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29/03/2016 | FRANCE | N°14VE02352

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 29 mars 2016, 14VE02352


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 20 juillet 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de la troisième section des

Hauts-de-Seine a autorisé la société ACOR INTER MANUFACTURING (AIM) à le licencier.

Par un jugement n° 1007239 du 24 février 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 1er août et 19 novem

bre 2014 et

17 janvier et 5 mars 2015, Me E... A..., en qualité de liquidateur de la société AIM, représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 20 juillet 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de la troisième section des

Hauts-de-Seine a autorisé la société ACOR INTER MANUFACTURING (AIM) à le licencier.

Par un jugement n° 1007239 du 24 février 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 1er août et 19 novembre 2014 et

17 janvier et 5 mars 2015, Me E... A..., en qualité de liquidateur de la société AIM, représentée par Me Boyer Chammard, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de confirmer la décision de l'inspecteur du travail ;

3° de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Me A... soutient que :

- le licenciement économique de M. B...est intervenu pour sauvegarder la compétitivité du groupe d'entreprises auquel appartient la société AIM, après le refus du salarié de l'offre de reclassement en qualité d'ingénieur de bureau localisé à Naintré ;

- la société a satisfait à son devoir d'efforts de reclassement, M. B...n'ayant pas les compétences pour occuper le poste de responsable des brouillards d'eau, lequel au demeurant n'était pas disponible, ni les postes d'ingénieur BE camion ou d'ingénieur BE pompe ;

- la procédure suivie a été régulière, les délégués du personnel ayant été suffisamment informés notamment lors de deux réunions avec la direction de l'entreprise tenues les 10 et

20 mai 2010 ;

- le groupe de sociétés auquel appartient la société ACOR INTER MANUFACTURING rencontre de graves difficultés financières depuis 2008 : le bilan 2010 de la société

ACOR INTER MANUFACTURING enregistre un bénéfice de 5 414 euros pour un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros, la société AI Group enregistrant une perte de 973 000 euros et la société ACOR INTER présentant une perte de 3 807 371 euros ;

- la société a respecté les critères d'ordre de licenciement.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boret,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Boyer Chammard, pour Me A..., et de MeC..., pour M.B....

1. Considérant que le liquidateur judiciaire de la société ACOR INTER MANUFACTURING relève appel du jugement susvisé par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, à la demande de M.B..., employé en qualité de directeur de l'exploitation France et investi des fonctions de délégué du personnel, annulé la décision de l'inspecteur du travail des Hauts-de-Seine du 20 juillet 2010 autorisant la société ACOR INTER MANUFACTURING à le licencier, pour motif économique ;

2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques " ; que figure au nombre des causes sérieuses de licenciement économique la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ;

3. Considérant, d'autre part, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ;

4. Considérant que le tribunal administratif a prononcé l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 20 juillet 2010 au motif que, pour autoriser le licenciement de M. B..., cette autorité s'est fondée sur l'insuffisance des efforts de reclassement consentis par l'employeur et notamment sur la circonstance que ni le poste d'ingénieur commercial responsable du produit : " brouillard d'eau ", qui était vacant, ni aucun des deux postes d'ingénieurs de bureau d'étude, également vacants, n'avaient été proposés à l'intéressé ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'ingénieur commercial responsable du produit : " brouillard d'eau " a démissionné de ses fonctions le 19 mai 2010 ; que la société ACOR INTER MANUFACTURING, par une décision de gestion dont il n'appartient pas à l'administration de mettre en cause l'opportunité, n'a pas pourvu à son remplacement ; que, dans ces conditions, aucune obligation de proposer ce poste au reclassement ne pesait sur la société ; que les deux emplois d'ingénieurs de bureau d'étude n'étaient pas équivalents au poste qu'occupait auparavant M. B...et ne correspondaient pas à son profil, que ce dernier ne possédait, par ailleurs, pas les qualifications requises pour prétendre à ces emplois ; que M. B...ne pouvant dès lors se prévaloir de ce que les efforts de reclassement auraient été insuffisants, c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur ce moyen pour annuler la décision de l'inspecteur du travail ;

6. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. B...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant la Cour ;

7. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M.B..., pour apprécier la réalité des motifs économiques allégués à l'appui de la demande d'autorisation de licenciement le concernant, l'inspecteur du travail a, à juste titre, pris en considération la situation économique de l'ensemble du groupe incluant la société ACOR INTER MANUFACTURING ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le groupe de sociétés auquel appartient la société ACOR INTER MANUFACTURING rencontrait de graves difficultés depuis 2008, l'activité de la société n'ayant généré en 2010 qu'un bénéfice de

5 414 euros pour un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros, alors que la société AI Group enregistrait une perte de 973 000 euros et que la société ACOR INTER MANUFACTURING présentait une perte de 3 807 371 euros ; qu'au demeurant, la société ACOR INTER MANUFACTURING a été placée en redressement judiciaire par un jugement du Tribunal de commerce de Poitiers du 30 août 2011, puis en liquidation judiciaire par un jugement de ce même tribunal du 8 novembre 2011 ; que, dans ces conditions, la situation de la société ACOR INTER MANUFACTURING au sein du groupe Acor Inter était de nature à justifier la réalité du motif économique invoqué à l'appui de la demande d'autorisation de licenciement de M.B... ;

9. Considérant, en troisième lieu, que les délégués du personnel ont été régulièrement consultés lors de réunions tenues les 10 et 20 mai 2010 ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-8 du code du travail doit être écarté ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que M. B...soutient que les critères déterminant l'ordre des licenciements n'ont pas été respectés ; que, cependant, et en tout état de cause, il n'appartient qu'au juge judiciaire de contrôler le respect de l'ordre des licenciements ; que, par suite, le moyen invoqué est inopérant ;

11. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure de licenciement engagée à l'encontre de M. B...ait été en rapport avec son mandat représentatif ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société

ACOR INTER MANUFACTURING est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 20 juillet 2010 de l'inspecteur du travail des Hauts-de-Seine ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre le versement à Me A..., en qualité de liquidateur de la société ACOR INTER MANUFACTURING, de la somme de 1 500 euros à la charge de M. B...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE

Article 1er : Le jugement n° 1007239 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : M. B...versera à Me A...la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 14VE02352


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02352
Date de la décision : 29/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle BORET
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : BOYER CHAMMARD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-03-29;14ve02352 ?
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