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23/10/2014 | FRANCE | N°13VE03716

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 23 octobre 2014, 13VE03716


Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2013, présentée pour la COMMUNE DE PANTIN, représentée par son maire, par Me Seban, avocat ; la COMMUNE DE PANTIN demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1301245 en date du 17 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du maire de la COMMUNE DE PANTIN en date du 10 septembre 2012, ensemble sa décision du 21 décembre 2012 rejetant le recours gracieux de la SCI Joutsen ;

2° de rejeter la demande de première instance de la SCI Joutsen ;

3° de mettre à la charge de la SC

I Joutsen la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de ju...

Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2013, présentée pour la COMMUNE DE PANTIN, représentée par son maire, par Me Seban, avocat ; la COMMUNE DE PANTIN demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1301245 en date du 17 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du maire de la COMMUNE DE PANTIN en date du 10 septembre 2012, ensemble sa décision du 21 décembre 2012 rejetant le recours gracieux de la SCI Joutsen ;

2° de rejeter la demande de première instance de la SCI Joutsen ;

3° de mettre à la charge de la SCI Joutsen la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en estimant " que la commune ne démontre pas davantage que cette préemption répondrait à un intérêt général suffisant, eu égard à ses caractéristiques et à son coût ", les premiers juges ont fait droit à un moyen qui n'avait pas été soulevé par la SCI requérante et ont ainsi dénaturé les pièces du dossier ;

- en estimant que la SCI Joutsen n'avait pas mis en oeuvre son droit de délaissement, le tribunal administratif a entaché le jugement attaqué d'une erreur de fait ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit en ce que, dès lors qu'il s'agissait de la mise en oeuvre du droit de délaissement et non d'une déclaration d'intention d'aliéner, il n'appartenait pas à la commune de motiver sa décision d'acquérir le bien dont s'agit en faisant valoir un projet précis ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit ; en effet, la légalité de la décision de classement de la parcelle en cause en emplacement réservé au plan local d'urbanisme ne saurait être remise en question dans le cadre d'un contentieux relatif à la légalité d'une décision d'acquisition ou d'une décision de préemption ;

- le projet d'aménagement était réel et présentait un caractère d'intérêt général, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2014 :

- le rapport de M. Malagies, président-assesseur,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la COMMUNE DE PANTIN ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la SCI Joutsen :

1. Considérant que contrairement à ce que soutient la SCI Joutsen, la COMMUNE DE PANTIN justifie avoir acquitté le timbre fiscal de trente-cinq euros conformément à ce que requièrent les dispositions de l'article 1635 bis Q du code général des impôts ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ;

2. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. " ; qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ; qu'en outre, la mise en oeuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, du rapport de présentation joint à la délibération du 22 septembre 2011 approuvant le plan local d'urbanisme modifié que l'objectif de l'emplacement réservé P 36, qui comprend le bien litigieux et dont il n'y a pas lieu de remettre en cause l'opportunité, est de désenclaver la zone d'activités dite de l'Ourq qui l'est " très fortement ", que " les projets de développement [de celle-ci] imposent de [la] faire évoluer et de renforcer le maillage viaire existant " et que " les points de raccordement envisageables imposent de prévoir ce périmètre de localisation de voies au contact des voies existantes " ; que l'arrêté précise, dans ses motifs, que des études portant notamment sur ce projet ont été " réalisées, à savoir l'étude TVK d'avril 2009 et l'étude menée par le cabinet Eva Samuel, études concluant sur la nécessité de créer des voiries publiques à l'échelle de P 26 " ; que la commune a produit en appel ces études ; que les indications ainsi fournies quant à l'objet en vue duquel la préemption litigieuse était exercée sont suffisamment précises ; que, par suite, et alors même que le tracé des futures voiries n'est pas déterminé avec exactitude, la COMMUNE DE PANTIN justifiait, à la date de l'arrêté de préemption, de la réalité d'un projet entrant dans les prévisions de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme et de son caractère d'intérêt général ; qu'elle est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a retenu le moyen tiré du défaut d'un tel projet pour annuler l'arrêté susvisé en date du 10 septembre 2012 ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par la SCI Joutsen devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1311-9 du code général des collectivités territoriales : " Les projets d'opérations immobilières mentionnés à l'article

L. 1311-10 doivent être précédés, avant toute entente amiable, d'une demande d'avis de l'autorité compétente de l'Etat lorsqu'ils sont poursuivis par les collectivités territoriales (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1311-10 du même code : " Ces projets d'opérations immobilières comprennent : / 1° (...) / 2° Les acquisitions à l'amiable, par adjudication ou par exercice du droit de préemption, d'immeubles(...) " ; qu'enfin aux termes de l'article L. 1311-11 de ce code : " Les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 1311-9 délibèrent au vu de l'avis de l'autorité compétente de l'Etat. " ;

6. Considérant que si la SCI Joutsen soutient que les dispositions de l'article L. 1311-11 du code précité ont été méconnues dès lors que l'avis du service des domaines ne figure pas dans l'arrêté du 10 septembre 2012 par lequel le maire de la COMMUNE DE PANTIN a décidé de préempter la parcelle cadastrée R 66 appartenant à cette société, il résulte des ces dispositions que l'obligation qu'elles prescrivent ne concerne qu'une délibération du conseil municipal relative à un projet d'acquisition et non l'arrêté décidant la préemption ; que si ledit arrêté était soumis à cette obligation par les dispositions de l'article R. 213-21 de ce code aux termes desquelles : " Le titulaire du droit de préemption doit recueillir l'avis du service des domaines sur le prix de l'immeuble dont il envisage de faire l'acquisition (...) ", il ressort de l'examen de la décision attaquée qu'elle vise l'avis des services fiscaux en date du 3 septembre 2012 ; que la commune a fait valoir sans être contestée que cet avis répondait à une lettre de saisine de la commune en date du 30 juillet 2012 ; qu'il s'ensuit que la première branche du moyen tiré de ce que le visa de l'avis ne figurerait pas dans la décision attaquée manque en fait ; que la seconde branche du moyen tiré de ce que le prix n'y figurerait pas davantage est inopérant dès lors qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne prescrit de mentionner l'estimation de France Domaine dans la décision de préemption ; que la seconde branche du moyen doit donc être elle aussi écartée ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 213-2 du code de l'urbanisme : " Toute aliénation visée à l'article L. 213-1 est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable faite par le propriétaire à la mairie de la commune où se trouve situé le bien. Cette déclaration, dont le maire transmet copie au directeur départemental des finances publiques, comporte obligatoirement l'indication du prix et des conditions de l'aliénation projetée, ou en cas d'adjudication, l'estimation du bien ou sa mise à prix. / (...) Le silence du titulaire du droit de préemption pendant deux mois à compter de la réception de la déclaration mentionnée au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / (...) " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, de la date du timbre de réception apposé le 17 juillet 2012 par les services de la COMMUNE DE PANTIN sur la déclaration d'intention d'aliéner adressée par la SCI Joutsen que la remise de l'acte par exploit d'huissier a été faite à cette dernière le 17 septembre 2012 ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la commune aurait signifié tardivement la décision attaquée manque en fait ;

9. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté attaqué vise tant les articles du code de l'urbanisme dont elle fait application et, notamment, les articles L. 210-1 et L. 300-1 de ce code que les délibérations du conseil municipal de la commune en date du 10 juillet 2006 qui, l'une, approuve le plan local d'urbanisme et l'autre le droit de préemption urbain sur l'ensemble des zones urbaines définies par ce plan et la délibération du même conseil en date du 25 novembre 2010 approuvant la modification n° 2 du plan ; qu'il contient également les éléments de fait nécessaires à l'identification et à la compréhension du projet concerné et notamment l'indication que la parcelle cadastrée section R 66 " est concernée par un emplacement réservé au PLU (P 26) pour la réalisation de voiries " et la référence aux " études réalisées portant notamment sur le périmètre P 26 (...) concluant sur la nécessité de créer des voies publiques " ; qu'il comporte ainsi l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivé ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort de la délibération du conseil municipal de la COMMUNE DE PANTIN en date du 16 mars 2008 que ce conseil délègue au maire " au nom de la commune [les] droits de préemption définis par le code de l'urbanisme, que la commune en soit titulaire ou délégataire " ; que ce faisant, et contrairement à ce que soutient la société requérante, il a suffisamment délimité l'étendue des pouvoirs délégués au maire ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que les deux délibérations susvisées du 10 juillet 2006 portent respectivement approbation du plan local d'urbanisme de la commune et du droit de préemption renforcé sur l'ensemble des zones urbaines définies dans ce document d'urbanisme ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la délibération instaurant le droit de préemption urbain au motif que celle-ci aurait été aurait été votée sous l'empire de l'ancien plan d'occupation des sols doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE PANTIN est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 17 octobre 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé l'annulation de l'arrêté de son maire en date du 10 septembre 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la SCI Joutsen le paiement à la COMMUNE DE PANTIN de la somme de 2 000 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens.

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE PANTIN qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SCI Joutsen demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Montreuil en date du 17 octobre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SCI Joutsen devant le Tribunal administratif de Montreuil est rejetée.

Article 3 : La SCI Joutsen versera à la COMMUNE DE PANTIN une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la SCI Joutsen tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13VE03716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE03716
Date de la décision : 23/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice.

Urbanisme et aménagement du territoire - Procédures d'intervention foncière - Préemption et réserves foncières - Droits de préemption.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Philippe MALAGIES
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : CABINET ARES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-10-23;13ve03716 ?
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