Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La COMPAGNIE AXA FRANCE IARD, assureur de la commune du Vésinet et agissant en tant que subrogée dans les droits de cette dernière, a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la Sarl " Les Fils de MmeA... " à lui verser la somme de 983 183,29 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date des quittances subrogatives, en réparation du préjudice résultant de l'incendie qui a endommagé l'église Sainte-Marguerite.
Par un jugement n° 1107162 du 6 octobre 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 5 novembre 2015 et le 15 juillet 2016, la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD, représentée par la Selarl C...associés, avocats, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de condamner la Sarl " Les Fils de MmeA... " à lui verser la somme de 983 183,29 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date des quittances subrogatives ;
3° de mettre à la charge de la Sarl " Les Fils de MmeA... " le versement de la somme de 15 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la juridiction administrative n'était pas compétente pour connaître de son action ; en effet, si la commune est liée à la Sarl " Les Fils de Mme A... " par une convention signée le 18 décembre 2003 portant sur l'exploitation des halles et marchés communaux et si l'article 9 de cette convention prévoit qu'elle doit mettre à la disposition de cette société un local de remisage de son matériel, les conséquences dommageables de l'incendie qui s'est déclaré dans l'enclos de remisage ne peuvent se rattacher à l'exécution de cette convention ; ainsi, son action n'était pas fondée sur ce contrat, mais formée en qualité de tiers par rapport à cette convention qui n'a pas pour objet l'église Sainte-Marguerite dont elle est, par ailleurs, propriétaire ; en outre, le juge administratif est compétent pour interpréter les clauses de cette convention, notamment ses articles 9 et 25 ;
- la responsabilité sans faute de la Sarl " Les Fils de Mme A... " en sa qualité de gardien d'un ouvrage public doit être engagée ; en effet, cette société ayant, en application de l'article 9 de la convention, la garde du local de remisage mis à sa disposition, elle est responsable des dommages imputables à son fonctionnement et, par suite, seule responsable des conséquences dommageables de l'incendie ayant pris naissance dans ce local attenant à l'église Sainte-Geneviève ;
- il existe un lien de causalité entre l'ouvrage public en cause et les dommages causés à l'église Sainte-Marguerite ;
- aucune faute n'est imputable à la commune ;
- la Sarl " Les Fils de Mme A... ", qui n'a pas pris les précautions nécessaires pour éviter la survenance du litige, ne peut s'exonérer de sa responsabilité en alléguant qu'aucun des équipements stockés dans l'enclos ne pouvait constituer une source d'énergie, l'inventaire effectué par le régisseur des droits communaux n'ayant aucune valeur probante ;
- si l'expert de l'assureur de la Sarl " Les Fils de Mme A... " a émis une réserve sur l'origine de l'incendie qui est indéterminée, en indiquant que l'incendie pourrait être d'origine criminelle, cette hypothèse ne peut être considérée comme un cas de force majeure ;
- par une délibération du 17 novembre 2011, la commune a accepté l'indemnité globale de 983 183,23 euros ; en outre, elle a perçu une indemnité immédiate de 859 815,41 euros.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des assurances ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- l'article 136 du décret du 17 mai 1809 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm,
- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., pour la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD, et MeB..., pour la Sarl " Les Fils de MmeA... ".
1. Considérant que la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD, assureur de la commune du Vésinet et agissant en tant que subrogée dans les droits de cette dernière, relève appel du jugement du 6 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, sa demande tendant à la condamnation de la Sarl " Les Fils de MmeA... " à lui verser la somme de 983 183,29 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date des quittances subrogatives, en réparation du préjudice résultant de l'incendie qui a gravement endommagé l'église Sainte-Marguerite ;
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une convention du 18 décembre 2003 intitulée " traité d'exploitation des marchés communaux d'approvisionnement et autres occupations commerciales du domaine public ", la commune du Vésinet a confié à la Sarl " Les Fils de MmeA... " l'exploitation des marchés communaux et, notamment, la perception des droits de place et la location aux commerçants du matériel nécessaire pour la vente de leurs produits sur ces marchés ; qu'en raison des travaux entrepris, courant 2009, sur la halle couverte accueillant habituellement l'un des marchés, la commune du Vésinet a déplacé ce dernier sur un parking situé à proximité de l'église Sainte-Marguerite et, en application de l'article 9 de la convention, a mis à la disposition de la Sarl " Les Fils de MmeA... ", à titre temporaire, un local de remisage attenant à cette église pour stocker le matériel nécessaire à son activité ; que, dans la nuit du 26 juillet 2009, un incendie s'est déclaré dans cet enclos et a occasionné d'importants dégâts à l'église Sainte-Marguerite ;
3. Considérant, d'une part, que la commune du Vésinet étant liée à la Sarl " Les Fils de MmeA... " par un contrat en vertu duquel elle a mis à la disposition de cette société le local de remisage à l'origine du dommage dont son assureur, agissant en tant que subrogé dans ses droits, demande réparation et la responsabilité contractuelle ayant un caractère exclusif, la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD, si elle est en droit de rechercher la responsabilité contractuelle de la société qui s'est vue confier l'exploitation de ce local, ne peut utilement, en revanche, invoquer la responsabilité quasi-délictuelle de cette dernière, en sa qualité de gardienne de l'ouvrage en cause, sur le fondement des dommages de travaux publics, quand bien même le local de remisage mis à sa disposition aurait le caractère d'un ouvrage public ;
4. Considérant, d'autre part, que s'il est de principe, selon l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, que les litiges relatifs aux contrats comportant occupation du domaine public passés par les collectivités publiques relèvent de la compétence des juridictions administratives, l'article 136 du décret du 17 mai 1809, relatif aux octrois municipaux et applicable aux droits de place perçus dans les halles et marchés, attribue spécialement compétence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur toutes les contestations qui pourraient s'élever entre les communes et les fermiers de ces taxes indirectes, sauf renvoi préjudiciel à la juridiction administrative sur le sens et la légalité des clauses contestées des baux ;
5. Considérant qu'il suit de là que l'action de la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD, agissant en tant que subrogée dans les droits de la commune du Vésinet et qui, ainsi qu'il vient d'être dit, ne peut exercer, en raison du préjudice dont elle demande réparation, d'autre action que celle procédant du contrat conclu le 18 décembre 2003 entre la commune et son fermier, la Sarl " Les Fils de MmeA... ", relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Sarl " Les Fils de MmeA... ", qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD le versement à la Sarl " Les Fils de Mme A... " de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMPAGNIE AXA FRANCE IARD est rejetée.
Article 2 : La COMPAGNIE AXA FRANCE IARD versera à la Sarl " Les Fils de Mme A... " la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la Sarl " Les Fils de MmeA... " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
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N° 15VE03453