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29/09/2016 | FRANCE | N°15VE03682

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 29 septembre 2016, 15VE03682


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...épouse A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 7 avril 2015 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler le document de circulation pour étranger mineur délivré au profit du jeune E...et la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'autre part, d'enjoindre au préfet de délivrer un tel document de circulation au profit de cet enfant dans le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir.

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r un jugement n° 1506427 du 12 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...épouse A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 7 avril 2015 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler le document de circulation pour étranger mineur délivré au profit du jeune E...et la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'autre part, d'enjoindre au préfet de délivrer un tel document de circulation au profit de cet enfant dans le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1506427 du 12 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2015, MmeA..., représentée par Me Le Gloan, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un document de circulation pour étranger mineur au profit du jeune E...dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- eu égard aux termes de la décision attaquée du 7 avril 2015, le préfet n'a pas procédé à un examen de la situation personnelle du jeune E...au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les parents de cet enfant ne sont pas en mesure, en raison de leur activité professionnelle, de se rendre en France ou dans un autre pays européen alors qu'ils sont, par ailleurs, soumis à l'obligation de visa ; en outre, les liens entre l'enfant et ses parents ont été maintenus pendant cinq ans grâce aux voyages que l'enfant a pu effectuer au Gabon, où ses parents résident, muni de son document de circulation qui lui a permis de faciliter son retour sur le territoire français ; enfin, ce document lui permet de poursuivre une scolarité normale en France et de participer aux activités extrascolaires ; ainsi, les décisions attaquées ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., substituant Me Le Gloan, pour MmeA....

1. Considérant que, par un jugement du 14 janvier 2010 du juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Bobigny, MmeA..., ressortissante chinoise titulaire d'une carte de résident, s'est vue déléguer l'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant Jialiang Jiang, ressortissant chinois né le 7 février 2003 à Libreville, au Gabon où ses parents résident, et qui est entré en France le 1er octobre 2008 ; qu'un document de circulation pour étranger mineur, prévu par l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été délivré au profit du jeuneE..., document valable du 17 mars 2010 au 16 mars 2015 ; que, par une décision du 7 avril 2015, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de Mme A...tendant au renouvellement de ce document de circulation ; que le silence gardé par le préfet sur le recours gracieux de l'intéressée formé contre ce refus de renouvellement, reçu par les services de la préfecture le 17 avril 2015, a fait naître une décision implicite de rejet ; que Mme A... relève appel du jugement du 12 novembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des conventions internationales, les étrangers mineurs de dix-huit ans dont au moins l'un des parents appartient aux catégories mentionnées à l'article L. 313-11, au 1° de l'article L. 314-9, aux 8° et 9° de l'article L. 314-11, à l'article L. 315-1 ou qui relèvent, en dehors de la condition de majorité, des prévisions des 2° et 2° bis de l'article L. 313-11, ainsi que les mineurs entrés en France pour y suivre des études sous couvert d'un visa de séjour d'une durée supérieure à trois mois reçoivent, sur leur demande, un document de circulation qui est délivré dans des conditions fixées par voie réglementaire. " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un document de circulation au bénéfice d'un étranger mineur qui n'appartient pas à l'une des catégories mentionnées par l'article L. 321-4 précité, de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'un refus de délivrance d'un tel document ne méconnaît pas les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990, aux termes desquelles : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; que, d'autre part, l'intérêt supérieur d'un étranger mineur qui ne remplit pas les conditions légales pour bénéficier du document de circulation prévu par l'article L. 321-4 précité s'apprécie au regard de son intérêt à se rendre hors de France et à pouvoir y retourner sans être soumis à l'obligation de présenter un visa ;

4. Considérant qu'il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'ayant produit en première instance et en appel aucune observation, que l'autorité préfectorale, saisie de la demande de renouvellement du document de circulation pour étranger mineur délivré, en 2010, au profit du jeuneE..., ait procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de cet enfant au regard des exigences découlant des stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'en particulier, pour justifier le rejet de cette demande de renouvellement, la décision attaquée du 7 avril 2015 se borne à indiquer que " seul l'enfant qui réside habituellement avec au moins un de ses deux parents légitimes sous couvert d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " peut bénéficier d'un document de circulation ", sans faire état de la situation particulière de l'enfant Jialiang Jiang qui ne relève d'aucune des catégories de mineurs de dix-huit ans pour lesquels l'article L. 321-4 précité prévoit la délivrance d'un document de circulation et dont l'intérêt supérieur devait cependant être apprécié au regard de son intérêt éventuel à se rendre hors de France et à pouvoir y retourner sans être soumis à l'obligation de présenter un visa ; que, dans ces conditions, Mme A...est fondée à soutenir, pour la première fois en appel, qu'en l'absence d'un tel examen particulier des circonstances de l'espèce, le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché les décisions attaquées d'une erreur de droit ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par la requérante, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 2015, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

7. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation retenu au point 4, le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre un document de circulation pour étranger mineur au profit du jeuneE... ; que, dès lors, les conclusions de Mme A...tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet de procéder à une telle délivrance doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande présentée par Mme A...tendant au renouvellement de ce document de circulation dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1506427 du Tribunal administratif de Montreuil en date du 12 novembre 2015, la décision du 7 avril 2015 du préfet de la Seine-Saint-Denis rejetant la demande de Mme A...tendant au renouvellement du document de circulation pour étranger mineur délivré au profit de l'enfant Jialiang Jiang et la décision implicite rejetant son recours gracieux sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande de Mme A... tendant au renouvellement du document de circulation pour étranger mineur délivré au profit de l'enfant Jialiang Jiang dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...est rejeté.

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N° 15VE03682


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03682
Date de la décision : 29/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005 Étrangers. Entrée en France.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : LE GLOAN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-09-29;15ve03682 ?
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