La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2016 | FRANCE | N°16VE00531

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 07 juin 2016, 16VE00531


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 1er septembre 2015 par lequel le préfet des

Hauts-de-Seine a refusé de lui renouveler une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1508349 du 19 janvier 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure

devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2016, M.A..., représenté par Me Gondard, avocat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 1er septembre 2015 par lequel le préfet des

Hauts-de-Seine a refusé de lui renouveler une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1508349 du 19 janvier 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2016, M.A..., représenté par Me Gondard, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- dès lors que le préfet des Hauts-de-Seine n'ignorait pas qu'il justifiait d'une présence habituelle en France de plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, il aurait dû, avant de prendre sa décision de refus, réunir, pour avis, la commission du titre de séjour dans les conditions prévues à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet aurait également dû étudier sa demande de renouvellement sur le fondement de ce dernier article et, ainsi, étudier la possibilité de l'admettre au séjour à titre exceptionnel ;

- en tant qu'il porte refus d'admission au séjour, l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; contrairement à ce que soutient le tribunal, il a contesté la décision de rejet du préfet, lequel n'explique d'ailleurs pas en quoi son dossier transmis à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, présentait un caractère incomplet ; il a en outre fait l'objet d'une agression lors d'une livraison effectuée dans le cadre de son travail de chauffeur-livreur, si bien qu'en prolongation d'arrêt de travail, il ne peut faire l'objet d'un licenciement par application de l'article L. 1226-9 du code du travail ;

- il remplit les conditions pour être admis à titre exceptionnel au séjour en application de l'article L. 313-14 eu égard à sa durée de séjour en France depuis 1982 ; de plus, sept de ses cousins et cinq de ses cousines sont établis en France, ses parents sont décédés, son grand-père est mort pour la France, il est handicapé à hauteur de 12 % depuis 2008, et il justifie en outre travailler depuis de nombreuses années, et être inscrit au registre des métiers pour pratiquer la vente à domicile ;

- l'arrêté méconnait également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard sa durée de séjour et à sa parfaite intégration en France ;

- enfin, en tant qu'il porte obligation de reconduite à la frontière, il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est handicapé et en arrêt de travail, une reconduite à la frontière exécutée dans ces conditions étant en effet susceptible d'être assimilée à un traitement inhumain et dégradant.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Locatelli a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant malgache, né le

5 décembre 1955, relève appel du jugement du 19 janvier 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er septembre 2015, refusant de lui renouveler sa carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui déclare être entré en France en avril 1982, à l'âge de vingt-sept ans, et s'est notamment vu délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " valable du 5 septembre 2013 au 4 septembre 2014, justifie, compte tenu des pièces, nombreuses et diverses, qu'il produit, en particulier de l'attestation du général L., résider habituellement en France depuis cette date, soit depuis plus de trente-trois ans à la date de l'arrêté attaqué, ainsi d'ailleurs qu'en a déjà jugé le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise dans une précédente décision n° 1200482 du 19 mars 2013 ; qu'il résulte également des pièces du dossier qu'au cours de cette longue période, M. A... a travaillé dans divers domaines, notamment en qualité d'assistant vétérinaire et, en dernier lieu, de préparateur de chevaux de course qui ont été, pour lui, autant d'occasions de se perfectionner professionnellement et de s'intégrer à la société française ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, le préfet des Hauts-de-Seine a, dans les circonstances de l'espèce, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris ; que, par suite, cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

6. Considérant qu'eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Hauts-de-Seine délivre à M. A...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre audit préfet de délivrer ce titre de séjour à l'intéressé dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1508349 du 19 janvier 2016 du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise, ensemble l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er septembre 2015, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de délivrer à M.A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

''

''

''

''

N° 16VE00531 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00531
Date de la décision : 07/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BERGERET
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : GONDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-06-07;16ve00531 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award