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19/03/2015 | FRANCE | N°13VE01951

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 19 mars 2015, 13VE01951


Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Combenègre, avocat ; Mme A... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1103850 en date du 28 février 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles lui a enjoint de procéder à l'enlèvement de son bateau " Syva " du domaine public fluvial, dans un délai de 90 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et a autorisé l'établissement public Voies navigables de France (VNF)

à procéder, le cas échéant, à l'enlèvement d'office dudit bateau ;

2° d...

Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Combenègre, avocat ; Mme A... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1103850 en date du 28 février 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles lui a enjoint de procéder à l'enlèvement de son bateau " Syva " du domaine public fluvial, dans un délai de 90 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et a autorisé l'établissement public Voies navigables de France (VNF) à procéder, le cas échéant, à l'enlèvement d'office dudit bateau ;

2° d'enjoindre à Voies navigables de France de l'inscrire sur la liste d'attente en vue de l'obtention d'un emplacement sur le domaine public fluvial pour son bateau " Syva ", avec effet au 12 janvier 2007 ;

3° de condamner Voies navigables de France aux dépens ;

4° de mettre à la charge de Voies navigables de France une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

Quant à la régularité du jugement :

- la procédure suivie par le premier juge a méconnu le principe du contradictoire, dès lors que la note en délibéré présentée par Voies navigables de France, dont il a " pris connaissance ", ne lui a pas été communiquée ;

- le jugement est irrégulier, pour insuffisance de motivation et omission à statuer, le premier juge ayant estimé à tort que les moyens tirés de l'illégalité des motifs du refus d'autorisation et du détournement de pouvoir étaient inopérants ;

Quant au fond :

- les poursuites de Voies navigables de France sont dénuées de fondement légal dès lors que les dispositions de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques étant de nature pénale, elles sont d'interprétation stricte ; en jugeant que ledit article s'applique aux bateaux-logements " quand bien même il ne les mentionne pas expressément ", le premier juge a méconnu ce principe d'interprétation stricte des dispositions pénales, ainsi que le principe de légalité des infractions et des peines ;

- dès lors que sa situation ne relève pas de l'article L. 2132-9 susmentionné, l'injonction qui lui est faite d'évacuer l'emplacement litigieux n'est pas fondée ;

- pour la même raison, l'administration ne peut être autorisée à procéder à l'enlèvement d'office dudit emplacement ; cet enlèvement d'office constituerait une voie de fait, et l'autorisation d'y procéder porte atteinte à son droit de propriété tel qu'il est reconnu par l'article 544 du code civil ;

- Voies navigables de France, dans sa gestion du domaine public fluvial dont il a la charge et notamment dans la gestion de la procédure d'attribution des emplacements disponibles, a manqué à son obligation de bonne foi et d'impartialité, et a de ce fait commis une faute ;

- l'attitude de Voies navigables de France, influencée par l'hostilité personnelle à son encontre des propriétaires des bateaux voisins du sien, est entachée d'un détournement de pouvoir ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu le code civil ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code pénal ;

Vu la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 portant dispositions diverses en matière de transports ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2015 :

- le rapport de Mme Boret, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Lepetit-Collin, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 mars 2015, présentée pour MmeA... ;

1. Considérant que par procès-verbal dressé par un agent assermenté de

Voies navigables de France le 24 janvier 2011, il a été constaté que le bateau " Syva " appartenant à Mme A...stationnait sans autorisation sur la rive gauche de la Seine, au point kilométrique (PK) 51, sur le territoire de la commune de Port-Marly ; que, le 3 juin 2011, l'établissement public Voies navigables de France (VNF) a adressé au Tribunal administratif de Versailles ce procès-verbal de contravention de grande voirie régulièrement notifié à Mme A... ; que Mme A... relève appel du jugement du 28 février 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles, après avoir jugé que l'action pénale était prescrite, a, statuant sur l'action domaniale, enjoint à Mme A...d'évacuer son bateau " Syva " du domaine public fluvial dans un délai de 90 jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et a autorisé VNF, en cas d'inexécution de cette injonction, à procéder d'office, aux frais du contrevenant, à l'évacuation dudit bateau du domaine public fluvial ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les moyens soulevés par Mme A...devant le tribunal tirés, d'une part, du caractère infondé du refus d'autorisation de stationnement qui lui a été opposé par Voies navigables de France et, d'autre part, du détournement de pouvoir, sont sans influence sur la légalité des poursuites pour contravention de grande voirie, dès lors que la constatation du stationnement non autorisé du bateau de Mme A...sur le domaine public fluvial constitue en elle-même ladite contravention ; qu'en s'abstenant de répondre à ces moyens, qui étaient inopérants, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité, lequel est, en outre, suffisamment motivé ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous " ; qu'aux termes de l'article L. 2132-9 dudit code : " Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial. Le contrevenant est passible d'une amende de 150 à 12 000 euros, de la confiscation de l'objet constituant l'obstacle et du remboursement des frais d'enlèvement d'office par l'autorité administrative compétente " ;

4. Considérant qu'il ressort de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que le bateau " Syva " appartenant à Mme A...était stationné sans autorisation, au moment de la constatation de l'infraction en cause le 24 janvier 2011, sur les berges de la Seine, au PK 51 sur le territoire de la commune de Port-Marly ; que la présence de ce bateau, quel que soit son usage, constituait un " empêchement ", au sens des dispositions précitées de l'article L. 2132-9, sur le domaine public fluvial ; qu'il en est ainsi quand bien même ce stationnement ne ferait pas obstacle à l'usage de la voie navigable et de ses dépendances et alors même que le bateau en cause serait doté des autorisations requises pour naviguer au titre de la police de la navigation ; que par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'action domaniale à son encontre est dépourvue de fondement légal au regard des articles L. 2122-1 et L. 2132-9 précités et méconnaîtrait, par voie de conséquence, les articles 8 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et les dispositions des articles 111-3 et 111-4 du code pénal ; qu'en tout état de cause, les moyens tirés du détournement de pouvoir et de la faute de Voies navigables de France dans la gestion du domaine public fluvial sont sans incidence sur le présent litige dès lors que la matérialité des faits rappelés ci-dessus, constitutifs d'une contravention de grande voirie, n'est pas contestée et que les différentes circonstances invoquées par Mme A...ne sauraient être assimilées à un fait de l'administration de nature à l'exonérer de la contravention constatée ;

5. Considérant qu'enfin, il résulte de ce qui précède et notamment des pouvoirs conférés à VNF par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991 en matière de contravention de grande voirie sur le domaine public fluvial que la requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 544 du code civil seraient méconnues en tant que le jugement autorise cet établissement public à faire procéder d'office à l'enlèvement de son bateau ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles lui a enjoint, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de faire cesser le stationnement sans autorisation de son bateau " Syva " sur le domaine public fluvial dans un délai de 90 jours, et a autorisé Voies navigables de France, en cas d'inexécution de cette injonction, à procéder d'office, aux frais du contrevenant, à l'évacuation dudit bateau du domaine public fluvial ; que dès lors, les conclusions présentées à fin d'injonction en ce qu'elles concernent tant sa demande de réinscription sur la liste d'attente que le remboursement des astreintes mises à sa charge ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

8. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de Voies navigables de France, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

9. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par Voies navigables de France ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par Voies navigables de France au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13VE01951 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE01951
Date de la décision : 19/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle BORET
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : COMBENEGRE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-03-19;13ve01951 ?
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