La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/02/2016 | FRANCE | N°15VE02252

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 18 février 2016, 15VE02252


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 11 février 2013 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui renouveler un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

Par un jugement n° 1301303 du 18 juin 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2015, M. A..., représenté par Me Kalaa, avoca

t, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 11 février 2013 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui renouveler un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

Par un jugement n° 1301303 du 18 juin 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2015, M. A..., représenté par Me Kalaa, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement la mention " salarié ", dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de l'Essonne de réexaminer sa demande dans le mois qui suivra la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

5° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- en l'absence d'une délégation de signature, l'auteur de l'acte était incompétent ;

- le refus de renouveler son titre de séjour méconnaît les articles L. 313-11 7°, L. 313-14 et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- le préfet s'est fondé sur un avis défavorable du 24 mai 2012 de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, faisant lui-même état de faits inexacts en ce qu'il était titulaire d'un contrat à durée déterminée et non d'un contrat à durée indéterminée.

Vu la lettre du 17 novembre 2015, informant les parties de ce qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public soulevé d'office.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bigard a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien, a obtenu la délivrance d'une carte de séjour temporaire, en qualité de salarié, valable du 1er avril 2011 au 31 mars 2012, dont il a sollicité le renouvellement ; que par un arrêté du 11 février 2013, le préfet de l'Essonne a rejeté cette demande, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que, par un arrêt en date du 5 février 2015, la Cour administrative de Paris a rejeté l'appel de M. A... formé contre le jugement du 11 janvier 2014, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun avait rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire prononcée à son encontre ; que le requérant relève appel du jugement en date du 18 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Essonne du 11 février 2013 lui refusant le renouvellement de sa carte de séjour temporaire ;

2. Considérant, en premier lieu que Mme D...C..., directrice de l'immigration et de l'intégration à la préfecture de l'Essonne, a reçu, par arrêté préfectoral du 17 janvier 2013 régulièrement publié au recueil n° 3 de janvier 2013 des actes administratifs de l'Etat dans l'Essonne, délégation de signature aux fins de signer la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 de ce code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 311-7 dudit code auquel ne déroge pas l'accord franco-tunisien : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ;

4. Considérant, d'une part, que la situation des ressortissants tunisiens souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est régie par les stipulations de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, lesquelles font obstacle, dans cette mesure, à l'application aux ressortissants tunisiens des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont le même objet ; que, par suite, M. A... ne peut utilement invoquer les dispositions précitées du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux conditions de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ; que, d'autre part, si le refus de séjour opposé à M. A...trouve son fondement légal dans les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé, qui peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que cette substitution de base légale ne prive l'intéressé d'aucune garantie, il est constant que M. A...ne disposait ni d'un visa de long séjour ni d'un contrat de travail visé par l'autorité administrative lorsqu'il a déposé sa demande de renouvellement de titre de séjour ; qu'il ne remplissait donc pas les conditions fixées par les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-tunisien combinées à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'autorité administrative saisie d'une demande de titre de séjour n'est pas tenue de rechercher si ce titre peut être délivré sur un autre fondement que celui invoqué par le demandeur ; que, dès lors, M. A...ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne constituaient pas le fondement de sa demande de renouvellement de titre de séjour ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que M. A... soutient que pour refuser le renouvellement de sa carte de séjour temporaire, le préfet de l'Essonne s'est fondé sur un avis défavorable du 24 mai 2012 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, erroné en ce qu'il indiquait qu'il n'avait pas été en mesure de présenter une attestation de licenciement, alors qu'il avait été mis fin à son précédent contrat de travail à son échéance et non en vertu d'une mesure de licenciement ; qu'à supposer établie cette erreur, il ressort des pièces du dossier que cet avis était également motivé par le fait que la situation de l'emploi était défavorable à l'admission au séjour de l'intéressé pour la profession de maçon et que le nouvel employeur n'avait pas répondu à la demande des services de justifier de sa recherche de candidats préalablement à son embauche ; que ces motifs suffisaient à eux-seuls à fonder l'avis défavorable du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ; que, dès lors, cette erreur est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

8. Considérant que M. A... fait valoir qu'il vit en France depuis 2001 où résident de manière régulière ses deux frères, qu'il y a développé des liens amicaux, familiaux et professionnels et qu'il est intégré dans la société française ; que, toutefois, la seule production d'avis d'imposition pour les années 2002 à 2009 ne suffit pas à établir le caractère habituel de sa présence pour ces années non plus que l'intensité de ses liens sur le territoire ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui a au moins vécu jusqu'à l'âge de 40 ans en Tunisie où résident son épouse et leurs quatre enfants, conserve dans ce pays de fortes attaches ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 4 février 2016, à laquelle siégeaient :

M. Demouveaux, président de chambre,

M. Soyez, président assesseur,

M. Bigard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 février 2016.

Le rapporteur,

E. BIGARDLe président,

J.-P. DEMOUVEAUX

Le greffier,

V. BRIDET La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

''

''

''

''

3

N° 15VE02252


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02252
Date de la décision : 18/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Eric BIGARD
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : KALAA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-02-18;15ve02252 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award