Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...et Mme D...A...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a mis en demeure les occupants du site appartenant à la société PPI Saint-Ouen l'Aumône Finance, sis 16, rue de l'Equerre à Saint-Ouen l'Aumône, de quitter les lieux dans un délai de quarante-huit heures et décidé qu'à défaut, il serait procédé à l'évacuation forcée des résidences mobiles, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1610253 du 2 novembre 2016, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée 7 novembre 2016, M. C...et MmeA..., représentés par Me Ivaldi, avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que la demande de première instance ne pouvait être regardée comme tardive ; en effet, si l'arrêté attaqué porte la mention d'une notification à M. C...le 28 octobre 2016 à 16h30 ainsi que sa signature, l'intéressé ne sait ni lire ni écrire ; en outre, cet arrêté ne précise pas que le délai de recours contentieux était en l'espèce de quarante-huit heures, ni ne mentionne la voie de recours, et ne fait pas référence à l'article R. 779-2 du code de justice administrative ; enfin, la notification de l'arrêté attaqué aux intéressés un vendredi à 16h30 les a privés du droit à un recours effectif, en méconnaissance de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que les risques d'atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques ne sont pas établis, compte tenu des installations sanitaires dont les caravanes sont équipées, de la gestion des eaux usées et des ordures par les gens du voyage et de l'isolement des fils électriques ; en outre, ni le débranchement du matériel de détection incendie ou la détérioration des lances à incendie, ni la coupure ou la détérioration de plusieurs canalisations d'eau ou l'arrachage du grillage et la destruction de la végétation du site ne leur sont imputables ; par ailleurs, les locaux commerciaux de la société PPI Saint-Ouen l'Aumône Finance sont laissés à l'abandon depuis plusieurs années ; enfin, les gens du voyage n'ont pas d'autre solution de relogement en raison notamment de la saturation des aires d'accueil du Val-d'Oise.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm,
- et les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public.
1. Considérant que M. C...et Mme A...relèvent appel du jugement du 2 novembre 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté, comme étant tardive et, par suite, irrecevable, leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2016 du préfet du Val-d'Oise mettant en demeure les occupants du site appartenant à la société PPI Saint-Ouen l'Aumône Finance, sis 16, rue de l'Equerre à Saint-Ouen l'Aumône, de quitter les lieux dans un délai de quarante-huit heures et ordonnant qu'à défaut, il serait procédé à l'évacuation forcée des résidences mobiles ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Considérant qu'aux termes du II bis de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 susvisée : " Les personnes destinataires de la décision de mise en demeure prévue au II, ainsi que le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain peuvent, dans le délai fixé par celle-ci, demander son annulation au tribunal administratif. Le recours suspend l'exécution de la décision du préfet à leur égard. Le président du tribunal ou son délégué statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine. " ; qu'en vertu de l'article R. 779-1 du code de justice administrative, les requêtes dirigées contre les décisions de mise en demeure de quitter les lieux mentionnées à ce II bis " sont présentées, instruites et jugées selon les dispositions du présent code applicables aux requêtes en annulation, sous réserve des dispositions du présent chapitre " ; qu'aux termes de l'article R. 779-2 du même code : " Les requêtes sont présentées dans le délai d'exécution fixé par la décision de mise en demeure. Le délai de recours n'est pas prorogé par l'exercice d'un recours administratif préalable. / Lorsqu'elle est adressée par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1, son auteur signale son urgence en sélectionnant le type de procédure dans la rubrique correspondante. " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ;
3. Considérant que, pour rejeter comme irrecevable la demande présentée par M. C... et MmeA..., le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a estimé que l'arrêté en litige a été régulièrement notifié à M. C..., " représentant l'ensemble des membres de la communauté de gens du voyage visés par ledit arrêté ", le 28 octobre 2016 à 16h30 et que la demande des intéressés tendant à l'annulation de cet arrêté, qui n'a été enregistrée par voie électronique au greffe du tribunal que le 31 octobre 2016 à 14h32, soit après l'expiration du délai de recours contentieux de quarante-huit heures imparti en l'espèce, était tardive ; que, cependant, l'arrêté attaqué, qui a été notifié à M.C..., se borne à mentionner que cet acte " peut faire l'objet d'un recours à compter de sa notification devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, conformément aux dispositions de l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 susvisée ", sans préciser le délai de recours de quarante-huit heures imparti en l'espèce ; qu'ainsi, la notification faite à M. C... ne peut être regardée comme ayant fait courir le délai de recours contentieux ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté ait été notifié à MmeA... ; que, par suite, la demande de M. C...et de Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux n'était pas tardive ; qu'il en résulte que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge a rejeté leur demande comme irrecevable et, dès lors, à demander l'annulation de ce jugement ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... et Mme A...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
5. Considérant qu'aux termes du I de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 susvisée : " Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles. " ; qu'aux termes du I de l'article 9 de la même loi : " I. - Dès lors qu'une commune remplit les obligations qui lui incombent en application de l'article 2, son maire ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées à l'article 1er (...). " ; qu'aux termes du II du même article : " En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. / La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. / La mise en demeure est assortie d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. Elle est notifiée aux occupants et publiée sous forme d'affichage en mairie et sur les lieux. Le cas échéant, elle est notifiée au propriétaire ou titulaire du droit d'usage du terrain. / Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux n'a pas été suivie d'effets dans le délai fixé et n'a pas fait l'objet d'un recours dans les conditions fixées au II bis, le préfet peut procéder à l'évacuation forcée des résidences mobiles, sauf opposition du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain dans le délai fixé pour l'exécution de la mise en demeure (...). " ;
6. Considérant que M. C...et Mme A...soutiennent que, contrairement à ce qu'a estimé l'autorité préfectorale, il n'est pas établi que le stationnement des caravanes de gens du voyage sur le site appartenant à la société PPI Saint-Ouen l'Aumône Finance et comprenant un parc de stationnement et six bâtiments à vocation commerciale, serait de nature à porter atteinte à la salubrité et à la sécurité publiques ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'un constat dressé par un huissier le 3 octobre 2016 et du rapport de police du 26 octobre 2016, et il n'est pas sérieusement contesté que le terrain sur lequel ont été installées, à compter du 2 octobre 2016, près de deux cent caravanes, était dépourvu d'installations sanitaires ou assurant la vidange des sanitaires chimiques équipant les résidences mobiles ou de raccordements au réseau d'assainissement permettant l'évacuation des eaux usées et n'était pas desservi par le service de ramassage des ordures ménagères, seule une benne installée à l'entrée du parc de stationnement ayant été utilisée pour le dépôt des ordures ménagères ; qu'en outre, les occupants du terrain ont eux-mêmes procédé à des branchements sur des canalisations d'eau ainsi que sur le réseau électrique de l'un des bâtiments jouxtant le parc de stationnement alors que, par ailleurs, le matériel de détection incendie du bâtiment a été débranché et les lances à incendie détériorées, rendant le système d'alarme inactif ; qu'enfin, les quelques photographies produites par les requérants ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par l'autorité préfectorale sur la situation prévalant sur le terrain ainsi occupé ; que, dans ces conditions, en estimant qu'eu égard au nombre des résidences mobiles concernées, leur stationnement prolongé pendant près d'un mois sur ce terrain était de nature à porter atteinte à la salubrité et la sécurité publiques, le préfet du Val-d'Oise a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, mettre en demeure les occupants de quitter les lieux ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...et Mme A...ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2016 ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1610253 du 2 novembre 2016 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C...et Mme A...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et leurs conclusions d'appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 16VE03210