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31/03/2015 | FRANCE | N°14VE01317

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 31 mars 2015, 14VE01317


Vu la décision n° 362686, 362687 du 30 avril 2014 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de deux pourvois présentés par le ministre de l'économie et des finances, a d'une part, annulé les arrêts n° 10VE03241 et 11VE00278 en date du 3 juillet 2012 par lesquels la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les recours du ministre tendant à l'annulation des jugements n° 0801134 du 18 mai 2010 et n° 0809640 du 23 novembre 2010 par lesquels le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS GRANDS MAGASINS GALERIES LAFAYETTE de la cotisation minima

le de taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujett...

Vu la décision n° 362686, 362687 du 30 avril 2014 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de deux pourvois présentés par le ministre de l'économie et des finances, a d'une part, annulé les arrêts n° 10VE03241 et 11VE00278 en date du 3 juillet 2012 par lesquels la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les recours du ministre tendant à l'annulation des jugements n° 0801134 du 18 mai 2010 et n° 0809640 du 23 novembre 2010 par lesquels le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS GRANDS MAGASINS GALERIES LAFAYETTE de la cotisation minimale de taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie au titre des années 2004 et 2005 et prononcé la restitution de celle acquittée au titre de l'année 2006 et, d'autre part, renvoyé les affaires à la Cour où elles ont été enregistrées sous les n° 14VE01317 et 14VE01318 ;

Vu, I°, le recours, enregistré le 4 octobre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 14VE01317, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0801134 du 18 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette de la cotisation minimale de taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie au titre de l'année 2006 ;

2° de rétablir la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette au rôle de la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre de l'année 2006 à concurrence de la réduction prononcée en première instance ;

Le ministre soutient que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette est redevable de la cotisation minimale de taxe professionnelle en vertu des dispositions des article 1647 E et 1447 du code général des impôts car elle exerce à titre habituel une activité professionnelle de location d'immeubles ; en effet, si la restructuration de juin 2003 a eu pour objet de dissocier le patrimoine foncier (immeubles et agencements), resté propriété de la société mère, des fonds de commerce cédés à deux filiales (SA Magasins Galeries Lafayette et SA Les Galeries) détenues à 100%, qui deviennent locataires de ces immeubles et agencements, c'est toujours la société mère qui détermine les orientations de la politique du groupe, notamment en ce qui concerne les modalités de mise en oeuvre des moyens mobilisés ; la restructuration n'a pas modifié l'objet et la destination des actifs fonciers ; la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette n'a nullement le rôle passif d'un gestionnaire civil d'immeubles se bornant à percevoir des rentes foncières en contrepartie de concessions de jouissance d'actifs indifférenciés à des preneurs quelconques ; les concessions de jouissance ne sont en l'espèce que les modalités juridiques d'une stratégie économique d'ensemble visant à assurer la continuité d'exploitation du groupe, et non pas à assurer la simple gestion patrimoniale de ses biens ; ainsi, les contrats de location stipulent que les locaux seront obligatoirement exploités sous l'enseigne Galeries Lafayette, que les sous-locations ne pourront être conclues qu'à l'égard du GIE Cofinoga ou de Galeries Lafayette Voyages, membres du groupe Galeries Lafayette, que le droit au bail ne pourra être cédé qu'à l'acquéreur du fonds, qu'aucun dépôt de garantie ne sera exigé et que l'adhésion à l'association des commerçants est obligatoire ; plusieurs contrats de bail conviennent en outre d'un loyer qui ne représente pas nécessairement la valeur du marché ; enfin, les locations ne portent pas sur des locaux nus indifférenciés susceptibles d'une pluralité d'utilisations mais sur des établissements munis des agencements fixes nécessaires aux fonctions d'un grand magasin à l'identité caractérisée ;

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Vu, II°, le recours, enregistré le 14 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 14VE01318 , présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0809640 du 23 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

2° de rétablir la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette aux rôles de la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre des années 2004 et 2005 à hauteur des impositions initiales ;

Le ministre invoque les mêmes moyens que dans sa requête n° 14VE01317 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Bruno-Salel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., pour la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ;

1. Considérant que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande l'annulation des jugements des 18 mai et 23 novembre 2010 par lesquels le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 2004, 2005 et 2006 ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. " ; qu'aux termes de l'article 1647 D : " I. A compter de 1981, tous les redevables de la taxe professionnelle sont assujettis à une cotisation minimum établie au lieu de leur principal établissement (...) " ; que selon l'article 1647 E du même code : " I. La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. (... ) " ;

3. Considérant que la location d'un immeuble nu par son propriétaire ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens de ces dispositions sauf dans l'hypothèse où, à travers cette location, le bailleur ne se borne pas à gérer son propre patrimoine mais poursuit, selon des modalités différentes, une exploitation commerciale antérieure ou participe à l'exploitation du locataire ; qu'il en va de même lorsqu'un immeuble nu est donné en sous-location par une personne qui en dispose en vertu d'un contrat de crédit-bail ; que la circonstance que l'activité de location et sous-location d'immeubles nus est exercée de manière régulière, implique la mise en oeuvre de moyens matériels et intellectuels et s'exerce en concédant des avantages aux sociétés du même groupe est sans incidence à cet égard ;

4. Considérant qu'il est constant que, jusqu'en 2003, la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette était propriétaire des murs et des fonds de commerce exploités sous les enseignes Galeries Lafayette et Nouvelles Galeries, à l'exception du magasin du boulevard Haussman à Paris, et que les fonds étaient donnés en location-gérance à des sociétés du groupe Galeries Lafayette, la SAS Magasins Galeries Lafayette, la SAS Les Galeries, la Société des Grands Magasins " La Riviera ", la société des Etablissements du Capitole et la société rennaise de Grands Magasins ; que d'autres fonds de commerce du groupe étaient par ailleurs la propriété de la Société des Grands Magasins " La Riviera ", de la société des Etablissements du Capitole et de la société rennaise de Grands Magasins ; qu'à la suite d'une restructuration, en 2003, du groupe constitué entre ces sociétés, la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette a absorbé, par voie de fusion, la Société des Grands Magasins " La Riviera ", la société des Etablissements du Capitole et la société rennaise de Grands Magasins et récupéré les fonds dont celles-ci étaient propriétaires ; qu'elle a ensuite fait apport aux sociétés Magasins Galeries Lafayette et Les Galeries, qu'elle détient à 100%, des fonds de commerce des magasins des enseignes Galeries Lafayette et Nouvelles Galeries ; qu'elle est restée propriétaire, et à titre accessoire crédit-preneur, des immeubles dans lesquels les fonds apportés sont exploités, et a donné à bail ces immeubles aux sociétés Magasins Galeries Lafayette et Les Galeries ; qu'elle exerce par ailleurs une activité résiduelle de sous-location gérance de fonds de commerce ;

5. Considérant, en premier lieu, que le ministre fait valoir que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette loue des locaux munis des agencements fixes nécessaires aux fonctions d'un grand magasin, et non des locaux nus et qu'elle exerce par conséquent, par nature, une activité professionnelle ; que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette produit la liste comptable de ses immobilisations, non contestée, dont il ressort que les locaux sont pourvus, d'une part, d'ascenseurs, d'escalators, de vitres, de miroirs, d'installations sanitaires, de climatisation, de désenfumage, du chauffage central, d'appareils d'éclairage, de faux-plafonds et de rideaux métalliques qui sont des accessoires immobiliers de la construction et, d'autre part, de biens meubles tels que des pédales hold-up et systèmes anti-vol, enseignes, caissons lumineux, panneaux et consoles, cabines d'essayage, éléments décoratifs et meubles muraux, qui ne représentent, selon les bilans des sociétés locataires et les traités de fusion fournis par la société requérante, qu'environ 5% des mobiliers et agencements figurant à l'actif des sociétés locataires et exploitantes des magasins, et insusceptible, comme le souligne sans être contestée la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette, d'équiper à des fins d'activité commerciale les 50 magasins Galeries Lafayette concernés ; que, par suite, ces biens meubles ne constituent pas les aménagements sans lesquels l'exploitation des fonds de commerce à laquelle les locaux loués ou sous-loués par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette sont destinés n'est pas possible ; qu'ainsi, ces locaux, qui ne sont pas pourvus de l'essentiel du mobilier et du matériel nécessaire à l'exploitation des fonds de commerce, doivent être regardés, contrairement à ce que soutient le ministre, comme des immeubles nus ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que le ministre soutient que les baux consentis par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette à ses preneurs traduisent sa participation à l'exploitation des locataires ; que, toutefois, les seules circonstances que ces baux stipulent que les locaux seront obligatoirement exploités sous l'enseigne Galeries Lafayette, que les sous-locations ne pourront être conclues qu'à l'égard du GIE Cofinoga ou de Galeries Lafayette Voyages, membres du groupe Galeries Lafayette, que le droit au bail ne pourra être cédé qu'à l'acquéreur du fonds, que l'adhésion à l'association des commerçants est obligatoire et qu'elle traduisent des avantages consenties aux sociétés du groupe, ne permettent pas de regarder la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette comme participant à l'exploitation des locataires ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette a pour activité principale la location et, dans une moindre mesure, la sous-location en tant que crédit-preneur, des immeubles nus dont elle dispose, qu'elle donne à bail à ses filiales détenues à 100%, les sociétés Magasins Galeries Lafayette et Les Galeries, qui détiennent et exploitent les fonds de commerce qu'elle leur a cédés lors de la restructuration et qu'elle exploitait antérieurement sur le mode de la location-gérance ; que, toutefois, et contrairement aux allégations du ministre, l'appartenance d'une société mère à un groupe fiscal intégré, quels que soient les gains financiers et l'intérêt commun que cette situation puisse entraîner, ne saurait faire obstacle, en elle-même, à ce qu'elle puisse effectuer une gestion patrimoniale autonome des biens qu'elle possède en les louant ou en les sous-louant comme locaux nus ; que la seule circonstance que la dissociation, lors de la restructuration, entre les actifs fonciers et ceux de l'exploitation commerciale n'aurait pas eu pour effet de modifier l'objet et la destination de ces actifs ni la finalité de l'activité poursuivie par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ne permet pas de regarder cette société comme poursuivant, selon des modalités différentes, l'exploitation commerciale qu'elle assurait avant la restructuration ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'activité de location et de sous-location de locaux nus exercée par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens des dispositions de l'article 1447 du code général des impôts ; qu'il suit de là que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette pour l'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les recours n° 141317 et n°141318 du MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS sont rejetés.

Article 2 : Il est mis à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette et non compris dans les dépens.

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Nos14VE01317,14VE01318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01317
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-03 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE ; CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE ; CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-03-31;14ve01317 ?
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