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15/10/2015 | FRANCE | N°14VE00129

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 15 octobre 2015, 14VE00129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SEB INVESTMENT GmbH a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge de la contribution exceptionnelle de 5% mise à sa charge, au titre de l'exercice clos en 2011, en application de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts.

Par une ordonnance n° 1308391 en date du 15 novembre 2013, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande pour irrecevabilité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoi

res, enregistrés les 14 janvier, 2 juillet et 26 novembre 2014 et le 8 juin 2015, la société SEB...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SEB INVESTMENT GmbH a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge de la contribution exceptionnelle de 5% mise à sa charge, au titre de l'exercice clos en 2011, en application de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts.

Par une ordonnance n° 1308391 en date du 15 novembre 2013, le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande pour irrecevabilité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 14 janvier, 2 juillet et 26 novembre 2014 et le 8 juin 2015, la société SEB INVESTMENT GmbH, représentée par Me F..., demande à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° de prononcer la décharge de la contribution exceptionnelle de 5% mise à sa charge, au titre de l'exercice clos en 2011, en application de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts, pour un montant de 1 108 848 euros ;

3° d'ordonner le remboursement de cette somme assortie des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande était recevable, M. A...B...et Mme D...E...avaient qualité pour agir du seul fait de leur inscription en tant que dirigeants en France de la succursale de la société SEB INVESTMENT GmbH sur l'extrait Kbis conformément aux dispositions de l'article R. 123-38 9° du code de commerce ;

- seul le chiffre d'affaires afférent aux opérations réalisées en France doit être pris en compte afin de déterminer le franchissement du seuil de 250 millions d'euros prévu par les dispositions de l'article 235 Ter ZAA du code général des impôts, comme le Conseil d'Etat l'a déjà jugé concernant la détermination du chiffre d'affaires pour les besoins de l'impôt forfaitaire annuel ;

- le produit de la cession d'un ensemble immobilier, immobilisé dans ses comptes, réalisé par la succursale française au titre de l'exercice clos en 2011 n'est pas constitutif d'un chiffre d'affaires au sens de l'article 235 Ter ZAA du code général des impôts pour une entreprise étrangère, seul le chiffre d'affaires afférent aux opérations réalisées en France est à prendre en compte ;

- l'administration a clairement établi, dans sa documentation du 9 avril 2013 référencée BOI-IS-AUT-20 n°100, qu'il n'est pas tenu compte des produits financiers sauf dans le cas où la règlementation particulière propre à certains secteurs d'activité le prévoit, ne des recettes revêtant un caractère exceptionnel comme c'est le cas des produits provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé ;

- la position du ministre crée une discrimination au désavantage des sociétés étrangères ayant souhaité exercer leurs activités en France via un simple établissement stable par rapport à celles ayant décidé d'y exercer leurs activités via une filiale établie en France et, est donc constitutive d'une violation manifeste du principe de liberté d'établissement prévu à l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre la France et la République fédérale d'Allemagne tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, du 21 juillet 1959 ;

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Van Muylder,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., pour la société SEB INVESTMENT GmbH.

1. Considérant que la société SEB INVESTMENT GmbH, société de droit allemand qui investit des biens immobiliers en France à usage de bureaux pour la location par l'intermédiaire d'une succursale établie en France, relève appel de l'ordonnance en date du 15 novembre 2013 par laquelle le président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de la contribution exceptionnelle de 5% mise à sa charge, au titre de l'exercice clos en 2011, en application de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts, pour irrecevabilité ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4º Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque (...) elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens " ; qu'aux termes de l'article R. 431-3 du même code : " les dispositions du 1er alinéa de l'article R. 431-2 ne sont pas applicables : (...) 2° Aux litiges en matière de contributions directes, de taxes sur le chiffre d'affaires et de taxes assimilées (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 431-4 de ce code : " Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir " ; qu'aux termes de l'article R. 612-1 du code de justice administrative : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser " ; que la qualité pour agir au nom d'une société étrangère s'apprécie au regard du droit de l'Etat auquel appartient cette société ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...B...et Mme D...

E...étaient directeurs gérants de la société SEB INVESTMENT GmbH lorsqu'ils ont signé, le 31 juillet 2013, la demande présentée pour cette société au tribunal administratif de Montreuil et tendant à la décharge de la contribution exceptionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 ; que leurs fonctions les habilitaient à agir en justice sans mandat au nom de ladite société, conformément à la législation allemande ; que la société SEB INVESTMENT GmbH est, dès lors, fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la première chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande dont il était saisi comme signée d'une personne qui n'avait pas qualité pour agir faute de présentation d'un mandat pour représenter la société ; que cette ordonnance doit, par suite, être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société SEB INVESTMENT GmbH devant le tribunal administratif de Montreuil ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés en première instance et en appel :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 235 ter ZAA dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " I. Les redevables de l'impôt sur les sociétés réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'euros sont assujettis à une contribution exceptionnelle égale à une fraction de cet impôt calculé sur leurs résultats imposables, aux taux mentionnés à l'article 219, des exercices clos à compter du 31 décembre 2011 et jusqu'au 30 décembre 2013. / Cette contribution est égale à 5 % de l'impôt sur les sociétés dû, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature. / (...) Le chiffre d'affaires mentionné au premier alinéa du présent I s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de retenir le seul chiffre d'affaires qui se rattache aux bénéfices soumis en France à l'impôt sur les sociétés conformément à l'article 209 du code général des impôts aux termes duquel : " (...) les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France (...) ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (...) " ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 : " (...) 2° Sont considérés comme impôts visés par la présente convention : 1. En ce qui concerne la République française : (...) c. L'impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 de la même convention : " 1° Pour l'application de la présente convention : (...) 7. Le terme " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité (...) " ; qu'enfin, selon l'article 4 de la même convention : " 1. Les bénéfices d'une entreprise de l'un des Etats contractants ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'effectue des opérations commerciales dans l'autre Etat par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise effectue de telles opérations commerciales, l'impôt peut être perçu sur les bénéfices de l'entreprise dans l'autre Etat, mais uniquement dans la mesure où ces bénéfices peuvent être attribués audit établissement stable. Cette fraction des bénéfices n'est pas imposable dans le premier mentionné des Etats contractants (...) " ; qu'il résulte des stipulations précitées de la convention fiscale franco-allemande que les bénéfices réalisés par une société allemande qui dispose en France d'une installation fixe présentant les caractéristiques d'un établissement stable ne sont imposables en France que dans la mesure où ils peuvent être attribués à cet établissement stable ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour assujettir la société

SEB INVESTMENT GmbH qui dispose d'un établissement stable en France, à la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011, l'administration a tenu compte de l'ensemble du chiffre d'affaires de la société réalisé en France et hors de France s'élevant à 358 070 932 euros ; qu'il est constant que le chiffre d'affaires imputable à la succursale française de la société SEB INVESTMENT GmbH était, au cours de l'exercice clos en 2011, inférieur au seuil d'assujettissement de 250 millions d'euros ; qu'il suit de là que l'administration ne pouvait assujettir la société SEB INVESTMENT GmbH à la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés prévue par les dispositions précitées de l'article 235 Ter ZAA du code général des impôts ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SEB INVESTMENT GmbH est fondée à demander la décharge de la contribution exceptionnelle de 5% mise à sa charge au titre de l'exercice clos en 2011 en application de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts ; que cette décharge sera nécessairement assortie des intérêts moratoires dus en vertu de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, les conclusions tendant au versement desdits intérêts sont sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société SEB INVESTMENT GmbH et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1308391 en date du 15 novembre 2013 du président de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Montreuil est annulée.

Article 2 : La société SEB INVESTMENT GmbH est déchargée de la contribution exceptionnelle de 5% mise à sa charge au titre de l'exercice clos en 2011 en application de l'article 235 ter ZAA du code général des impôts.

Article 3 : L'Etat versera à la société SEB INVESTMENT GmbH une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société SEB INVESTMENT GmbH est rejeté.

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N° 14VE00129


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00129
Date de la décision : 15/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôts et prélèvements divers sur les bénéfices.

Procédure - Introduction de l'instance - Qualité pour agir - Représentation des personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Céline VAN MUYLDER
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : A.A.R.P.I. GIDE-LOYRETTE-NOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-10-15;14ve00129 ?
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