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26/05/2016 | FRANCE | N°14VE00571

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 26 mai 2016, 14VE00571


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LABORATOIRES CLARINS a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des impositions supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 à hauteur, respectivement, de 45 051 euros pour 2005 et 48 473 euros pour 2006.

Par un jugement n° 1207284 du 16 décembre 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le

s 21 février 2014 et 20 avril 2016, la SAS LABORATOIRES CLARINS, représentée par Me A...et

M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LABORATOIRES CLARINS a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des impositions supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 à hauteur, respectivement, de 45 051 euros pour 2005 et 48 473 euros pour 2006.

Par un jugement n° 1207284 du 16 décembre 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 février 2014 et 20 avril 2016, la SAS LABORATOIRES CLARINS, représentée par Me A...et

Me Cormery, avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de la décharger des impositions supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 à hauteur, respectivement, de 45 051 euros pour 2005 et 48 473 euros pour 2006 ;

3° de mettre à la charge de l'État une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

La SAS LABORATOIRES CLARINS soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- il est insuffisamment motivé ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- l'élément représentatif du risque de change qu'elle a versé à son affactureur n'a pas la nature d'une charge financière mais d'une consommation de services en provenance de tiers et doit dès lors être déduit de la valeur ajoutée pour le calcul du plafonnement des cotisations de taxe professionnelle ; le calcul de la valeur ajoutée est déterminé par les règles comptables qu'elle a correctement appliquées en comptabilisant cet élément dans le compte 6225 " rémunérations d'affacturage ", qui est un compte de charges externes ; l'affactureur fournit une prestation globale rémunérée par la commission d'affacturage pour la gestion administrative et comptable du contrat, la commission de financement ou d'escompte pour le paiement immédiat de la créance non échue et la commission de bonne fin qui constitue une assurance crédit et garantit l'adhérent contre le risque d'insolvabilité du créditeur, les risques-pays et le risque de change ; si, d'un point de vue comptable, les gains et les pertes de change constatés ont bien un caractère financier, les frais engagés pour mettre en place une couverture du risque de change ne sont pas toujours considérés comme des charges financières ; tel est le cas des frais supportés et commissions payées dans le cadre de l'assurance-change Coface qui sont traités comme des primes d'assurance ; la prise en compte du réalisme fiscal par le juge n'entre en ligne de compte que lorsqu'il existe un choix entre deux écritures comptables ; or, en l'espèce, il n'existe qu'une écriture comptable possible, le compte 6225 " Rémunérations d'affacturage " ; l'intitulé de ce compte est au pluriel ce qui induit que plusieurs types de rémunérations peuvent y être enregistrés ; le plan comptable général ne prévoit aucune subdivision pour l'enregistrement d'une commission pour risque de change ; il n'est, par ailleurs, pas démontré que le plan comptable admet que la commission au titre de la garantie du risque de change puisse être enregistrée dans le compte " charges financières ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la valeur ajoutée n'est pas déterminée par les seules règles comptables, desquelles le juge peut s'écarter lorsque le réalisme fiscal le commande ; le risque de change, clairement identifié sur la facturation, doit être analysé comme couvrant un risque financier et par conséquent constituant une charge financière non déductible de la valeur ajoutée ; la comparaison avec l'assurance-change de la Coface n'est pas topique dès lors que le litige ne met aucunement en jeu cet organisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bruno-Salel ;

- et les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public.

- et les observations de Me Cormery, avocat, pour la société requérante.

1. Considérant que la société par actions simplifiée (SAS) LABORATOIRES CLARINS, qui a pour activité la fabrication et la distribution de parfums et de produits dérivés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 à l'issue de laquelle le service vérificateur a remis en cause la valeur ajoutée prise en compte pour le plafonnement des cotisations de taxe professionnelle au titre des années 2005 et 2006 au motif que la société avait, à tort, déduit de la valeur ajoutée la fraction de la commission versée à son affactureur au titre du risque de change ; que la SAS LABORATOIRES CLARINS demande l'annulation du jugement du 16 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 à hauteur, respectivement, de 45 051 euros pour 2005 et 48 473 euros pour 2006 ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. (...) II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les stocks à la fin de l'exercice ; / Et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice. / Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens, visés au a du 1° de l'article 1467, pris en location par un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de six mois ou des redevances afférentes à ces biens résultant d'une convention de location-gérance, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion (...) " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SAS LABORATOIRES CLARINS cède ses créances sur ses clients étrangers à la société Factofinance pour leur valeur nominale moyennant le paiement d'une commission d'affacturage qui comprend, selon l'article 11 des conditions générales et l'article 5 des conditions particulières, une commission couvrant le risque de change, une commission couvrant le risque pays, une commission d'affacturage et des intérêts ; que la fraction de la commission correspondant au risque de change, objet du présent litige, a été enregistrée par la société dans le compte 6225 " rémunérations d'affacturage " et déduite de la valeur ajoutée servant au calcul de la cotisation minimale de taxe professionnelle ; que cet élément, calculé forfaitairement, n'est pas corrélé à l'effectivité du risque ; qu'il permet à la société de disposer immédiatement de la trésorerie sans être exposée à un risque de change qui est assumé par la société d'affacturage ; que, par suite, il n'a pas la nature d'une charge financière mais d'une prestation de services rendue par la société d'affacturage qui relève des consommations de biens et services en provenance de tiers pouvant être soustraites de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, que la SAS LABORATOIRES CLARINS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens :

5. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, au titre, d'une part, des dépens de l'instance comprenant la contribution pour l'aide juridique acquittée par la SAS LABORATOIRES CLARINS et, d'autre part, des frais non compris dans les dépens exposés par celle-ci, une somme globale de 2 035 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1207289 du 16 décembre 2013 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La SAS LABORATOIRES CLARINS est déchargée des impositions supplémentaires de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 à hauteur, respectivement, de 45 051 euros pour 2005 et 48 473 euros pour 2006.

Article 3 : L'État versera une somme globale de 2 035 euros à la SAS LABORATOIRES CLARINS au titre des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande et de la requête d'appel sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS LABORATOIRES CLARINS et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Beaujard, président de chambre,

- M. Nicolet, président assesseur,

- Mme Bruno-Salel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 mai 2016.

Le rapporteur,

C. BRUNO-SALELLe président,

P. BEAUJARDLe greffier,

C. FAJARDIE

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier

5

2

N° 14VE00571


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00571
Date de la décision : 26/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : SELARL VILLEMOT BARTHES ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-05-26;14ve00571 ?
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