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29/12/2016 | FRANCE | N°15VE00411

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 29 décembre 2016, 15VE00411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les décisions du 24 janvier 2007 et du 2 août 2010 par lesquelles l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et la décision

du 30 juillet 2010 par laquelle l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris l'a placée en disponibilité d'office pour raisons de santé.

Par un jugement n° 1007589 du 2 décembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a fait dro

it à ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les décisions du 24 janvier 2007 et du 2 août 2010 par lesquelles l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et la décision

du 30 juillet 2010 par laquelle l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris l'a placée en disponibilité d'office pour raisons de santé.

Par un jugement n° 1007589 du 2 décembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a fait droit à ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 février 2015, l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS (APHP), représentée par la Selarl Minier Maugendre et Associés, société d'avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a fait droit aux conclusions à fin d'annulation de Mme C...et de rejeter ces conclusions ;

2° de mettre à la charge de Mme C... le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS soutient que :

- les conclusions de première instance dirigées contre la décision du 24 janvier 2007 étaient irrecevables, celle-ci étant définitive à la date de l'introduction de la requête devant le tribunal ;

- les conclusions de première instance dirigées contre la décision du 3 août 2010 étaient irrecevables dès lors que celle-ci était confirmative des décisions du 22 décembre 2004 et

du 24 janvier 2007 ;

- l'autorité de la chose jugée par le Tribunal administratif de Versailles, qui a écarté l'imputabilité au service de la maladie de Mme C...par jugement définitif du 21 mai 2004, fait obstacle aux conclusions à fin d'annulation de l'intéressée ;

- les symptômes développés par Mme C...ne peuvent être considérés comme imputables au service dès lors que les connaissances scientifiques actuelles ne permettent pas d'établir un lien de causalité entre la vaccination et la combinaison de symptômes appelée " myofasciite à macrophages " et que le rapport médical du 27 mai 2002 établissant un lien entre la vaccination subie et l'apparition de ces symptômes est obsolète compte tenu de l'évolution des connaissances scientifiques en la matière.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guibé,

- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS et de Me A...pour Mme D...C....

1. Considérant que MmeC..., aide-soignante titulaire à l'hôpital Joffre Dupuyrten relevant de l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS, a reçu plusieurs injections de vaccin contenant un adjuvant aluminique entre 1992 et 1999, et notamment un rappel de vaccin contre l'hépatite A le 21 janvier 1998 et un rappel de vaccin contre l'hépatite B le 26 avril 1999 ; qu'elle déclare avoir ressenti à partir du mois de janvier 1998 des douleurs musculaires et articulaires généralisées ainsi qu'une fatigue chronique, aggravées après l'injection pratiquée en avril 1999 ; que l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS a, dans un premier temps, reconnu l'imputabilité au service de l'affection de MmeC... ; que, toutefois, à la suite d'un nouvel avis de la commission de réforme,

l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS a suspendu la prise en charge des arrêts de travail de l'intéressée au titre d'un accident de service à compter du 12 mars 2004 et l'a placée en position de congé de longue maladie ; que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté le recours contentieux exercé contre cette décision par un jugement du 23 mars 2006 ; que, par une décision du 24 janvier 2007, l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS a rejeté la demande de Mme C...tendant à ce que son affection soit reconnue comme une maladie imputable au service ; qu'à l'épuisement de ses droits à congé de maladie, l'intéressée a été placée en disponibilité d'office par arrêté du 30 juillet 2010 ; que, le 2 août 2010,

Mme C...a de nouveau sollicité la prise en charge de ses arrêts de travail au titre de l'accident de service ; que cette demande a été rejetée par décision du 3 août 2010 ;

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " (...) Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ;

3. Considérant, en premier lieu, que l'absence de preuve de la notification de la décision du 24 janvier 2007 fait obstacle à ce que le délai de recours de deux mois prévu par l'article R. 421-1 du code de justice administrative soit opposé à MmeC... ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la lettre du 3 août 2010 par laquelle

l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS a rejeté la demande de l'intéressée tendant à ce que son affection soit reconnue comme un accident imputable au service mentionnait l'existence de la décision du 24 janvier 2007 ; que le recours dont MmeC... a saisi le Tribunal administratif de Versailles le 19 novembre 2010 a été exercé dans un délai raisonnable à compter de la date à laquelle il est établi qu'elle a eu connaissance de cette décision ; que, dès lors, l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS n'est pas fondée à soutenir que les conclusions de première instance tendant à l'annulation de la décision

du 24 janvier 2007 étaient tardives ;

4. Considérant, en second lieu, que, par une décision du 24 décembre 2004, l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS a décidé que la période d'arrêt de travail de Mme C...comprise entre le 12 mars et le 28 avril 2004 ne serait pas prise en charge au titre de l'accident de service mais au titre de la maladie ordinaire, en se référant aux réserves émises par le service de médecine administrative et de contrôle le 12 mars 2004 ; que la demande émise par Mme C...le 2 août 2010 tendait à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie et non à la prise en charge de la période d'arrêt de travail visée par la précédente décision et n'avait donc pas le même objet ; que, dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS à l'encontre des conclusions à fin d'annulation de la décision du 3 août 2010, au motif que celle-ci serait confirmative de la décision du 24 décembre 2004, ne peut qu'être écartée ; que l'ASSISTANCE PUBLIQUE -HÔPITAUX DE PARIS n'est pas davantage fondée à soutenir que ces conclusions étaient irrecevables au motif que la décision du 3 août 2010 était confirmative de sa précédente décision du 24 janvier 2007, laquelle n'était, ainsi qu'il vient d'être dit, pas devenue définitive à la date à laquelle Mme C...a saisi le Tribunal administratif de Versailles ;

Sur la légalité des décisions du 24 janvier 2007, du 31 juillet 2010 et du 2 août 2010 :

5. Considérant que le Tribunal administratif de Versailles a, par un jugement définitif du 21 mai 2004, rejeté la demande de Mme C...tendant à l'annulation de la décision du

22 décembre 2004 par laquelle l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS a refusé la prise en charge d'un arrêt de travail du 12 mars au 28 avril 2004 au titre de la législation relative aux accidents de service ; que les demandes de Mme C...présentées le 9 juillet 2006 et le 2 août 2010 tendaient à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie aux fins d'obtenir la prise en charge de ses arrêts de travail pour des périodes postérieures à 2004 ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que les nouvelles demandes de Mme C...auraient le même objet que celle qu'elle a présentée en 2004 ; que, par ailleurs, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la première demande de Mme C...au motif qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que l'état actuel des connaissances médicales permettait d'estimer que l'association entre la myofasciite à macrophages et l'administration de vaccins contenant un adjuvant aluminique n'était pas établie ; que l'évolution des connaissances médicales sur ce point postérieurement au jugement pouvait fonder une nouvelle demande de MmeC..., sans que l'administration ne puisse y opposer l'autorité de la chose jugée ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 :

" Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) " ;

7. Considérant que, dans le dernier état des connaissances scientifiques, l'existence d'un lien de causalité entre une vaccination contenant un adjuvant aluminique et la combinaison de symptômes constitués notamment par une fatigue chronique, des douleurs articulaires et musculaires et des troubles cognitifs n'est pas exclue et revêt une probabilité suffisante pour que ce lien puisse, sous certaines conditions, être regardé comme établi ; que tel est le cas, lorsque la personne vaccinée, présentant des lésions musculaires de myofasciite à macrophages à l'emplacement des injections, est atteinte de tels symptômes, soit que ces symptômes sont apparus postérieurement à la vaccination, dans un délai normal pour ce type d'affection, soit, si certains de ces symptômes préexistaient, qu'ils se sont aggravés à un rythme et avec une ampleur qui n'étaient pas prévisibles au vu de l'état de santé antérieur à la vaccination, et qu'il ne ressort pas des expertises versées au dossier que les symptômes pourraient résulter d'une autre cause que la vaccination ;

8. Considérant qu'une biopsie musculaire pratiquée le 13 août 2011 a permis de mettre en évidence une lésion musculaire caractéristique de la myofasciite à macrophages à l'emplacement des injections reçues par Mme C...; que, par ailleurs, la fatigue chronique et les douleurs articulaires dont elle souffre sont apparues dans un délai normal postérieurement à la vaccination reçue le 21 janvier 1998 et ont subi une aggravation postérieurement à l'injection reçue le 26 avril 1999 ; que si l'APHP soutient que les lésions de myofasciite à macrophages et les symptômes cliniques décrits par Mme C...pourraient résulter d'une autre cause que la vaccination, elle n'apporte aucun élément précis au soutien de cette argumentation ; qu'il ne ressort notamment d'aucune des pièces du dossier que Mme C...aurait présenté des atteintes antérieurement à sa vaccination ; que, dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, le lien de causalité entre les vaccinations subies par Mme C...dans le cadre de l'obligation vaccinale liée à son activité professionnelle et les symptômes dont elle souffre doit être regardé comme établi ; que, par suite, la maladie dont souffre la requérante doit être regardée comme imputable au service ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a fait droit aux conclusions de Mme C...tendant à l'annulation des décisions du 24 janvier 2007 et du 3 août 2010 par lesquelles elle a rejeté la demande de Mme C...tendant à ce que son affection soit reconnue comme imputable au service et de l'arrêté du 30 juillet 2010 par laquelle elle a placé l'intéressée en disponibilité d'office ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant qu'eu égard aux motifs d'annulation des décisions attaquées ci-dessus retenus, l'exécution du présent arrêt implique que l'administration réexamine la situation de Mme C...dans un délai de deux mois à compter de sa notification en faisant application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 et en faisant bénéficier l'intéressée d'un congé de maladie à plein traitement à compter de la date d'effet de la première décision du 24 janvier 2007 ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de MmeC..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que

l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS une somme de 1 500 euros à verser à MmeC... sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint à l'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS de réexaminer la situation de Mme C...en faisant application des dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 et en la faisant bénéficier d'un congé de maladie à plein traitement à compter de la date d'effet de la décision du 24 janvier 2007, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS versera à Mme C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme C...est rejeté.

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N° 15VE00411


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00411
Date de la décision : 29/12/2016
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Céline GUIBÉ
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : MINIER MAUGENDRE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-12-29;15ve00411 ?
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