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31/12/2015 | FRANCE | N°15VE00304

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 31 décembre 2015, 15VE00304


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société LAGARDERE SCA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001.

Par un jugement n° 0508668 du 8 juillet 2010, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10VE03084 du 6 novembre 2012, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société LAGARDERE SCA contre c

e jugement.

Par une décision n° 365520 du 23 janvier 2015, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société LAGARDERE SCA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001.

Par un jugement n° 0508668 du 8 juillet 2010, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10VE03084 du 6 novembre 2012, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société LAGARDERE SCA contre ce jugement.

Par une décision n° 365520 du 23 janvier 2015, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles et lui a renvoyé l'affaire.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et quatre mémoires, enregistrés les 10 septembre 2010, 15 juin 2011, 10 octobre 2012, 8 avril 2015 et 20 mai 2015, la société LAGARDERE SCA, représentée par la société d'avocats CMS Bureau Francis Lefebvre, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge demandée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société LAGARDERE SCA soutient que :

- les refacturations de frais de conseil au profit de ses filiales doivent être prises en compte au numérateur du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée prévu par l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts dès lors qu'elles sont comprises dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée et imposables de plein droit ; que ces honoraires engagés dans le cadre d'une réflexion sur la stratégie du groupe ont été facturés à la société requérante en qualité de société holding du groupe qui a agi en son nom propre ; ces frais ont été refacturés pour leur montant exact aux filiales qui ont réalisé les prises de participation, avec la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, avec comptabilisation des produits au compte de résultat ; qu'une telle refacturation sans marge est réalisée à titre onéreux selon la doctrine administrative 3 A 1141 n°12 du 20 octobre 1999 et 3 A 1112 n°9 du 20 octobre 1999 ; la société qui exerce une activité économique consistant dans l'exploitation de marques a la qualité d'assujettie à la taxe ; que la refacturation de frais correspond à une prestation réalisée en cette qualité d'assujettie ;

- la refacturation de frais ne figure pas parmi les opérations comprises dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée et devant être exclues pour le calcul du prorata de taxe sur la valeur ajoutée déductible dont la doctrine administrative 3 D 171 n°12 prévoit une énumération limitative ;

- les frais de conseil refacturés aux filiales de la société ne correspondent pas à des débours, dès lors que les conditions prévues au 2° du II de l'article 267 du code général des impôts ne sont pas réunies ; la doctrine administrative 3 B 1112 du 18 septembre 2000 n°24 et 26 est en ce sens ;

- la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les frais de conseils litigieux est déductible sur le fondement de l'article 271 du code général des impôts dès lors que ces frais entretiennent un lien direct et immédiat avec les refacturations de frais aux filiales, pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée a été facturée.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chayvialle,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,

- et les observations de Me A...et MeB..., avocats de la société LAGARDERE SCA.

1. Considérant que la société LAGARDERE SCA, société holding tête de groupe, fournit des services à ses filiales sous la forme de concession de marque, en contrepartie desquels elle perçoit des redevances entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'au cours des années 1999 et 2000, la société LAGARDERE SCA a engagé une réflexion stratégique sur les activités du groupe, traditionnellement implantées dans les secteurs de l'automobile, de l'armement et de la communication, en vue de renforcer ces activités dans les domaines des médias et de la communication ; qu'à cette fin elle a exposé auprès de banques et de cabinets d'avocat, des frais de conseils afin d'identifier dans ces domaines, des sociétés cibles et d'étudier les conditions juridiques, fiscales et financières d'opérations de prises de participations ; que les prises de participation ont été réalisées, non par la société LAGARDERE SCA, mais par ses filiales, les sociétés Hachette, Europe 1 et Grolier Interactive Europe ; que la société LAGARDERE SCA a refacturé sans marge à ces filiales les frais litigieux, avec la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en tant que redevable partiel de la taxe sur la valeur ajoutée, elle a inclus les recettes résultant de ces refacturations dans le chiffre d'affaires des opérations taxables figurant au numérateur et au dénominateur de son prorata de déduction de la taxe qui a grevé les achats de biens ne constituant pas des immobilisations et de services et utilisés concurremment à la réalisation d'opérations dont les unes ouvrent droit à déduction et les autres n'ouvrent pas droit à déduction ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause la prise en compte de ces refacturations dans le calcul de ce prorata ; que, par jugement du 8 juillet 2010, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001 résultant de la réduction du prorata de déduction ; que, par décision du 23 juillet 2015, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 6 novembre 2012 par lequel la Cour a rejeté l'appel de la société requérante contre ce jugement et a renvoyé l'affaire devant la Cour ; que le litige porte sur la prise en compte des recettes résultant de ces refacturations de frais dans les " opérations ouvrant droit à déduction " au sens et pour l'application de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, alors en vigueur, à inscrire au numérateur et au dénominateur du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les achats de biens et services à utilisation mixte ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1. du I. de l'article 271 du code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. " ; qu'aux termes du 1. de l'article 273 du même code : " Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions d'application de l'article 271./ Ils fixent notamment : (...) -les modalités suivant lesquelles la déduction de la taxe ayant grevé les biens ou services qui ne sont pas utilisés exclusivement pour la réalisation d'opérations imposables doit être limitée ou réduite. " ; qu'aux termes de l'article 219 de l'annexe II au code général des impôts, alors en vigueur, relatif à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée relative aux biens ne constituant pas des immobilisations et aux services : " Les assujettis qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé ces (...) biens et services dans les limites ci-après :(...) c. Lorsque leur utilisation aboutit concurremment à la réalisation d'opérations dont les unes ouvrent droit à déduction et les autres n'ouvrent pas droit à déduction, une fraction de la taxe qui les a grevés est déductible. Cette fraction est déterminée dans les conditions prévues aux articles 212 à 214. " ; qu'aux termes du 1. de l'article 212 de cette même annexe, alors en vigueur : " Les redevables qui, dans le cadre de leurs activités situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations utilisées pour effectuer ces activités. / Cette fraction est égale au montant de la taxe déductible (....) multiplié par le rapport existant entre : / a) Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction (...) ;/ b) Au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations figurant au numérateur ainsi qu'aux opérations qui n'ouvrent pas droit à déduction (...))" ; que les opérations ouvrant droit à déduction, à inscrire au numérateur et au dénominateur du prorata de déduction, s'entendent des opérations comprises dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée défini aux articles 256 et 256 A du code général des impôts et qui n'en sont pas exonérées par une disposition législative particulière ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. " ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa,(...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. " ; qu'en revanche, la simple acquisition et la simple détention de parts sociales ne peuvent être regardées comme une activité économique conférant à son auteur la qualité d'assujetti ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que les activités économiques effectuées par la société LAGARDERE SCA en qualité d'assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée consistent dans l'octroi de prêts à ses filiales et dans la concession de l'exploitation de marques commerciales lui appartenant ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs même pas allégué que la société LAGARDERE SCA aurait développé ses activités économiques auprès des sociétés dans lesquelles les participations ont été prises par ses filiales ; que les dépenses de conseils, qui avaient pour objet la définition stratégique des activités des sociétés du groupe dont la société holding tête de groupe a la responsabilité, ont été engagées par la société LAGARDERE SCA dans le cadre de la détention de ses participations dans les filiales du groupe et ne peuvent donc être regardées comme correspondant à une activité économique comprise dans le champ d'application de la taxe, alors même que ces dépenses ont été refacturées aux filiales ayant réalisé les prises de participation, conformément au principe selon lequel les transactions entre sociétés liées doivent s'effectuer selon les conditions normales de marché ; qu'ainsi, les recettes résultant de la refacturation des frais de conseil litigieux ne correspondent pas à une opération économique effectuée par un assujetti agissant en tant que tel et comprise dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, à inscrire par la société requérante au numérateur et au dénominateur du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ;

5. Considérant, en second lieu, que la société LAGARDERE SCA fait valoir qu'elle a facturé la taxe sur la valeur ajoutée à ses filiales au titre des frais de conseil litigieux et qu'elle a déduit la taxe ayant grevé les frais facturés par les prestataires ; que toutefois seules les opérations comprises dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée sont susceptibles d'ouvrir un droit à déduction en vertu de l'article 271 du code général des impôts précité ; qu'au contraire, ne peuvent être regardées comme ouvrant droit à déduction, les opérations, qui, comme en l'espèce, ne sont pas comprises dans le champ d'application de la taxe, nonobstant les circonstances que le contribuable l'a facturée à ses filiales et que le service n'a pas cru devoir remettre en cause la déduction de cette taxe ; que la société LAGARDERE SCA ne saurait valablement se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de la documentation administrative référencés 3 A 1141 n°12 et 3 A 1112 n°9 du 20 octobre 1999, 3 D 171 n°12 et 3 B 1112 du 18 septembre 2000 n°24 et 26 et 3 B 1112 du 18 septembre 2000 n°24 et 26, qui ne comportent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il vient d'être fait application ; qu'ainsi, la société LAGARDERE SCA n'est pas fondée à soutenir que les recettes résultant des refacturations à ses filiales de frais de conseil litigieux correspondraient à des opérations ouvrant droit à déduction, au sens et pour l'application de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, à inscrire au numérateur et au dénominateur de son prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ses achats de biens et services à utilisation mixte ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société LAGARDERE SCA n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société LAGARDERE SCA est rejetée.

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N° 15VE00304 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00304
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions - Biens ou services ouvrant droit à déduction.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Nicolas CHAYVIALLE
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-12-31;15ve00304 ?
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