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17/02/2015 | FRANCE | N°14VE00237

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 17 février 2015, 14VE00237


Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014, présentée pour la SELARL

GRAVE-RANDOUX en sa qualité de mandataire liquidateur de la société FOCAST PICARDIE, dont le siège est 2 pl des Campions à Saint Quentin (02100), par la Lexom avocats ;

La société FOCAST PICARDIE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1104876 du 7 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 mars 2010 par laquelle l'inspection du travail a autorisé le transfert du contrat de travail de M. A.

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2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

Elle soutient que :

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Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014, présentée pour la SELARL

GRAVE-RANDOUX en sa qualité de mandataire liquidateur de la société FOCAST PICARDIE, dont le siège est 2 pl des Campions à Saint Quentin (02100), par la Lexom avocats ;

La société FOCAST PICARDIE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1104876 du 7 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 mars 2010 par laquelle l'inspection du travail a autorisé le transfert du contrat de travail de M. A... ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

Elle soutient que :

- sa requête est bien recevable dès lors que la décision attaquée a eu pour effet de lui transférer le contrat de travail de M.A... ;

- la décision attaquée est intervenue au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le contradictoire, prescrit par les textes applicables, n'a pas été respecté à son endroit alors qu'il revenait à l'inspection du travail de se prononcer sur l'existence d'une entité économique autonome ;

- en l'espèce, il n'y avait pas entité économique autonome dès lors que, d'une part, il n'y a pas eu transfert d'éléments corporels significatifs et que, d'autre part, les activités de maintenance faisant l'objet du contrat d'externalisation du 20 janvier 2003 n'ont pas été reprises à l'issue de ce contrat mais confiées, après allotissement, à plusieurs autres entreprises ;

- la décision du 25 mars 2010 est entachée d'erreurs de fait car d'une part, il n'était pas dans son intention de reprendre en interne les activités de maintenance confiées jusqu'à la fin de l'année 2009 à la société Procomat et que, d'autre part, elle n'a pas repris les moyens d'exploitation de l'activité de maintenance ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2015 :

- le rapport de M. Meyer, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public ;

1. Considérant que par un contrat en date du 23 juin 2003, la société Baxi à externalisé les activités de maintenance industrielle de son site de Villeneuve-Saint-Germain en les confiant à la société Procomat pour une durée de sept années ; que ce contrat prévoyait le transfert à la société Procomat du personnel et des moyens matériels affectés à cette activité ; qu'en 2008, ce contrat a été au nombre des actifs de l'activité de fonderie de fonte que la société Baxi a apporté à la société FOCAST PICARDIE qui en est ainsi devenue partie ; que par un courrier daté du 29 janvier 2009, la société FOCAST Picardie a informé la société Procomat de son intention de ne pas renouveler le contrat du 23 juin 2003 qui pouvait faire l'objet d'une tacite reconduction ; que, par un courrier du 7 décembre 2009, elle a notifié à la société Procomat la liste des entreprises devant être chargées de prendre en charge les différents éléments de l'activité de maintenance qui avait fait l'objet du contrat du 23 juin 2003 ; que le 9 février 2010, le juge des référés du Conseil de prud'hommes de Soissons a ordonné à la société FOCAST PICARDIE de prendre en charge la rémunération de 22 salariés de la société Procomat qui étaient affectés à l'activité de son site de fonderie de fonte sur le fondement des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que, saisie d'une demande de la société Procomat en date du 5 février 2010, l'inspectrice du travail de la 4ème section des Yvelines a autorisé le transfert à la société FOCAST PICARDIE du contrat de travail de M.A..., délégué du personnel et membre du comité d'entreprise ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " ; qu'aux termes de l'article L. 2414-1 de ce code : " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu' il est investi de l'un des mandats suivants : (...) 2° Délégué du personnel ; 3° membre élu du comité d'entreprise (...) " ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 2421-9 du même code : " Lorsque l'inspecteur du travail est saisi d'une demande d'autorisation de transfert, en application de l'article L. 2414-1, à l'occasion d'un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, il s'assure que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire. " ;

3. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés protégés bénéficient d'une protection exceptionnelle instituée dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, afin d'éviter que ces salariés ne fassent l'objet de mesures discriminatoires dans le cadre d'une procédure de licenciement ou d'un transfert partiel d'entreprise ; que, dans ce dernier cas, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de transfert sur le fondement de l'article L. 2414-1 du code du travail, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier, d'une part, que sont remplies les conditions prévues à l'article L. 1224-1 du code du travail ; que cette dernière disposition ne s'applique qu'en cas de transfert par un employeur à un autre employeur d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise par le nouvel employeur ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif économique propre ; que le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un autre exploitant ; qu'il incombe, d'autre part, à l'autorité administrative de s'assurer que le transfert envisagé est dépourvu de lien avec le mandat ou l'appartenance syndicale du salarié transféré et que, ce faisant, celui-ci ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article R. 2421-17 de ce code, la procédure applicable en cas de demande d'autorisation de transfert d'un salarié protégé est notamment régie par les dispositions de l'article R. 2421-11 du même code qui prévoient que l'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire avant de rendre sa décision ; qu'il résulte de ces dispositions que cette procédure administrative, qui est instituée aux seules fins de s'assurer que le salarié protégé dont le transfert est demandé ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire, ne concerne que l'employeur qui demande l'autorisation et le salarié intéressé ; que, contrairement à ce que soutient la société FOCAST PICARDIE, s'il est loisible à l'inspecteur du travail de recueillir, au cours de son enquête, les observations de l'entreprise destinée à devenir l'employeur du salarié protégé en cas d'autorisation du transfert, aucune disposition réglementaire ni aucun principe ne lui impose de recueillir de telles observations avant de rendre sa décision ; que si, par une ordonnance du 9 février 2010, le juge des référés du Conseil de Prud'hommes de Soissons à mis à la charge de la société FOCAST Picardie l'exécution du contrat de travail de M.A..., cette ordonnance, qui a été ultérieurement annulée par un arrêt de la Cour d'appel d'Amiens du 29 juin 2010 devenu définitif sur ce point, ne pouvait avoir pour effet de transférer le contrat de travail de l'intéressé en l'absence d'une autorisation délivrée par l'inspection du travail ; qu'ainsi, seule la société Procomat avait, à la date de la décision du 25 mars 2010, la qualité d'employeur de M.A... ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'activité de maintenance industrielle des équipements de fonderie de fonte exploités par la société FOCAST PICARDIE était assurée par la société Procomat jusqu'au 31 décembre 2009 ; que 33 salariés étaient exclusivement affectés à cette activité au moyen de matériels qui avaient en partie été mis à sa disposition en vertu d'un contrat de prêt à la consommation conclu en exécution du contrat du 23 juin 2003 et d'un local également mis à la disposition des salariés affectés à cette activité par la société FOCAST ; qu'à l'issue de l'exécution du contrat du 23 juin 2003, devaient revenir à la société FOCAST l'usage du local affecté au personnel de maintenance ainsi que le stock de pièces de rechange et d'outils utilisés dans le cadre de cette activité ; qu'à supposer établie l'allégation de la société FOCAST PICARDIE selon laquelle elle n'aurait récupéré qu'un stock de pièces de rechange sans outillage, cette circonstance est sans incidence sur l'existence d'une entité économique autonome caractérisée en l'espèce, par un objectif et des moyens humains et matériels propres ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne peut y avoir transfert d'un contrat de travail lorsque l'entité économique autonome est scindée en plusieurs activités distinctes au sein de plusieurs entreprises différentes ; que, toutefois, si la société FOCAST PICARDIE a conclu au mois de décembre 2009 deux contrats avec les société Msi et Demousselle portant respectivement sur la maintenance électromécanique et la maintenance électrique du site industriel de Villeneuve-Saint-Germain, ces contrats, d'une durée d'un trimestre, ne couvraient qu'une partie des activités de maintenance assurées antérieurement par le société Procomat ; qu'au surplus, il ne ressort pas des pièces versées au dossier ni que d'autres contrats de maintenance auraient été conclus par la société FOCAST PICARDIE, ni que les contrats conclus en décembre 2009 auraient été renouvelés ; que, dans ces conditions, la société FOCAST PICARDIE doit être regardée comme ayant repris elle-même l'activité de maintenance industrielle de son site de fonderie de fonte, avec les moyens, humains et matériels, qui étaient ceux de la société Procomat ; que c'est ainsi à juste titre que l'inspectrice du travail a considéré que les conditions de mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail étaient remplies ;

7. Considérant, en dernier lieu, que si la société FOCAST PICARDIE soutient que contrairement à ce que l'inspectrice du travail a retenu dans les motifs de sa décision, elle ne souhaitait pas reprendre en interne l'activité de maintenance qui avait été confiée à la société Procomat à l'issue du contrat du 23 juin 2003 ; que cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision du 25 mars 2010 dès lors que le transfert des contrats de travail prévus à l'article L. 1224-1 s'opère de plein droit et n'est aucunement subordonné à l'accord des entreprises concernées ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELARL

GRAVE-RANDOUX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SELARL GRAVE-RANDOUX est rejetée.

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N° 14VE00237


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00237
Date de la décision : 17/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-075 Travail et emploi. Transferts.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Emmanuel MEYER
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : LEXOM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-02-17;14ve00237 ?
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