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18/11/2014 | FRANCE | N°14VE00593

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 18 novembre 2014, 14VE00593


Vu le recours, enregistré le 25 février 2014, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande à la Cour de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1210317 en date du

30 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à M. A...B...la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007 ;

Il soutient que :

- les conditions posées par l'article R. 811-5 du code de jus

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Vu le recours, enregistré le 25 février 2014, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande à la Cour de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1210317 en date du

30 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à M. A...B...la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007 ;

Il soutient que :

- les conditions posées par l'article R. 811-5 du code de justice administrative pour qu'il soit sursis à l'exécution du jugement en litige sont remplies ;

- en effet, d'une part, les moyens invoqués à l'appui du recours tendant à l'annulation de ce jugement sont sérieux dès lors que tous les avantages consentis par l'employeur à un salarié conservent la nature de compléments de salaires, en dépit de leur imposition selon des modalités dérogatoires plus favorables ; il suit de là qu'en jugeant que l'avantage défini à l'article 80 bis-I du code général des impôts, retiré par M.B..., alors résident belge, de l'exercice, en 2006 et 2007, des options d'achat d'actions à prix préférentiel attribuées entre 1998 et 2003 par le groupe Suez en sa qualité de dirigeant salarié du groupe exerçant en France, que l'intéressé a cédées immédiatement, n'avait pas le caractère de " salaires ou d'autres rémunérations analogues " et que ces gains n'étaient imposables qu'en Belgique en application de la convention fiscale franco-belge, le tribunal administratif s'est mépris sur la qualification juridique de ces revenus ;

- d'autre part, l'exécution du jugement exposerait l'Etat à un risque de perte définitive des impositions en litige et, par suite, à des conséquences difficilement réparables, dès lors que le contribuable n'est plus domicilié..., n'y exerce aucune activité professionnelle, ne possède aucun patrimoine susceptible de garantir le paiement des impositions, et ne dispose en France d'aucun compte bancaire ouvert à son nom ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2014 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Coudert, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., substituant MeD..., pour M. B... ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement " ; qu'aux termes de l'article R. 811-16 du même code : " Lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner sous réserve des dispositions de l'article R. 541-6 qu'il soit sursis à exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies " ; qu'enfin, en vertu de l'article R. 811-17 à ce code, le sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel peut, à la demande du requérant, être ordonné par la juridiction d'appel " si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables (...) " ;

2. Considérant que les demandes formées devant une juridiction d'appel sur le fondement des articles R. 811-15 à R. 811-17 du code de justice administrative sont présentées, instruites, jugées et, le cas échéant, susceptibles de recours selon des règles identiques et que, par suite, elles peuvent être présentées simultanément dans une même requête ; qu'en l'espèce, si, pour demander le sursis à l'exécution du jugement en litige, le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES invoque l'article R. 811-15 du code de justice administrative, alors que cette disposition ne s'applique pas aux jugements déchargeant un contribuable d'une imposition, le ministre fait également état du risque de perte définitive d'une somme ainsi que des conséquences difficilement réparables que l'exécution du jugement de décharge en litige ferait courir à l'Etat ; qu'il doit, par suite, être regardé comme invoquant également les articles

R. 811-16 et R. 811-17 précités ;

3. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M.B..., qui est de nationalité belge et réside aujourd'hui au Luxembourg, perçoit des revenus réguliers du Groupe Bruxelles Lambert dont le montant annuel net d'impôt s'est élevé, en 2013, à la somme de 820 000 euros, ainsi que des jetons de présence des sociétés françaises Lafarge, Legrand et Total, pour un montant net global de 225 900 euros ayant fait l'objet, au titre de la même année, de la retenue à la source prévue à l'article 119 bis du code général des impôts ; qu'il dispose, en outre, d'importantes liquidités dans les livres de la banque de droit belge Degroff, dont la valeur financière excède, à la même époque, quatre millions d'euros ; qu'ainsi, tant par leur montant que par leur nature, ces revenus et avoirs financiers sont suffisants pour procéder, le cas échéant, au règlement des créances fiscales en litige, lesquelles atteignent, majorations comprises,

48 422 euros pour 2006 et 1 774 263 euros pour 2007 ;

4. Considérant, d'autre part, que si l'administration se trouvait en situation de devoir poursuivre le recouvrement forcé de ces sommes, dont M. B...s'est acquitté à la suite de leur mise en recouvrement sans, d'ailleurs, solliciter le sursis de paiement mentionné à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, elle ne pourrait être regardée comme privée des moyens juridiques de contraindre le redevable à honorer sa dette fiscale dès lors que, outre la faculté de faire saisir ses revenus de source française, dans les conditions prévues aux articles 258 A et suivants du livre des procédures fiscales, le comptable public dispose désormais, s'agissant des revenus de source belge ou luxembourgeoise, de la faculté, prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010, transposée aux articles L. 283 A et suivants du même livre, de requérir l'assistance des autorités fiscales belges et luxembourgeoises, qui seraient tenues de la lui accorder, aux fins de faire procéder au recouvrement des créances fiscales exigibles depuis moins de cinq ans ; qu'à cette fin, il suffirait au comptable public d'accompagner sa demande de l'instrument uniformisé, prévu par l'article 12 de la directive, qui permet l'adoption de mesures exécutoires dans l'Etat membre requis, sans qu'aucun acte visant à le faire reconnaître, à le compléter ou à le remplacer soit même nécessaire dans cet Etat ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, dans les circonstances de l'espèce, il n'est pas avéré que l'exécution du jugement attaqué exposerait l'Etat à un risque de perte définitive d'une somme ou entraînerait pour lui des conséquences difficilement réparables au sens des articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative ; que, dans ces conditions, le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES n'est pas fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement, à M.B..., de la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 14VE00593 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00593
Date de la décision : 18/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Suspension sursis

Analyses

54-08-01-02-05 Procédure. Voies de recours. Appel. Conclusions recevables en appel. Conclusions à fin de sursis.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : BREDIN PRAT ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-11-18;14ve00593 ?
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