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30/12/2014 | FRANCE | N°13VE02347

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 30 décembre 2014, 13VE02347


Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour la CLINIQUE

SAINTE-ISABELLE, dont le siège est 24 boulevard du Château à Neuilly-sur-Seine (92200), par Me Cormier, avocat ;

La CLINIQUE SAINTE-ISABELLE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1207751 en date du 7 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France du 25 juin 2012 lui retirant l'autorisation d'exercer l'activité de traitement d

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Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour la CLINIQUE

SAINTE-ISABELLE, dont le siège est 24 boulevard du Château à Neuilly-sur-Seine (92200), par Me Cormier, avocat ;

La CLINIQUE SAINTE-ISABELLE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1207751 en date du 7 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France du 25 juin 2012 lui retirant l'autorisation d'exercer l'activité de traitement du cancer dans la pratique thérapeutique chirurgie des pathologies urologiques sur son site de Neuilly-sur-Seine à compter du 23 juillet 2012 ;

2° d'annuler ladite décision ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal a statué ultra petita ; elle n'a jamais contesté la décision du Directeur de l'Agence régionale de santé de lui retirer son autorisation d'activité de soins de traitement du cancer pour la chirurgie carcinologique gynécologique ;

- le constat du respect des conditions de fonctionnement aurait dû être fait dans le cadre d'une visite de conformité qui est un préalable à la mise en oeuvre de la procédure de suspension puis de retrait prévue à l'article L. 6122-13 du code de la santé publique ; la commission spécialisée de l'organisation des soins n'a pas été régulièrement consultée ; le quorum n'était pas atteint, les documents ont été présentés tardivement et manquaient d'objectivité ; le tribunal aurait dû sanctionner ces manquements au lieu d'estimer qu'ils étaient sans incidence sur la décision en litige et la régularité de la procédure suivie ; en ne l'invitant pas à présenter ses observations, l'ARS l'a privée de la garantie de se voir appliquer une procédure contradictoire ;

- les seuils minimaux d'activité de l'article R. 6123-89 et de l'article 3 du décret du 21 mars 2007 ne sont pas opposables aux établissements qui pratiquaient déjà la chirurgie des cancers ;

- le seuil dérogatoire prévu à l'article R. 6123-89 du code de la santé publique n'a pas été respecté alors qu'elle relevait de cette catégorie ; il est nécessairement prévisionnel ; le tribunal comme l'agence régionale de santé n'ont pas retenu pour leur calcul d'activité les bonnes périodes de référence ;

- les services de l'agence régionale de santé ont commis une erreur de droit en se bornant à retenir une moyenne des interventions de chirurgie ; cette erreur de droit aurait dû être sanctionnée, l'agence régionale de santé n'ayant jamais sollicité de substitution de motifs ; elle n'a pas été en mesure de discuter ce motif, soulevé d'office et a été privée d'une garantie ;

- à supposer que le Directeur de l'agence régionale de santé dispose du pouvoir de ne pas retirer l'autorisation en cas de manquements, il doit rapporter la preuve que l'offre de soin restante est suffisante pour couvrir les besoins de la population en matière de cancérologie ; il ne rapporte pas cette preuve ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;

Vu le décret n° 2007-388 du 21 mars 2007 ;

Vu l'arrêté ministériel du 29 mars 2007 fixant les seuils d'activité minimale annuelle applicables à l'activité de soins de traitement du cancer ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Orio, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE ;

1. Considérant que la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE, située à Neuilly-sur-Seine, qui pratiquait avant l'intervention du décret du 21 mars 2007 relatif aux conditions d'implantation applicables à l'activité de soins de traitement du cancer, la chirurgie des cancers pour le traitement des pathologies urologiques a obtenu, le 17 juillet 2009, de la commission exécutive de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France, en application de l'article 3 de ce décret, l'autorisation de poursuivre pour une durée de cinq ans l'activité de traitement du cancer pour les adultes en chirurgie des cancers urologiques sous réserve d'atteindre dans les dix-huit mois après la visite de conformité les seuils d'activité minima prévus par l'arrêté du 29 mars 2007 ; que cette autorisation a été étendue au traitement des cancers gynécologiques par décision du 24 novembre 2009 ; que le 25 juin 2012, l'agence régionale de santé a retiré les autorisations délivrées en 2009 ; que la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE interjette régulièrement appel du jugement en date du 7 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de retrait de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de traitement du cancer pour la chirurgie carcinologique urologique :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 6122-13 et R. 6123-89 du code de la santé publique que les manquements à la réglementation et, en particulier, le non respect des seuils d'activité minima prévus par l'arrêté du 29 mars 2007 ne peuvent être appréciés qu'après une visite de conformité mentionnée à l'article L. 6122-4 ; qu'aux termes de l'article D. 6122-38 : " (...) La visite est effectuée par au moins deux personnes désignées par le directeur de l'agence régionale de santé parmi les personnes mentionnées aux articles L. 1421-1 et L. 1435-7 et les praticiens conseils des régimes de base de l'assurance-maladie. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1435-7 du même code dans sa version applicable au litige : " Le directeur général de l'agence régionale de santé peut désigner, parmi les personnels de l'agence respectant des conditions d'aptitude technique et juridique définies par décret en Conseil d'Etat, des inspecteurs et des contrôleurs pour remplir, au même titre que les agents mentionnés à l'article L. 1421-1, les missions prévues à cet article (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1435-10 : " Lorsqu'il désigne des inspecteurs et des contrôleurs pour exercer les missions de contrôle prévues à l'article L. 1421-1 du présent code et à l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles, le directeur général de l'agence régionale de santé précise la nature des missions susceptibles de leur être confiées. " ; et qu'enfin, aux termes de l'article R. 1435-15 : " Un inspecteur ou un contrôleur ne peut exercer les missions mentionnées à l'article R. 1435-10 que s'il a suivi une formation d'au moins 120 heures dispensée conjointement par l'Ecole des hautes études en santé publique et par l'Ecole nationale supérieure de sécurité sociale et sanctionnée par un examen organisé par l'Ecole des hautes études en santé publique. (...) " ;

3. Considérant qu'alors que cette qualité est contestée, il ne ressort pas des pièces du dossier que le docteur Paulet, médecin de l'Agence régionale de santé, qui a réalisé la visite de conformité de la clinique requérante avec le docteur Lossouarn fasse partie des personnes mentionnées aux dispositions précitées de l'article R. 1435-15 du code qui ont qualité pour réaliser des visites de conformité ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 6122-13 du code de la santé publique : " I.-Lorsqu'il est constaté, à l'occasion de l'exercice d'une activité de soins ou de l'installation d'un équipement matériel lourd, un manquement aux lois et règlements pris pour la protection de la santé publique ou à la continuité des soins assurée par le personnel médical imputable à la personne titulaire de l'autorisation, le directeur général de l'agence régionale de santé le notifie à cette dernière et lui demande de faire connaître, dans les huit jours, ses observations en réponse ainsi que les mesures correctrices adoptées ou envisagées. / (...) S'il est constaté au terme de ce délai qu'il a été satisfait à la mise en demeure, le directeur général de l'agence régionale met fin à la suspension. / Dans le cas contraire et après avis de la commission spécialisée de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire, le directeur général de l'agence régionale de santé se prononce alors à titre définitif, soit sur le maintien de la suspension jusqu'à l'achèvement des mesures prévues, soit sur le retrait de l'autorisation ou sur la modification de son contenu. Il peut également assortir l'autorisation des conditions particulières mentionnées à l'article L. 6122-7. " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article D. 1432-32 du code de la santé publique : " L'assemblée plénière de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie réunit les membres des collèges définis à l'article D. 1432-28 ainsi que les membres mentionnés à l'article D. 1432-29. / (...) / Elle établit le règlement intérieur de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie qui précise, notamment, les modalités de fonctionnement de ses différentes formations. (...) " ; qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article D. 1432-50 du code de la santé publique : " Sauf urgence, les membres des différentes formations reçoivent dix jours au moins avant la date de la réunion, une convocation comportant l'ordre du jour et le cas échéant, les documents nécessaires à l'examen des affaires qui y sont inscrites " ; et qu'enfin, aux termes du règlement intérieur : " (...) Si pour des raisons très exceptionnelles, des rapports ou des documents devaient être déposés dans un délai inférieur à 4 jours avant la tenue de la réunion, ils seront transmis par mail aux membres pour éviter tout dépôt sur table le jour de la séance (...) " ;

5. Considérant que le dossier de la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE a été mis en ligne sur un serveur le 19 juin 2012 à 9 h31 soit seulement deux jours avant la séance du 21 juin 2012 en méconnaissance des dispositions règlementaires précitées ;

6. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;

7. Considérant que les vices précédemment décrits, affectant le déroulement de la procédure de retrait de l'autorisation d'exercer ont conduit à ce que la commission spécialisée de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire donne un avis sur un rapport communiqué tardivement et rédigé à la suite d'une visite de conformité qui n'avait pas été régulièrement effectuée ; que ces vices doivent être regardés, dans les circonstances de l'espèce où l'activité de la clinique était très proche du seuil d'activité permettant le maintien de l'autorisation, comme ayant été susceptibles d'exercer une influence sur le sens de l'avis de la commission puis sur la décision prise par le directeur général de l'ARS ; qu'ils ont en outre été de nature à priver la clinique d'une garantie ; qu'il en résulte que la décision en date du 25 juin 2012 en tant qu'elle emporte le retrait de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de traitement du cancer pour la chirurgie carcinologique urologique doit être annulée ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la CLINIQUE

SAINTE-ISABELLE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros que la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1207751 en date du 7 mai 2013 du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise et la décision du 25 juin 2012 en tant qu'elle emporte le retrait de l'autorisation d'exercer l'activité de soins de traitement du cancer pour la chirurgie carcinologique urologique sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la CLINIQUE SAINTE-ISABELLE est rejeté.

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N° 13VE02347 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE02347
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-07-01-05 Santé publique. Établissements privés de santé. Autorisations de création, d'extension ou d'installation d'équipements matériels lourds. Retrait des autorisations.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Eugénie ORIO
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS CORMIER- BADIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-12-30;13ve02347 ?
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