Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention du 21 juillet 1959 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune ainsi qu'en matière de contribution des patentes et de contributions foncières ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique:
- le rapport de M. Huon,
- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.
1. Considérant, que, par réclamation du 7 août 2013, la société IKB Deutsche Industrie Bank, qui est une banque allemande disposant d'un établissement stable en France, a sollicité la restitution de la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés prévue par l'article
235 ter ZAA du CGI acquittée par elle en 2012 au titre de cet établissement, pour un montant de 168 586 euros, au motif que n'était pas rempli le critère d'assujettissement à cette contribution dès lors que ce critère devait s'apprécier au niveau de son seul établissement stable français et non au niveau mondial ; qu'à la suite du rejet de cette réclamation, la société a réitéré ses prétentions devant le juge de l'impôt ; que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS relève appel du jugement du 15 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a entièrement fait droit à sa demande ;
Sur les conclusions du ministre :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par une décision en date du
20 mai 2015, antérieure au jugement attaqué, mais produite pour la première fois en appel et dont les premiers juges n'ont pas eu connaissance, l'administration a notamment accordé à la société IKB Deutsche Industrie Bank le dégrèvement d'une somme de 34 328 euros correspondant à une fraction de l'imposition litigieuse ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a décidé de décharger la requérante de cette somme, d'évoquer les conclusions de la demande devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " I. Les redevables de l'impôt sur les sociétés réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'euros sont assujettis à une contribution exceptionnelle égale à une fraction de cet impôt calculé sur leurs résultats imposables, aux taux mentionnés à l'article 219, des exercices clos à compter du
31 décembre 2011 et jusqu'au 30 décembre 2013. / Cette contribution est égale à 5 % de l'impôt sur les sociétés dû, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature. / (...) Le chiffre d'affaires mentionné au premier alinéa du présent
I s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de retenir le seul chiffre d'affaires qui se rattache aux bénéfices soumis en France à l'impôt sur les sociétés conformément à l'article 209 du code général des impôts aux termes duquel : " (...) les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France (...) ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (...) " ;
4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 : " (...) 2° Sont considérés comme impôts visés par la présente convention : 1. En ce qui concerne la République française : (...) c. L'impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 de la même convention : " 1° Pour l'application de la présente convention : (...) 7. Le terme " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité (...) " ; qu'enfin, selon l'article 4 de la même convention : " 1. Les bénéfices d'une entreprise de l'un des Etats contractants ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'effectue des opérations commerciales dans l'autre Etat par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise effectue de telles opérations commerciales, l'impôt peut être perçu sur les bénéfices de l'entreprise dans l'autre Etat, mais uniquement dans la mesure où ces bénéfices peuvent être attribués audit établissement stable. Cette fraction des bénéfices n'est pas imposable dans le premier mentionné des Etats contractants (...) " ; qu'il résulte des stipulations précitées de la convention fiscale franco-allemande que les bénéfices réalisés par une société allemande qui dispose en France d'une installation fixe d'affaires présentant les caractéristiques d'un établissement stable ne sont imposables en France que dans la mesure où ils peuvent être attribués à cet établissement stable ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour assujettir la société
IKB Deutsche Industrie Bank à la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2012, l'administration a tenu compte, non pas seulement du chiffre d'affaires de la société réalisé en France au travers de son établissement stable, inférieur au seuil de
250 millions prévu par l'article 235 ter ZAA du code général des impôts mais également de son chiffre d'affaires mondial, qui excédait ce seuil ; que, ce faisant, ainsi que l'a estimé à juste titre le tribunal administratif, l'administration a commis une erreur de droit ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS n'est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il a accordé à la société IKB Deutsche Industrie Bank la décharge de la somme de 34 328 euros ;
Sur les conclusions de la société IKB Deutsche Industrie Bank tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le paiement à la société IKB Deutsche Industrie Bank d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les dépens :
9. Considérant que la présente instance n'a donné lieu à aucun dépens ; qu'ainsi, les conclusions présentées à ce titre par la société IKB Deutsche Industrie Bank ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil en date du 15 juin 2015 est annulé en tant qu'il a accordé à la société IKB Deutsche Industrie Bank la décharge de la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés qu'elle a acquittée au titre de l'année 2002 à hauteur de 34 328 euros.
Article 2 : A concurrence de la somme de 34 328 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande présentée au Tribunal administratif de Montreuil par la société
IKB Deutsche Industrie Bank.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est rejeté.
Article 4 : L'État versera à la société IKB Deutsche Industrie Bank une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par la société IKB Deutsche Industrie Bank est rejeté.
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N° 15VE02356