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20/12/2016 | FRANCE | N°15VE00095

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 20 décembre 2016, 15VE00095


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 1er septembre 2003 par laquelle LA POSTE SA l'a radié des cadres, d'enjoindre à LA POSTE SA de le réintégrer et de régulariser sa situation administrative et de condamner LA POSTE SA à l'indemniser des préjudices subis à raison de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1203397 du 10 novembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a fait droit à ses demandes à fin d'annulation et a rejeté

ses conclusions à fin d'indemnité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 1er septembre 2003 par laquelle LA POSTE SA l'a radié des cadres, d'enjoindre à LA POSTE SA de le réintégrer et de régulariser sa situation administrative et de condamner LA POSTE SA à l'indemniser des préjudices subis à raison de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1203397 du 10 novembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a fait droit à ses demandes à fin d'annulation et a rejeté ses conclusions à fin d'indemnité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 12 janvier 2015, le 28 janvier 2016 et le 2 août 2016, LA POSTE SA, représentée par la SCP Granrut Avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3° de mettre à la charge de M. B...le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu à l'argumentation soulevée en défense selon laquelle l'inertie de M. B...révélait son intention de rompre le lien avec le service, qu'ils ne se sont pas fondés sur des éléments contemporains à la décision attaquée et qu'ils n'ont pas expliqué en quoi l'agent était privé de discernement à l'époque des faits ;

- le recours de première instance était irrecevable, d'une part parce que M. B..., ne pouvait introduire un recours sans l'assistance de son curateur et, d'autre part, parce qu'il était tardif ;

- l'action de M. B...est prescrite en application des articles 464 et 510-1 du code civil, l'annulation de la décision du 1er septembre 2003 ne pouvait intervenir à la suite d'un recours introduit en 2012 sans méconnaître le principe de sécurité juridique ;

- la décision du 1er septembre 2003 n'est entachée d'aucune erreur de droit ou d'appréciation dans la mesure où l'inertie de M. B...révélait sa volonté de rompre tout lien avec le service et dès lors que le placement sous curatelle ne permet pas, à elle seule, de faire présumer que les troubles dont il souffrait étaient de nature à lui ôter toute capacité de discernement et que l'absence de discernement à la date de la décision en litige n'est pas démontrée, les faits invoqués par le requérant étant antérieurs ou postérieurs à la décision en litige ;

- les conclusions à fin d'appel incident de M. B...sont irrecevables, dès lors qu'elles soulèvent un litige distinct de l'appel principal.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guibé

- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour LA POSTE SA.

1. Considérant que M. A...B..., entré à LA POSTE SA en 2000 en qualité de manutentionnaire, a été titularisé sur un poste de facteur par décision du 23 août 2001 ; que l'intéressé, qui souffre de troubles psychiatriques, a été placé en congé de longue maladie du 22 avril 2002 au 1er janvier 2003 ; que, par lettre du 7 décembre 2002, il a démissionné de son emploi puis, par lettre du 19 février 2003, a repris sa démission ; que, par courrier du 12 mars 2003 auquel M. B...n'a pas répondu, LA POSTE SA lui a demandé de transmettre une demande de réintégration ou de prolongation de son congé de longue maladie ; que, par décision du 1er septembre, le directeur de La Poste des Yvelines, ayant relevé qu'il ne s'était pas présenté à son travail sans justification ni autorisation préalable alors qu'il avait été mis en demeure de reprendre immédiatement ses fonctions par courriers des 6 et 19 août 2003, l'a radié des cadres pour abandon de poste à compter du 18 août 2003 ; que, par un jugement du 10 novembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a fait droit à la demande de M. B...tendant à l'annulation de cette décision et a rejeté ses conclusions à fin d'indemnité ;

Sur les conclusions à fin d'appel incident :

2. Considérant que les conclusions incidentes par lesquelles M. B...demande l'annulation du jugement du tribunal en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires soulèvent un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel principal présenté par LA POSTE SA, relatif à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 1er septembre 2003 ; que, par suite, ces conclusions, qui ont été enregistrées après l'expiration du délai d'appel, ne sont pas recevables ;

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation présentées en première instance :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ;

4. Considérant toutefois que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu'en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable ; qu'en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance ;

5. Considérant que la règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de limiter dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs ; qu'il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance ;

6. Considérant que M. B...a communiqué au tribunal la décision du directeur de La Poste des Yvelines du 1er septembre 2003 portant radiation des cadres en indiquant l'avoir retrouvée dans ses archives ; que si cette décision comportait la mention des voies et délais de recours conformément aux dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, la date de sa notification n'est pas établie en l'absence de communication de l'accusé de réception ; qu'il ressort toutefois des écritures de première instance de M. B...et de l'attestation qui lui a été remise le 12 septembre 2006 par la responsable du Centre interdépartemental de gestion administrative et de paie de La Poste que l'intéressé a eu connaissance de la décision en litige au plus tard le 12 septembre 2006 ; que, par ailleurs, M. B...ne se prévaut d'aucune circonstance particulière justifiant le délai qui s'est écoulé avant l'introduction de son recours contentieux le 22 mai 2012 ; que, dans ces conditions, le recours dont il a saisi le Tribunal administratif de Versailles, plus de cinq ans après avoir eu connaissance de la décision contestée, excédait le délai raisonnable durant lequel il pouvait être exercé ; que sa demande doit, en conséquence, être rejetée comme tardive ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que LA POSTE SA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 10 novembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a annulé sa décision du 1er septembre 2003 et lui a enjoint de réintégrer l'intéressé et de procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à pension ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de LA POSTE SA, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme que LA POSTE SA demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1 à 3 du jugement attaqué du Tribunal administratif de Versailles sont annulés.

Article 2 : Les demandes présentées par M. B...devant le Tribunal administratif de Versailles à fin d'annulation et d'injonction ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de LA POSTE SA est rejeté.

2

N° 15VE00396095


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00095
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-04 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Abandon de poste.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Céline GUIBÉ
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : SCP GRANRUT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-12-20;15ve00095 ?
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