Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2007, ainsi que le rétablissement de son déficit déclaré au titre de l'exercice clos en 2006. Par un jugement n° 1209266 du 17 mars 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 14 mai 2014 et
14 novembre 2014, la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT, représentée par Me Legenre, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2007, ainsi que le rétablissement de son déficit déclaré au titre de l'exercice clos en 2006 ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT soutient que le service n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe, qu'en s'abstenant de prélever une marge sur la refacturation, aux autres sociétés du groupe implantées en France ou à l'étranger, des prestations qu'elle a fait réaliser, pour leur compte, par des sous-traitants extérieurs au groupe, elle aurait consenti à ces sociétés un avantage susceptible d'être qualifié, en l'absence de contrepartie, d'acte anormal de gestion ou de transfert indirect de bénéfices à l'étranger, alors que la refacturation à prix coûtant de ces prestations de services correspond à leur valeur réelle au prix du marché et que sa rémunération d'intermédiaire est, en tout état de cause, déjà incluse dans la marge de 8 % qu'elle facture, par ailleurs, aux intéressées sur les coûts internes.
........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Toutain,
- et les conclusions de M. Delage, rapporteur public.
1. Considérant que la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT, qui est la filiale de la société néerlandaise Nextiraone Europe Holdings BV, exerce, au profit des autres filiales de celle-ci implantées en France ou à l'étranger, une activité de prestations de services en matière commerciale, logistique, financière, comptable et juridique ; que la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 ; qu'à l'occasion de ce contrôle, l'administration a notamment constaté que l'intéressée, contrairement aux termes des contrats de services qu'elle avait conclus avec lesdites filiales, s'était abstenue de facturer la marge de 8 %, telle qu'y ayant été stipulée, sur les prestations de services qu'elle avait fait réaliser, pour leur compte, par des sous-traitants extérieurs au groupe Nextiraone ; qu'estimant que ces refacturations à prix coûtant traduisaient, de la part de la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT, une renonciation à recettes dépourvue de contrepartie et constitutive d'un acte anormal de gestion ou, à l'égard des filiales établies hors de France, d'un transfert indirect de bénéfices à l'étranger, le service, suivant la procédure contradictoire, en a réintégré le montant aux bénéfices déclarés par l'intéressée au titre des exercices clos en 2005 et 2007 et a résorbé, à due proportion, le déficit déclaré au titre de l'exercice clos en 2006 ; que, par jugement n° 1209266 du 17 mars 2014, dont la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT relève appel, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à obtenir, d'une part, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été consécutivement assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2007 et, d'autre part, la réparation de l'erreur qu'aurait commise l'administration en minorant son déficit déclaré au titre de l'exercice clos en 2006 du montant de la rectification précédemment décrite ;
Sur les conclusions principales :
En ce qui concerne les transferts de bénéfices à l'étranger :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France. / (...) A défaut d'éléments précis pour opérer les rectifications prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle constate que les prix facturés par une entreprise établie en France à une entreprise étrangère qui lui est liée sont inférieurs à ceux pratiqués, soit par cette entreprise avec d'autres clients dépourvus de liens de dépendance avec elle, soit par des entreprises similaires exploitées normalement avec des clients dépourvus de liens de dépendance, sans que cet écart s'explique par la situation différente de ces clients, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'un avantage qu'elle est en droit de réintégrer dans les résultats de l'entreprise établie en France, sauf pour celle-ci à justifier que cet avantage a eu pour elle des contreparties au moins équivalentes ; qu'à défaut d'avoir procédé à de telles comparaisons, l'administration n'est, en revanche, pas fondée à invoquer la présomption de transferts de bénéfices ainsi instituée mais doit, pour démontrer qu'une entreprise a consenti une libéralité en facturant des prestations à un prix insuffisant, établir l'existence d'un écart injustifié entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé ou du service rendu ;
3. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que, pour estimer qu'en leur refacturant à prix coutant les prestations de services qu'elle avait sous-traitées à des fournisseurs extérieurs au groupe, la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT a consenti un avantage à ses sociétés soeurs établies à l'étranger, l'administration s'est exclusivement fondée sur l'examen des contrats de services liant les intéressées, lesquels stipulaient que la rémunération de la requérante, en contrepartie des prestations de services réalisées, serait égale au total des coûts internes et externes engagés à cet effet, dont ceux de sous-traitance, majoré d'un taux de marge de 8 % ; que, ce faisant, elle n'a pas procédé à une comparaison des prix ainsi refacturés avec ceux pratiqués, soit par cette entreprise avec d'autres clients dépourvus de liens de dépendance avec elle, soit par des entreprises similaires exploitées normalement avec des clients dépourvus de liens de dépendance ; qu'à défaut d'avoir procédé à de telles comparaisons, l'administration ne peut bénéficier de la présomption de transferts de bénéfices découlant de l'application des dispositions précitées de l'article 57 du code général des impôts ;
4. Considérant, d'autre part, que l'administration n'établit pas l'existence d'un quelconque écart entre ces refacturations à prix coûtant et la valeur vénale réelle des prestations de services concernées, alors que, de son côté, la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT fait valoir, sans être contredite, que les fournisseurs auxquels elle avait sous-traité leur réalisation, extérieurs au groupe Nextiraone, les lui avaient eux-mêmes facturées au prix du marché ; que, dans ces conditions, il ne peut être démontré qu'en refacturant sans marge les prestations en question à ses sociétés soeurs établies hors de France, la requérante aurait retenu un prix insuffisant de nature à révéler l'existence d'une libéralité consentie au profit de ces dernières et d'un transfert indirect de bénéfices à l'étranger, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article 57 du code général des impôts ;
En ce qui concerne les actes anormaux de gestion :
5. Considérant qu'en vertu des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice net passible de l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par une société, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale ;
6. Considérant que, pour les mêmes motifs de fait que ceux déjà exposés au point 4, l'administration n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe à raison de la procédure d'imposition suivie, qu'en refacturant sans marge à ses sociétés soeurs établies en France les prestations de services qu'elle avait sous-traitées à des fournisseurs extérieurs au groupe, la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT aurait consenti un avantage aux intéressées ; que la requérante est, dès lors, fondée à soutenir que ces refacturations à prix coûtant ne peuvent être qualifiées d'actes anormaux de gestion ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; qu'en conséquence, l'intéressée est fondée à obtenir, d'une part, la décharge des suppléments de droits procédant des rectifications contestées, d'un montant total, en base, de 180 062 euros au titre de l'exercice clos en 2005 et de
41 488 euros au titre de l'exercice clos en 2007, ainsi que la décharge des pénalités y afférentes, et, d'autre part, la majoration de son déficit rectifié, au titre de l'exercice clos en 2006, de 125 120 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT d'une somme de 5 000 euros en remboursement des frais que celle-ci a exposés à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Les résultats imposables de la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT sont respectivement réduits de 180 062 euros au titre de l'exercice clos en 2005 et de 41 488 euros au titre de l'exercice clos en 2007.
Article 2 : Il est accordé à la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2007 pour la part formant surtaxe à raison de la réduction de base prononcée à l'article 1er.
Article 3 : Le déficit de la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT, tel que rectifié par l'administration, au titre de l'exercice clos en 2006, est majoré de 125 120 euros.
Article 4 : L'Etat versera à la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la SAS NEXTIRAONE MANAGEMENT est rejeté.
Article 6 : Le jugement rendu par le Tribunal administratif de Montreuil le 17 mars 2014 sous le n° 1209266 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
''
''
''
''
3
N° 14VE01440