La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/03/2016 | FRANCE | N°14VE00166

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 24 mars 2016, 14VE00166


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de vigilance sur le patrimoine et l'environnement de Saint-Ouen (AVIPSO), MmesJ..., E..., K..., B...I...etG..., A...D..., M. H..., la SCI Albert et les sociétés LRD et Imo-Group ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation des arrêtés en date du 15 mai 2006 et du 19 novembre 2007 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a, d'une part, déclaré d'utilité publique au profit de la société d'économie mixte de construction et de rénovation de Saint-Ouen (SEMISO) l'

acquisition de parcelles nécessaires au projet de restructuration urbaine d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de vigilance sur le patrimoine et l'environnement de Saint-Ouen (AVIPSO), MmesJ..., E..., K..., B...I...etG..., A...D..., M. H..., la SCI Albert et les sociétés LRD et Imo-Group ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation des arrêtés en date du 15 mai 2006 et du 19 novembre 2007 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a, d'une part, déclaré d'utilité publique au profit de la société d'économie mixte de construction et de rénovation de Saint-Ouen (SEMISO) l'acquisition de parcelles nécessaires au projet de restructuration urbaine de la zone d'aménagement concerté de la " Porte de Saint Ouen ", et, d'autre part, déclaré cessibles les parcelles concernées.

Par jugement n° 0606802-0606804-0711091-0804059-0804165-0804303 en date du 3 mai 2010, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a donné acte du désistement de MmeG..., a annulé les arrêtés susvisés, a condamné l'Etat à payer la somme de 750 euros à l'AVIPSO et les sommes de 500 euros à la SCI Albert, Mme B...I..., Mme E...et la société LRD et a condamné la commune de Saint-Ouen à payer la somme globale de 1 000 euros à l'AVIPSO, Mme J...et à la société Imo-Group.

Première procédure devant la Cour (sous le numéro 10VE02088) :

Par un recours enregistré le 1er juillet 2010, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES a demandé à la Cour d'annuler ce jugement. Le ministre soutenait que c'est à tort que le tribunal a annulé les arrêtés en question en raison de l'illégalité affectant la décision du maire en date du 8 juillet 2003 de signer la convention publique d'aménagement conclue avec la SEMISO sans avoir recherché s'il existait des motifs impérieux d'intérêt général justifiant la poursuite des relations contractuelles et validant la convention d'aménagement litigieuse ; que le tribunal devait également faire respecter le principe de sécurité juridique ; qu'ainsi, l'article 11 de la loi n° 2005-809 du 20 juillet 2005 relative aux concessions d'aménagement " peut trouver à s'appliquer, la conventionalité de la loi étant soumise à la nature des circonstances de chaque espèce " ;

..........................................................................................................

Par un arrêt en date du 9 juin 2011, la Cour a rejeté le recours présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et mis à la charge de l'Etat le versement à l'AVIPSO, M.H..., la SCI Albert, Mme J..., C...et E...et la société Imo-Group d'une somme de 1 000 euros chacun au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

Procédure devant le Conseil d'Etat :

Par décision n° 351959 du 26 décembre 2013, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt susvisé du 9 juin 2011 et renvoyé l'affaire à la Cour.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 2005-809 du 20 juillet 2005 ;

- le décret du 14 mars 1986 portant suppression des commissions des opérations immobilières et de l'architecture et fixant les modalités de consultation des services des domaines ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Demouveaux, président,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de Me M...pour la commune de Saint-Ouen et la SEMISO et de Me L...pour l'AVIPSO, MmeE..., l'indivision F...et la société Imo-Group.

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du recours ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu :

1. Considérant que le recours du ministre tend à l'annulation du jugement attaqué en tant seulement que ce jugement a annulé les arrêtés susvisés du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 15 mai 2006 et du 19 novembre 2007 ; que la circonstance que la commune de Saint-Ouen et la SEMISO ont conclu, le 26 janvier 2011, un protocole de résolution amiable de la convention publique d'aménagement signée le 8 juillet 2003 est sans incidence sur l'intérêt qu'a le ministre à ce que ces arrêtés soient rétablis dans l'ordre juridique ; que, par suite, son recours n'ayant pas perdu son objet du fait de la résolution de cette convention, les conclusions à fin de non-lieu présentées par l'AVIPSO, Mme E...et la SARL Imo-Group doivent être rejetées ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si le ministre fait valoir que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que des motifs impérieux d'intérêt général justifiaient l'application de l'article 11 de la loi susvisée du 20 juillet 2005, ce moyen se rattache à des conclusions tendant à l'annulation par le tribunal de la décision du maire de signer la convention d'aménagement, conclusions que ne présente pas le ministre dans le présent appel ; qu'en tout état de cause, il résulte des motifs du jugement attaqué que ces mêmes juges, en indiquant que les dispositions précitées de la loi du 20 juillet 2005 étaient incompatibles avec les objectifs poursuivis par la directive 93/37 du 14 juin 1993, ont répondu à ce moyen pour l'écarter ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'arrêté susvisé en date du 15 mai 2006 portant déclaration d'utilité publique :

3. Considérant que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale ; que les actes portant déclaration d'utilité publique pris en vue de l'acquisition par voie d'expropriation des terrains nécessaires à la réalisation d'une zone d'aménagement concertée (ZAC) ne sont pas des actes pris pour l'application de la décision d'un maire de signer la convention, approuvée par délibération du conseil municipal, par laquelle la commune a confié à une société l'aménagement de cette zone, laquelle ne constitue pas davantage leur base légale, alors même que la déclaration d'utilité publique a été prise pour permettre la réalisation de cette opération d'aménagement et qu'elle précise, à titre d'information, l'identité de l'aménageur ; que, par suite, par un moyen qui est d'ordre public et soulevé d'office par la Cour, le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé, pour annuler l'arrêté litigieux, sur le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision du 8 juillet 2003 par laquelle le maire de Saint-Ouen a signé la convention d'aménagement relative à la réalisation du projet de restructuration urbaine de la ZAC multisites de la Porte de Saint-Ouen ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant devant le tribunal administratif que devant la Cour par les requérants à l'encontre de l'arrêté portant déclaration d'utilité publique ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, en vigueur à la date des arrêtés contestés : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement :/ (...) I.- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages :/ (...) 5° L'appréciation sommaire des dépenses ; (...) " ; que l'article 6 du décret susvisé du 14 mars 1986 prévoit que : " Dans le cas des acquisitions poursuivies par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique, les collectivités et services expropriants sont tenus de demander l'avis du service des domaines :/ 1° Pour produire, au dossier de l'enquête visée à l'article L. 11-1 du code de l'expropriation, l'estimation sommaire et globale des biens dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation des opérations prévues à l'article R. 11-3 (I, II, et III) du même code ; (...) " ; que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

6. Considérant que l'AVIPSO, MmeE..., l'indivision F...et la société Imo-Group soutiennent sans être contredits, dans le dernier état de leurs écritures, que l'expropriant n'a pas produit au dossier d'enquête publique l'avis du service des domaines requis par les dispositions précitées du décret du 14 mars 1986 ; qu'il ne ressort effectivement pas des pièces du dossier que cet avis, au demeurant non visé par l'arrêté attaqué, ait été sollicité du service des domaines et produit au dossier d'enquête publique ; que cette omission, en privant le public de la possibilité de connaître l'estimation sommaire et globale des biens dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation des opérations, a eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ; qu'elle entache dès lors d'une irrégularité substantielle l'arrêté en question ;

En ce qui concerne l'arrêté susvisé en date du 19 novembre 2007 déclarant cessibles les terrains situés dans le périmètre de la ZAC multisites de la Porte de Saint-Ouen :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 que l'arrêté déclaratif d'utilité publique est entaché d'illégalité ; que cette illégalité prive de base légale l'arrêté susvisé du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 19 novembre 2007 ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que la convention conclue entre la commune de Saint-Ouen et la SEMISO a fait l'objet, le 26 janvier 2011, d'une résolution par les parties ; que la SEMISO doit ainsi être regardée comme n'ayant jamais eu la qualité de concessionnaire de l'aménagement de la zone ; qu'un arrêté préfectoral ne peut légalement déclarer cessibles des parcelles de terrain nécessaires à la réalisation d'une ZAC en l'absence d'identification du concessionnaire chargé de cet aménagement et bénéficiaire, à ce titre, de l'expropriation ; qu'il en résulte que l'arrêté susvisé du 19 novembre 2007 devait, en tout état de cause, être annulé par voie de conséquence de la résolution de la convention conclue entre la commune et la SEMISO ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué du 3 mai 2010, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé les arrêtés des 15 mai 2006 et 19 novembre 2007 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a respectivement déclaré d'utilité publique l'acquisition de parcelles nécessaires au projet de restructuration urbaine de la ZAC multisites de la Porte de Saint-Ouen et déclaré cessibles les parcelles concernées :

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au profit de l'AVIPSO, de MmeE..., de l'indivision F...et de la SARL Imo-Group, pris globalement, et la somme de 1 500 euros, respectivement, à MmeC... et à la SCI Albert ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions au profit de M. H... ; que les conclusions présentées sur le même fondement par la commune de Saint-Ouen doivent être également rejetées dès lors qu'elle succombe en l'espèce.

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 10 000 euros à l'AVIPSO, à MmeE..., à l'indivision F...et à la SARL Imo-Group pris globalement et la somme de 1 500 euros, respectivement, à Mme C...et à la SCI Albert.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Ouen et M. H...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

''

''

''

''

2

N°14VE00166


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00166
Date de la décision : 24/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-02-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Opérations d'aménagement urbain. Zones d'aménagement concerté (ZAC).


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre DEMOUVEAUX
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : HELIOS AVOCATS PARIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-03-24;14ve00166 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award