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12/04/2016 | FRANCE | N°14VE02704

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 12 avril 2016, 14VE02704


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LRMD a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge de la cotisation minimale de taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2008 ainsi que des majorations et intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n° 1307693 du 11 juillet 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 9 septembre 2014, 19 janvier 2015 et 15 juillet 2015

, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LRMD a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge de la cotisation minimale de taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2008 ainsi que des majorations et intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n° 1307693 du 11 juillet 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 9 septembre 2014, 19 janvier 2015 et 15 juillet 2015, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de remettre à la charge de la SAS LRMD la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre de l'année 2008 à hauteur de la réduction prononcée en première instance ;

Le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS soutient que :

- la SAS LRMD est redevable de la cotisation minimale de taxe professionnelle en vertu des dispositions de l'article 1647 E du code général des impôts car elle exerce à titre habituel une activité professionnelle de location d'immeubles nus ; la société LRMD était avant la restructuration de 2004 exploitante directe et loueur de fonds de commerce à l'enseigne Monoprix ; si la restructuration de 2004 a eu pour objet de dissocier le patrimoine foncier, resté sa propriété, des fonds de commerce cédés à la société Monoprix Exploitation qu'elle contrôle directement, qui devient locataire de ces immeubles, c'est toujours le groupe Monoprix qui conserve la maîtrise totale du dispositif et détermine les orientations de la politique du groupe, notamment en ce qui concerne les modalités de mise en oeuvre des moyens mobilisés ; la restructuration n'a pas modifié l'objet et la destination des actifs fonciers qui restent utilisés dans une intention spéculative ; elle ne permet pas de faire sortir l'exploitation de ces actifs immobiliers de la sphère professionnelle et d'assimiler la SAS LRMD au rôle passif d'un gestionnaire civil d'immeubles ; la SAS LRMD met en oeuvre des moyens humains et matériels importants pour la gestion et l'optimisation de son parc immobilier, ce qui caractérise une activité professionnelle ; les modalités d'exercice des locations sont plus avantageuses pour les sociétés du groupe ; la SAS LRMD conserve en outre certains fonds de commerce qu'elle donne en location-gérance à des sociétés du groupe ; tous ces éléments démontrent qu'elle poursuit en réalité, sous une autre forme, une exploitation commerciale antérieure ; la SAS LRMD ne peut utilement se prévaloir des divers documents qu'elle cite qui concernent une situation dans laquelle les acteurs économiques se bornent à louer leur patrimoine privé et non, comme elle, dans les conditions d'une activité professionnelle ; les réponses et travaux parlementaires relatifs à l'adoption de la cotisation économique territoriale ne sauraient l'engager pour la période antérieure et les jurisprudences relatives à la taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas topiques ; enfin, il est normal que la société mère et ses filiales soient également assujetties à la taxe professionnelle car elles exercent chacune une activité qui entre dans son champ d'application ;

- si la SAS LRMD se plaint de ce que la doctrine applicable viole les principes constitutionnels, ce moyen ne repose sur aucun principe juridique et ne peut qu'être écarté ; en tout état de cause, cette société ne peut valablement soutenir qu'elle serait dans une situation comparable à celle des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie dès lors qu'elle n'est pas soumise aux mêmes contraintes d'objet statutaire ;

- il n'appartient pas au juge de l'impôt, en dehors des cas où il est saisi sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité, de se prononcer sur un moyen tiré de la non-conformité de la loi à une norme de valeur constitutionnelle ; en tout état de cause, l'atteinte à l'objectif constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi n'est pas un droit ni une liberté garantis par la Constitution.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bruno-Salel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Belle, rapporteur public,

- les observations de Me Roche, avocat, pour la SAS LRMD.

1. Considérant que la société par actions simplifiée SAS LRMD a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a imposée à la cotisation minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2008 ; que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS demande l'annulation du jugement du 11 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la SAS LRMD tendant à la décharge de cette cotisation minimale de taxe professionnelle ainsi que de la majoration et des intérêts de retard correspondants, et de la rétablir à cet impôt à hauteur de la réduction prononcée en première instance ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article 1447 du code général des impôts, dans sa rédaction imposable aux impositions en litige : " I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. " ; qu'aux termes de l'article 1647 D : " I. A compter de 1981, tous les redevables de la taxe professionnelle sont assujettis à une cotisation minimum établie au lieu de leur principal établissement (...) " ; que selon l'article 1647 E du même code : " I. La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. (... ) " ;

3. Considérant que la location d'un immeuble nu par son propriétaire ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens de ces dispositions sauf dans l'hypothèse où, à travers cette location, le bailleur ne se borne pas à gérer son propre patrimoine mais poursuit, selon des modalités différentes, une exploitation commerciale antérieure ou participe à l'exploitation du locataire ; qu'il en va de même lorsqu'un immeuble nu est donné en

sous-location par une personne qui en dispose en vertu d'un contrat de crédit-bail ;

4. Considérant qu'il est constant que dans le cadre de la restructuration du groupe Monoprix qui a pris effet au 1er janvier 2004, les deux futures holding, la société mère Monoprix et la SAS LRMD, détenue à 100 % par la société Monoprix, propriétaires et exploitantes de certains magasins du groupe Monoprix, ont absorbé par voie de fusion l'ensemble de leur filiales ayant des actifs d'exploitation de magasins (murs et/ou fonds de commerce) puis ont, simultanément, regroupé l'ensemble de leurs actifs commerciaux, à l'exception des murs, et les ont apportés à la société Monoprix Exploitation, filiale détenue à 57 % par la SAS LRMD et à 43 % par la société Monoprix ; qu'à l'issue de cette restructuration, les SAS MONOPRIX et LRMD se trouvent propriétaires de l'ensemble du patrimoine foncier du groupe Monoprix, composé notamment de plusieurs centaines de magasins, qu'elles donnent à bail pour l'essentiel aux sociétés du groupe Monoprix, et principalement à sa filiale la société Monoprix Exploitation, qui détiennent et exploitent les fonds de commerce qu'elles leur ont apportés lors de la restructuration ;

5. Considérant qu'il est constant que l'activité de location de la SAS LRMD portait sur des locaux nus, que les loyers constituaient l'essentiel de ses recettes et que ces loyers n'étaient pas indexés sur le chiffre d'affaires des sociétés locataires ; que l'importance des recettes générées par cette activité de location d'immeubles nus et des moyens matériels et humains mis en oeuvre sont sans incidence ; que le fait que la SAS LRMD a conservé, après la restructuration, certains fonds de commerce qu'elle donne en location-gérance à des sociétés du groupe ne permet pas, par lui-même, à conférer à son activité litigieuse de location d'immeubles nus le caractère d'une activité professionnelle ; que les seules circonstances que la société requérante contrôle la société Monoprix Exploitation, qu'elle n'exige pas de dépôt de garantie et que le paiement des loyers s'opère à terme échu ne sont pas suffisantes pour établir que la SAS LRMD ne se borne pas à gérer son propre patrimoine mais poursuit, selon des modalités différentes, l'exploitation commerciale qu'elle exerçait antérieurement ; que, par ailleurs, le ministre ne soutient pas que la SAS LRMD participerait à l'exploitation des locataires ; qu'en tout état de cause, une telle participation ne résulte pas de l'instruction dès lors notamment qu'ainsi qu'il a été dit les loyers n'étaient pas indexés sur le chiffre d'affaires des sociétés locataires ; que, par suite, il ne résulte pas de l'instruction que l'activité de location des immeubles nus exercée par la SAS LRMD présente le caractère d'une activité professionnelle au sens des dispositions du I de l'article 1447 du code général des impôts ; qu'il s'ensuit que le chiffre d'affaires qu'elle réalisait au titre de ses activités imposables était inférieur au seuil de 7,6 millions d'euros prévu par l'article 1647 E du code général des impôts à partir duquel elle pouvait être assujettie à la cotisation minimale de taxe professionnelle ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la

SAS LRMD ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SAS LRMD pour l'instance et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est rejeté.

Article 2 : Il est mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance par la SAS LRMD et non compris dans les dépens.

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N° 14VE02704 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02704
Date de la décision : 12/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-03 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. NICOLET
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme BELLE VANDERCRUYSSEN
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-04-12;14ve02704 ?
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