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24/05/2016 | FRANCE | N°15VE02452

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 mai 2016, 15VE02452


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B...ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006, à concurrence d'un montant global, en droits, intérêts de retard et majorations, de 436 857 euros.

Par un jugement n° 1308993 du 15 juin 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête et un mémoire, enregistrés les 24 juillet 2015 et 4 mai 2016,

M. et Mme B..., repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B...ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006, à concurrence d'un montant global, en droits, intérêts de retard et majorations, de 436 857 euros.

Par un jugement n° 1308993 du 15 juin 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 juillet 2015 et 4 mai 2016,

M. et Mme B..., représentés par Me Noyal, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les propositions de rectification ne sont pas suffisamment motivées en ce qui concerne les redressements relatifs aux contributions sociales, en violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, faute notamment de préciser les bases d'imposition à ces taxes ;

- s'agissant des rehaussements relatifs aux traitements et salaires, les remboursements de frais réels versés aux dirigeants salariés sont exonérés d'impôt sur le revenu ; en outre,

MmeB..., dont l'administration reconnaît qu'elle n'était pas la gérante de la société CCP en 2005 et 2006, ne saurait être imposable sur les remboursements de frais qu'elle a perçus à hauteur de 947,77 euros en 2005 et 52 837,92 euros en 2006 sur le fondement de l'article 80 ter du code général des impôts ;

- s'agissant des revenus distribués taxés sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 et du c de l'article 111 du code général des impôts à hauteur de 169 503,50 euros en 2005 et, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du même code à hauteur de 141 622,50 euros en 2006, il s'agit en partie de remboursements kilométriques ; par ailleurs, la somme de 120 000 euros versée par la société CCP le 10 février 2006, correspond à des dividendes qui n'ont été votés par l'assemblée des associés que le 27 juin 2007 et qui ne sauraient dès lors être imposables en 2006 ;

- s'agissant des revenus d'origine indéterminée d'un montant de 61 282,74 euros en 2005 et 84 446,37 euros en 2006, il s'agit de remboursements de frais kilométriques perçus par Monsieur B...et leur fils Utku ;

- ils doivent être déchargés du paiement des intérêts de retard par voie de conséquence des arguments précédemment formulés ;

- la majoration de 40% prévue à l'article 1729 du code général des impôts doit être déchargée car l'administration doit apporter la preuve de l'omission ou de l'insuffisance de déclaration ainsi que du caractère délibéré de cette omission, en se plaçant au moment de la déclaration ; par suite, l'administration ne saurait invoquer le défaut de collaboration du contribuable qui est postérieur à l'établissement de la déclaration.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Moulin-Zys,

- les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite de l'examen de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2004, 2005 et 2006, M. et Mme B...se sont vus proposer des rectifications, selon la procédure contradictoire, en matière notamment de traitements et salaires et de revenus de capitaux mobiliers, les revenus d'origine indéterminée étant quant à eux taxés d'office ; qu'ils ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis de ce chef, au titre des années 2005 et 2006, à concurrence d'un montant global, en droits, intérêts de retard et majorations de 10 et 40 %, de 436 857 euros mais que, par le jugement attaqué, en date du 15 juin 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande ; qu'ils relèvent régulièrement appel de ce jugement devant la Cour administrative d'appel de Versailles ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par le ministre ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. En cas d'application des dispositions de l'article L. 47 A, l'administration précise au contribuable la nature des traitements effectués " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 de ce même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations ;

3. Considérant que les requérants soutiennent que les propositions de rectification du 17 décembre 2008 et du 3 avril 2009 ne sont pas suffisamment motivées en ce qui concerne les redressements relatifs aux contributions sociales faute notamment de préciser l'assiette de ces contributions ; qu'il ressort, toutefois, de leur examen, qu'elles mentionnent, dans leur partie

" V - Cotisations et impôts complémentaires assis sur tout ou partie des revenus soumis à l'impôt sur le revenu ", distinctement pour chacune des années, la contribution sociale généralisée, la contribution pour le remboursement de la dette sociale, le prélèvement social et la contribution additionnelle au prélèvement social, les fondements légaux de ces impositions, ainsi que le fait qu'elles sont assises sur les revenus du patrimoine, les montants d'impôt correspondants étant, en base et en droits, mentionnés au titre des conséquences financières du contrôle ; qu'il suit de là qu'alors même que ces contributions constituent des impositions distinctes de l'impôt sur le revenu, le moyen sus-analysé doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

4. Considérant que selon l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " La charge de la preuve... incombe également au contribuable ... en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 " ;

5. Considérant que les impositions litigieuses au titre des années 2005 et 2006, ayant été établies selon la procédure contradictoire en ce qui concerne les traitements et salaires, les revenus de capitaux mobiliers et les revenus fonciers, la charge de la preuve incombe au fisc à l'exception des redressements tacitement ou explicitement acceptés ; qu'en revanche, s'agissant des revenus d'origine indéterminée taxés d'office en application des articles L. 16 et L 69 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve incombe aux contribuables en vertu du dernier alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;

S'agissant des traitements et salaires :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 80 ter du code général des impôts : " a. Les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais versés aux dirigeants de sociétés sont, quel que soit leur objet, soumis à l'impôt sur le revenu. (...) " ; qu'aux termes de l'article 81 du même code, dont l'administration demande l'application par substitution de base légale s'agissant de MmeB... : " Sont affranchis de l'impôt : / 1° Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet. (...) " ;

7. Considérant que si les requérants soutiennent que les sommes taxées dans la catégorie des traitements et salaires et qui sont en litige correspondraient à des remboursements de frais professionnels réellement exposés et exonérés en application de l'article 81 précité du code général des impôts, ils ne produisent aucune pièce à l'appui de cette affirmation alors qu'ils sont les seuls à pouvoir le faire ; qu'en outre, le libellé correspondant à ces sommes sur les bulletins de salaires ne saurait suffire à démontrer qu'il s'agit de remboursements de frais réellement supportés ; que la circonstance que l'administration fiscale n'a pas remis en cause la déduction de ces sommes comme charge lors de la vérification de comptabilité de la société ne saurait déterminer leur régime d'imposition entre les mains des bénéficiaires ; que si les requérants font encore valoir que Mme B...n'était pas dirigeante durant les années 2005 et 2006 au sens de l'article 80 ter, cette circonstance demeure sans incidence dès lors que le service a demandé, en première instance et par la voie d'une substitution de base légale, le maintien des impositions supplémentaires au motif que les conditions d'exonération de l'article 81 n'étaient pas réunies en ce qui la concerne ; que, dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'administration fiscale, qui n'a pas admis au stade de la réponse aux observations du contribuable qu'il s'agissait de remboursements, ne pouvait réintégrer les remboursements de frais qu'ils ont perçus au titre des années 2005 et 2006 ;

S'agissant des revenus distribués :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) " ;

9. Considérant, d'une part, que si M. et Mme B...soutiennent que la somme de 169 503,50 euros émanant de la société CCP, encaissée par eux en 2005, correspondrait en partie à des remboursements de frais kilométriques, ils n'en justifient pas davantage en cause d'appel qu'en première instance alors qu'ils sont les seuls à pouvoir produire les justifications ; qu'il résulte, en revanche, de l'instruction qu'en 2005, les requérants et leur fils détenaient 100% du capital social de ladite société, dont le gérant était M. B... et, que les opérations de contrôle menées par l'administration ont révélé que le règlement des factures en question, comptabilisées en charges, n'avait pas été effectué au profit des fournisseurs concernés mais au profit des requérants et de leur fils sans que l'avantage ainsi consenti n'apparaisse distinctement dans la comptabilité de la société ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que les charges en cause ont été réintégrées dans les résultats de la société CCP et que les sommes correspondantes ont été qualifiées de revenus distribués entre leurs mains à hauteur de 169 503,50 euros au titre de l'année 2005, au sens du c) de l'article 111 du code général des impôts ;

10. Considérant, d'autre part, qu'en se bornant à soutenir que le versement à leur profit, le 10 février 2006, d'une somme de 120 000 euros par la société CCP, correspond à des dividendes qui, n'ayant été votés par l'assemblée des associés que le 27 juin 2007, n'étaient pas imposables en 2006, M. et Mme B...ne contestent pas sérieusement avoir effectivement encaissé et donc disposé de cette somme au cours de l'année 2006 au sens de l'article 12 du code général des impôts ; que c'est dès lors à bon droit que, sur le fondement des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts, le service a imposé cette somme entre les mains des requérants en 2006 ;

S'agissant des revenus d'origine indéterminée :

11. Considérant que si M. et Mme B...soutiennent, à nouveau, que les crédits figurant sur leurs comptes bancaires, à hauteur de 61 282,74 euros en 2005 et 84 446,37 euros en 2006, correspondraient des remboursements de frais kilométriques exposés par

M. B...et leur fils, ils n'en justifient pas davantage en appel qu'en première instance ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration fiscale a imposé ces montants, en tant que revenus d'origine indéterminée au titre de chacune de ces années ;

S'agissant des autres chefs de redressement :

12. Considérant, enfin, que si les appelants demandent la décharge de la totalité des impositions supplémentaires, ils ne soulèvent, toutefois, en cause d'appel, aucun moyen particulier de nature à contester l'imposition des autres revenus ;

Sur les intérêts de retard :

13. Considérant que les requérants ne démontrant pas l'exagération des impositions en principal mises à leur charge, ils ne sont pas fondés à demander à être déchargés des intérêts de retard par voie de conséquence des arguments précédemment formulés ;

Sur les majorations :

14. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

15. Considérant d'une part, qu'à supposer soulevé le défaut de motivation en la forme des pénalités, il ressort de l'examen de la proposition de rectification du 17 décembre 2008 et de la proposition de rectification du 3 avril 2009, qu'elles mentionnent les éléments de fait et de droit qui fondent l'application des majorations au titre de l'article 1729 du code général des impôts ;

16. Considérant, d'autre part, qu'en faisant valoir que M. et Mme B...ont encaissé de manière répétée en 2005 et 2006, sur leurs comptes bancaires personnels, de nombreux chèques destinés au règlement de factures de fournisseurs de la société CCP, dont M. B... était alors gérant, et dont l'intégralité du capital social était entre les mains des époux B...et de leur fils, l'administration doit être regardée comme établissant l'intention délibérée des contribuables d'éluder l'impôt, justifiant ainsi de l'application des majorations prévues par les dispositions précitées, en matière de revenus de capitaux mobiliers ;

17. Considérant enfin, qu'il résulte de l'instruction que, s'agissant des revenus d'origine indéterminée, l'administration fiscale s'est fondée, pour établir l'intention délibérée de

M. et Mme B...d'éluder l'impôt, sur le nombre important de crédits injustifiés pour des montants significatifs, sans invoquer leur comportement postérieur à leur déclaration de revenus au titre des années 2005 et 2006, contrairement à ce qu'ils soutiennent ; qu'il suit de ce qui précède, que le moyen tiré de ce que l'administration fiscale n'aurait pas justifié le

bien-fondé de l'application des majorations de 40% prévues par l'article 1729 du code général des impôts, précité, doit être écarté ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

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N°15VE02452 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02452
Date de la décision : 24/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Taxation d'office.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Cécile MOULIN-ZYS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET AVODIA

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-05-24;15ve02452 ?
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