Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...F..., ressortissante bangladaise, a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2015 par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite.
Par un jugement n° 1506391, en date du 23 novembre 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté, a enjoint au PREFET DU VAL-D'OISE de réexaminer la demande de Mme F... dans un délai de deux mois, et a mis à la charge de l'Etat, au profit de MeB..., conseil de MmeF..., la somme de 750 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 décembre 2015, le PREFET DU VAL-D'OISE, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de rejeter la demande présentée par Mme F... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a retenu qu'il n'avait pas produit la preuve de la notification à Mme F...de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ;
- la vie privée et familiale de Mme F... en France ne présente pas les conditions d'ancienneté et de stabilité requises pour que lui soit accordé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".
......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Agier-Cabanes a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme D...F..., entrée en France le 12 septembre 2013, a sollicité un titre de séjour au titre de l'asile ; que par un arrêté du 13 janvier 2015, le PREFET DU VAL-D'OISE le lui a refusé et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que par un jugement n° 1506391 du 23 novembre 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, annulé cet arrêté et d'autre part, enjoint au préfet, dans un délai de deux mois, de réexaminer la situation de l'intéressée et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ; que le PREFET DU VAL-D'OISE fait appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile " et qu'aux termes de l'article R. 733-32 dudit code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R-213-3 " ;
3. Considérant que pour rejeter la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par Mme F...le 22 novembre 2013, le PREFET DU VAL-D'OISE s'est fondé sur les décisions de rejet rendues successivement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 8 avril 2014, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 22 octobre 2014 ; que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a retenu que le PREFET DU VAL-D'OISE n'apportait pas la preuve que la décision de la Cour nationale du droit d'asile, en date du 22 octobre 2014, avait bien été régulièrement notifiée à Mme F... ; que par suite, en l'absence d'une telle notification, Mme F... bénéficiait du droit de séjourner sur le territoire national jusqu'à ce que ladite décision lui soit régulièrement notifiée et que c'était donc à tort que le PREFET DU VAL-D'OISE, avait considéré que Mme F... se maintenait irrégulièrement sur le territoire français ;
4. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que parmi les pièces justificatives annexées au mémoire en défense du PREFET DU VAL-D'OISE se trouve l'accusé de réception de la lettre recommandée envoyée à Mme F... par la Cour nationale du droit d'asile ; signée de la main de Mme F... ; que par suite, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la décision de la Cour nationale du droit d'asile lui a bien été notifiée ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé pour ce motif son arrêté du 13 janvier 2015 ;
6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme F...devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
7. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué à été signé par Mme C... E..., chef de bureau de l'intégration et des naturalisations de la préfecture du Val d'Oise, en vertu d'une délégation qui lui a été consentie notamment à cette fin par un arrêté du préfet en date du 26 novembre 2014, régulièrement publié le lendemain au Recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département ; que par suite, le moyen tiré de ce que ladite décision serait entachée d'incompétence manque en fait ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ;
9. Considérant que Mme D...F..., ressortissante bangladaise, est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 12 septembre 2013, à l'âge de 35 ans, avec son époux, M. A...F...et leurs deux enfants alors âgés de sept et huit ans, depuis lors scolarisés en France à l'école primaire ; que Mme F..., son mari et leurs enfants ont suivi des cours de français depuis leur arrivée en France ; qu'il ressort néanmoins des pièces du dossier que l'époux de Mme F... est également en situation irrégulière en France et a fait, lui aussi, l'objet d'un arrêté du préfet du Val d'Oise portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire ; que Mme F..., sans emploi et sans revenu, arrivée en France depuis peu de temps et à l'âge de 35 ans, n'établit pas être dépourvue de tout lien familial dans son pays d'origine et ne fait état d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que son mari et ses enfants l'accompagnent dans son pays d'origine où la cellule familiale peut se reconstituer ; que, dans ces conditions et compte tenu de la brièveté de son séjour en France, le préfet du Val d'Oise, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressée ;
10. Considérant dans le cas où le préfet énonce, parmi les motifs de la décision portant refus de séjour, que l'intéressé ne remplit " aucune des autres conditions du code pour pouvoir être admis au séjour à un autre titre ", il doit être réputé avoir examiné si le demandeur était susceptible de recevoir l'un des titres de séjour dont la loi dispose qu'ils sont attribués de plein droit ; qu'en l'espèce, le PREFET DU VAL-D'OISE a notamment motivé sa décision en indiquant que l'intéressée n'entrait " dans aucun cadre d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile " ; qu'ainsi il est réputé avoir examiné toutes les dispositions dudit code permettant éventuellement à Mme F... d'obtenir un titre de séjour de plein droit ; que par suite Mme F... ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le bénéfice n'est pas de plein droit ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant que l'arrêté mentionné au point 7. confère également délégation à Mme C...E...à fin de signer les décisions portant obligation de quitter le territoire français ; que par suite, le moyen tiré de ce que la mesure litigieuse serait entachée d'incompétence manque en fait ;
12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ;
13. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que l'obligation de quitter le territoire français qui assortit la décision de refus de titre de séjour n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte ; qu'en l'espèce la décision de refus de titre de séjour opposée à Mme F... énonce les motifs de droit et de fait qui l'ont fondée ; qu'elle s'appuie notamment sur les décisions concordantes de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle vise par ailleurs explicitement l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les dispositions des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de Mme F... doit donc être écarté ;
14. Considérant, ainsi qu'il a été dit, que Mme F... n'établit pas que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui a été opposée est illégale ; que, dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'est pas fondée et doit être écartée ;
15. Considérant, que, pour les motifs exposés aux points 9. et 10. le moyen tiré de ce que ladite mesure d'éloignement serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme F..., au soutien duquel l'intéressée n'invoque d'ailleurs aucun argument distinct de ceux énoncés à l'encontre de la décision portant refus de séjour, doit être écarté ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de Mme F... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée ; que les dispositions de l'article
L. 761-1 du code justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante de la présente instance, soit condamné à verser à Mme F... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1506391 en date du 23 novembre 2015 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme D...F...devant le tribunal administratif de Cergy Pontoise est rejetée.
''
''
''
''
N° 15VE03919 3