La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2015 | FRANCE | N°14VE03397

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 14 avril 2015, 14VE03397


Vu, I, sous le n° 14VE03397 la requête enregistrée le 10 décembre 2014, présentée par le PREFET DES YVELINES qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1400103 du

16 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du

9 décembre 2013 refusant à Mme B...A...la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'arrêté méconnaît le 1

1° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'as...

Vu, I, sous le n° 14VE03397 la requête enregistrée le 10 décembre 2014, présentée par le PREFET DES YVELINES qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1400103 du

16 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du

9 décembre 2013 refusant à Mme B...A...la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'arrêté méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en se référant au certificat médical du docteur Kamenicki du 19 décembre 2013 qui précise que la maladie de Mme A...l'oblige à un suivi prolongé en France, impossible à effectuer dans son pays d'origine ; en effet, ce certificat ne suffit pas à remettre en cause les termes de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé qui indique, au vu du dossier de l'intéressée et des données précises et actualisées dont il disposait sur la situation sanitaire du pays d'origine, que, si l'état de santé de MmeA... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe dans le pays dont l'intéressée est originaire un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ;

..........................................................................................................

Vu, II, sous le n° 14VE03408, la requête enregistrée le 12 décembre 2014, présentée par le PREFET DES YVELINES, qui demande à la Cour d'ordonner en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative qu'il soit sursis à exécution du jugement n° 1400103 du 16 octobre 2014 ;

Il soutient qu'il a présenté dans sa requête d'appel n° 14VE03397 des moyens sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement et le rejet des conclusions d'annulation qu'il a accueillies ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis médicaux rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2015 :

- le rapport de M. Bergeret, président assesseur ;

- et les observations de MeC..., pour MmeA... ;

1. Considérant que Mme B...A..., ressortissante chinoise née le 5 août 1962, qui déclare être entrée en France au cours de l'année 2002 et dont la demande de reconnaissance du statut de réfugiée a été définitivement rejetée le 28 novembre 2007, a bénéficié, à la suite de sa demande formée le 14 février 2010, d'un titre de séjour délivré sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable jusqu'au 11 octobre 2012 ; qu'au vu de l'avis défavorable émis le 10 juillet 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé, le PREFET DES YVELINES a rejeté, le 9 décembre 2013, sa demande de renouvellement de ce titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ; que le Tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté par jugement du 16 octobre 2014 ; que, par requêtes enregistrées sous les n° 14VE03397 et 14VE03408, le PREFET DES YVELINES demande, respectivement, l'annulation et le sursis à l'exécution de ce jugement ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes, relatives au même jugement, pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

3. Considérant que, selon l'avis émis le 10 juillet 2013 par le médecin inspecteur désigné par le directeur de l'agence régionale de santé, au vu duquel le préfet a pris l'arrêté en litige, l'état de santé de Mme A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais l'intéressée peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il est constant que Mme A...présente un diabète de type 1 nécessitant une insulinothérapie quotidienne et un suivi médical rapproché ; que, si le certificat médical du 19 décembre 2013 produit au dossier, établi par un chef de clinique du centre hospitalier de Bicêtre, indique que " l'arrêt du traitement pourrait engager son pronostic vital étant donné l'absence habituelle de disponibilité d'insuline dans son pays ", cette pièce ne suffit pas, eu égard aux données actualisées de la situation sanitaire en Chine relatives à la présence d'insulines récentes, relatées notamment par un article publié dans l'édition du 12 juillet 2012 du magazine de la presse économique et professionnelle " Usine Nouvelle " produit par le préfet à l'appui de sa requête en appel, à infirmer l'appréciation portée le 10 juillet 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé reconnaissant la disponibilité en Chine d'un traitement approprié à l'état de santé de l'intéressée, eu égard aux progrès réalisés dans ce pays, depuis à tout le moins l'année 2010 au cours de laquelle ce même médecin avait émis un avis en sens inverse ; qu'ainsi, le PREFET DES YVELINES est fondé à soutenir que son arrêté du 9 décembre 2013 n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif en a prononcé l'annulation pour ce motif ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A...tant en première instance qu'en appel ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que si Mme A...a soutenu devant le tribunal administratif qu'en l'absence de communication de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, la régularité de cet avis ne pouvait être vérifiée, elle n'a pas précisé, après le versement de cette pièce au dossier de première instance, de quelle irrégularité cet avis pourrait être entaché ; que, dans ces conditions, le moyen ainsi soulevé ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'examen de l'arrêté attaqué que le PREFET DES YVELINES, après avoir visé notamment le 11° de l'article L. 313-11 et l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et mentionné les termes de l'avis défavorable émis par le médecin de l'agence régionale de santé, a fait état de la situation personnelle de la requérante, divorcée, dont le fils unique, les parents et les deux frères ou soeurs résident en République populaire de Chine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans au moins ; qu'ainsi, le préfet, alors même qu'il n'a pas repris l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de MmeA..., s'est livré à un examen personnalisé de la situation de l'intéressée et ne s'est pas cru tenu par le sens de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé ; que, par suite, les moyens tirés de l'absence d'examen particulier de la demande et de l'incompétence négative doivent être écartés ;

7. Considérant, enfin, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3. que Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne pourrait recevoir les soins qui lui sont nécessaires dans son pays d'origine ; qu'elle ne justifie pas, si ce n'est par la production de bulletins de salaires d'un restaurant parisien l'ayant employée à temps partiel comme plongeuse polyvalente, de son intégration à la société française et n'apporte aucune précision relative aux modalités de son séjour en France depuis l'année 2002, date alléguée de son entrée sur le territoire, ou depuis 2005, année de sa dernière entrée sur le territoire selon les termes de sa demande de renouvellement de son titre de séjour ; qu'il ressort en revanche des pièces du dossier que son enfant unique, ses parents et ses deux frères ou soeurs résident en Chine ; que, dans ces conditions, Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'en rejetant sa demande de renouvellement de titre de séjour, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de l'ensemble des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle, alors, par ailleurs, qu'elle ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est constant que sa demande ne se fondait pas sur ces dispositions ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, que Mme A...n'établit pas l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; que, dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, soulevé à l'appui des conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que, dès lors qu'un traitement approprié existe dans le pays d'origine de l'intéressée, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

10. Considérant, enfin, que si Mme A...soutient résider en France de manière habituelle depuis 2002 ou 2005, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle verse au dossier et n'apporte aucune précision relative aux modalités de son séjour dans ce pays, ainsi qu'il a été dit au point 7. ; qu'elle est célibataire et sans charge de famille en France ; qu'elle ne justifie pas de l'absence d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident, ainsi qu'il vient d'être dit, son fils, ses parents et ses deux frères ou soeurs et où elle a elle-même vécu au moins jusqu'à l'âge de quarante ans ; qu'elle ne justifie pas, ni même n'allègue, avoir noué en France des liens personnels particulièrement intenses ; que, dans ces conditions, la décision par laquelle le PREFET DES YVELINES l'a obligée à quitter le territoire n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, elle ne peut être regardée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES YVELINES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 9 décembre 2013 ;

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

12. Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête n° 14VE03397 tendant à l'annulation du jugement attaqué et au rejet des conclusions d'annulation de l'arrêté contesté, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 14VE03408 tendant au sursis à l'exécution de ce jugement ;

Sur les conclusions de Mme A...aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme A...doivent être rejetées ; que, par ailleurs, Mme A...étant la partie perdante au sens des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400103 du Tribunal administratif de Versailles du 16 octobre 2014 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif de Versailles et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 14VE03408 aux fins de sursis à exécution du jugement précité du Tribunal administratif de Versailles.

''

''

''

''

7

2

N° 14VE03397...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE03397
Date de la décision : 14/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : STAMBOULI ; STAMBOULI ; STAMBOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-04-14;14ve03397 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award