LES LABORATOIRES A...fait appel du jugement du 14 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés qui résultent, au titre de ses exercices clos en 2009, 2010 et 2011, de ce chef de rectification ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. (...) " ; que ces dispositions ne sont pas applicables, alors même qu'une des conditions permettant à l'administration d'y recourir serait remplie, lorsque le redressement est justifié par l'existence d'un acte anormal de gestion ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale s'est fondée pour asseoir les rectifications sur la circonstance que les dépenses afférentes aux rémunérations versées par la société requérante à Mme B...A...ne correspondaient à aucun travail effectif ; qu'à supposer même que l'administration puisse être regardée comme ayant implicitement fondé les redressements en litige sur le caractère fictif du contrat de travail de MmeA..., elle pouvait régulièrement se borner à invoquer devant le juge de l'impôt l'acte anormal de gestion consistant pour cette société à prendre en charge ces dépenses en l'absence de contrepartie à ce contrat de travail ; que, dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée des garanties procédurales s'attachant à la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de ce que le service aurait " méconnu les règles prévues par le livre des procédures fiscales afin de garantir au contribuable le respect des règles en matière de débat contradictoire " et de ce que l'administration aurait privé la société des " garanties substantielles devant être respectées en cas de vérification de comptabilité " ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " ; que le paragraphe 5 du chapitre III de cette charte indique que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...) Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur " ; que ces dispositions assurent au contribuable la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, puis, le cas échéant, dans un second temps, avec un fonctionnaire de l'administration fiscale de rang plus élevé ; que ces garanties doivent pouvoir être exercées par le contribuable dans des conditions ne conduisant pas à ce qu'elles soient privées d'effectivité ;

6. Considérant qu'il est constant que la SAS LES LABORATOIRES A...a été reçue par l'interlocuteur départemental le 29 octobre 2013 ; que la requérante n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que les représentants de l'administration se seraient soustraits à toute discussion lors de cette entrevue ; que, par suite, le moyen tiré de ce que " aucun dialogue, ni aucun débat contradictoire " n'aurait pu s'établir lors de ladite entrevue doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu du I de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre (...). Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif (...). Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais (...). " ; que, quelle qu'ait été la procédure suivie à l'encontre du contribuable, il appartient à celui-ci de justifier que les rémunérations qu'il déduit de son bénéfice imposable correspondent à un travail effectif ;

8. Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la SAS LES LABORATOIRES A...les salaires versés à Mme B...A...au motif qu'il n'était pas établi que cette dernière exerçait effectivement des fonctions au sein de la société ; qu'à l'exception d'avenants conclus en 2002 et en 2005 à un contrat de travail que la société requérante ne produit pas, et d'un ancien certificat de travail établi par la société anonyme Société nouvelle de prospective et méthodes pour la période 1974-78 ainsi que d'une lettre d'embauche du 23 octobre 1978 par la SARL France Union, qui ne permettent pas d'établir la réalité d'un travail effectué au profit de l'entreprise au cours des années 2009 à 2011, la société requérante ne produit aucun document établissant la réalité des fonctions exercées par

Mme A...durant cette période ; que si la SAS LES LABORATOIRES A...soutient que Mme A...a exercé ses fonctions en conseillant les dirigeants du groupe dans le domaine des ressources humaines et plus spécialement sur un certain nombre d'accords conclus entre 2007 et 2010, elle ne conteste pas qu'aucun des documents relatifs à ces projets produits au service durant la vérification, ne font apparaître le nom, la signature ou une quelconque implication de Mme A...dans ces travaux ; que l'obligation de discrétion qu'invoque la société requérante ne la dispense pas d'établir, comme elle en a la charge, le caractère effectif de l'emploi de MmeA... ; qu'ainsi, la société requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les éléments de rémunération qui ont été versés à Mme A...au cours de ses exercices 2009, 2010 et 2011 correspondaient à un travail effectif de la part de cette dernière ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à en demander la déduction pour la détermination des bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés dont elle était redevable ;

Sur les pénalités :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;

10. Considérant qu'à l'effet d'établir que la déduction, en tant que charges, des différents éléments de rémunération de Mme A...par la SAS LES LABORATOIRES A...résulte d'une volonté délibérée de cette société d'éluder l'impôt, l'administration fait valoir que la requérante qui n'a jamais justifié du caractère effectif de l'activité de MmeA..., ne peut raisonnablement prétendre avoir employé cette personne pendant plus de cinq ans en tant que conseiller de son dirigeant sans avoir conservé de contrat de travail, ni être en mesure de fournir le moindre document justifiant de ses travaux ; qu'elle établit de la sorte qu'en déduisant de ses résultats imposables l'ensemble des charges liées à la rémunération de MmeA..., la SAS LES LABORATOIRES A...ne pouvait ignorer qu'elle soustrayait à tort les sommes correspondantes de l'assiette de l'impôt sur les sociétés ; que, dans ces conditions, la SAS LES LABORATOIRES A...n'est pas fondée à contester la majoration de 40 % pour manquement délibéré dont a été assorti le rappel d'impôt sur les sociétés résultant du refus de déduction en tant que charges des différents éléments de rémunération versés à Mme A...en 2009, 2010 et 2011 ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS LES LABORATOIRES A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS LES LABORATOIRES A...est rejetée.

2

N° 16VE01782


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01782
Date de la décision : 20/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Abus de droit et fraude à la loi.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Charges diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Luc CAMPOY
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : SCP LACOURTE RAQUIN TATAR

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-04-20;16ve01782 ?
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