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02/10/2014 | FRANCE | N°12VE02901

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 02 octobre 2014, 12VE02901


Vu la requête, enregistrée le 1er août 2012, présentée pour la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, dont le siège est 86 rue d'Assas à Paris (75006), représentée par son gérant en exercice, par Me Jorion, avocat ;

La SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1104274 du 10 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bagnolet à réparer le préjudice subi à la suite des décis

ions des 7 mai 2008 et 24 décembre 2008 d'exercer le droit de préemption urbain...

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2012, présentée pour la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, dont le siège est 86 rue d'Assas à Paris (75006), représentée par son gérant en exercice, par Me Jorion, avocat ;

La SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1104274 du 10 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bagnolet à réparer le préjudice subi à la suite des décisions des 7 mai 2008 et 24 décembre 2008 d'exercer le droit de préemption urbain de la commune sur les biens sis 10 à 18 rue Paul Bert à Bagnolet ;

2° de faire droit à ses demandes et de condamner la commune de Bagnolet à lui verser la somme de 1 055 099,91 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2011 et assortie de la capitalisation des intérêts à compter de la date d'enregistrement de sa requête ;

3° de mettre à la charge de la commune de Bagnolet une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- par jugement définitif le Tribunal administratif de Montreuil a annulé les décisions de préemption des 7 mai et 24 décembre 2008 au motif que ces décisions ne reposaient pas sur un projet réel de nature à justifier une préemption et a considéré que ces illégalités constituaient des fautes de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- la commune a tout fait pour empêcher la vente en commettant une autre faute en tardant à délivrer le permis de construire dont la demande a été déposée le 9 février 2009 et en tardant à délivrer le certificat de permis de construire tacite, demandé le 13 mai 2009, qui n'a été délivré que le 5 octobre 2009 à la suite de la présentation d'un référé devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

- les conséquences dommageables de la préemption du 24 décembre 2008 doivent être indemnisées dès lors que, comme l'ont retenu la commune et les premiers juges, la réalisation de la vente était probable et que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les conséquences dommageables résultent directement de l'illégalité de la décision de préemption restée en vigueur jusqu'au 25 février 2010, l'absence de saisine par la commune du juge de l'expropriation étant sans portée dès lors que l'une des conditions suspensives posées par le compromis de vente n'était pas remplie ; l'absence de saisine du juge de l'expropriation est sans incidence sur le droit à indemnisation, dès lors que seule l'annulation de la décision de préemption rend au propriétaire sa liberté de vendre le bien et que le préjudice est indemnisable jusqu'à la date de vente effective du bien lorsqu'elle est intervenue dans un délai raisonnable ; si la date de renonciation constitue le terme éventuel de l'indemnisation, l'absence de renonciation ne constitue pas une condition de l'indemnisation ;

- à titre subsidiaire, ce n'est que le 23 février 2009 qu'elle a pris connaissance de la renonciation à saisir le juge de l'expropriation ; du fait du comportement de la commune s'agissant du permis de construire, la vente ne pouvait se faire dès lors qu'au 31 octobre 2009, la société ne pouvait justifier d'un permis de construire attesté par un certificat définitif ; la vente intervenue le 28 février 2011 est intervenue dans un délai raisonnable eu égard à la nature du bien, au sol pollué, au contexte général du marché de l'immobilier et alors que le jugement du 25 février 2010 annulant les décisions est devenu définitif le 10 mai 2010 ;

- le retard dans la vente au titre de l'année 2009 jusqu'au 28 février 2011 doit être indemnisé avec un taux d'intérêt majoré sur la base de 2 100 000 euros jusqu'au 25 janvier 2009 et sur la base de 2 300 000 euros pour la suite de la période, déduction faite d'un paiement anticipé pour un total de 381 430 euros ; la diminution de valeur du bien qui aurait dû être vendu au prix de 2 300 000 euros et qui ne l'a été que pour 2 000 000 euros doit être indemnisée par la somme de 300 000 euros ; les intérêts bancaires supportés pour la somme de 97 727,52 euros devront être indemnisés ; les frais de conservation du bien pendant deux ans et deux mois devront être indemnisés par la somme de 275 942,39 euros ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Lepetit-Collin, rapporteur public,

- les observations de Me Jorion pour la SARL SH2 HEM, et les observations de Me A... du cabinet Seban et associés pour la commune de Bagnolet ;

Et pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 19 septembre 2014, présentée pour la SARL SH2 HEM, par Me Jorion ;

1. Considérant que, par jugement en date du 25 février 2010, le Tribunal administratif de Montreuil a, d'une part, annulé les décisions des 7 mai et 24 décembre 2008 par lesquelles le maire de la commune de Bagnolet a exercé le droit de préemption de la commune sur le bien appartenant à la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, au motif notamment qu'à la date desdites décisions, la commune de Bagnolet n'établissait pas l'existence d'un projet réel de nature à justifier la préemption litigieuse, d'autre part, condamné la commune de Bagnolet à verser à la société la somme de 80 000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2009 ; que, par deux demandes préalables indemnitaires des 18 mars et 18 mai 2011, reçues par la commune de Bagnolet respectivement les 21 mars et 24 mai 2011, la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE a demandé la réparation pour un montant de 1 060 177,91 euros du préjudice qu'elle estimait avoir subi pour la période du 1er janvier 2009 au 31 août 2011 du fait de l'illégalité des décisions de préemption précitées ; qu'à la suite du rejet implicite de ces réclamations, la société a saisi le Tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Bagnolet à lui verser la somme de 1 060 177, 91 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2011 ; que la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, relève régulièrement appel du jugement du 10 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande indemnitaire de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE et demande à la Cour de condamner la commune de Bagnolet à lui verser la somme de 1 055 099,91 euros ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'à l'issue d'une procédure de préemption qui n'a pas abouti, le propriétaire du bien en cause peut, si la décision de préemption est entachée d'illégalité, obtenir réparation du préjudice que lui a causé de façon directe et certaine cette illégalité ;

3. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et n'est plus sérieusement contesté en appel, que la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE a été intégralement indemnisée, par le jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 25 février 2010, du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision du 7 mai 2008 correspondant à la période entre le 15 mai 2008 et le 30 décembre 2008 ; que si la requérante fait toutefois encore valoir que l'indemnisation du préjudice subi allouée par le jugement du 25 février 2010 portait sur une période antérieure, elle ne saurait soutenir que la décision de préemption du 7 mai 2008 aurait eu pour effet de faire obstacle à la vente alors même qu'elle avait été retirée ;

4. Considérant, d'autre part, qu'à la suite de l'abrogation en date du 29 juillet 2008 de la décision du 7 mai 2008 par laquelle le maire de la commune de Bagnolet a exercé le droit de préemption de la commune sur le bien immobilier situé aux 10 à 18 de la rue Paul Bert lui appartenant, la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE a signé le 1er octobre 2008 avec la SCI Paul Bert un contrat qui l'engageait à vendre et cette dernière à acheter, au plus tard le 31 octobre 2009, sous réserve de la levée de conditions suspensives relatives à " la non préemption du bien par la mairie " et de l'obtention d'un permis de construire et de démolir purgé du recours des tiers dont le dépôt, qui aux termes du contrat devait intervenir avant le

15 février 2009, incombait à la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE ; qu'à la suite de la décision du 24 décembre 2008 par laquelle le maire de la commune de Bagnolet a exercé à nouveau le droit de préemption de la commune sur le bien, la SARL a expressément refusé par courrier de son conseil en date du 26 janvier 2009 de céder le bien au prix proposé par la commune de Bagnolet ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du courrier adressé dès le 23 février 2009 par le Tribunal de grande instance de Bobigny sur sa demande au conseil de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, que cette dernière, professionnelle de l'immobilier, comme d'ailleurs l'acquéreur, étaient, nonobstant les termes d'une attestation établie le 3 septembre 2013 pour les besoins de la cause par laquelle la gérante de la SCI Paul Bert atteste qu'elle n'a pas acheté le bien le 31 octobre 2009 au seul motif que la commune de Bagnolet n'était pas " à cette date, revenue sur sa décision " de préemption, informés que la commune de Bagnolet était réputée, conformément à l'article R. 213-11 du code de l'urbanisme, avoir renoncé à l'exercice de son droit de préemption dès lors que la juridiction compétente en matière d'expropriation n'avait pas été saisie dans le délai de quinze jours pour fixer un prix en application de cet article et qu'ainsi la condition suspensive correspondante était levée ; qu'en revanche l'autre condition suspensive du contrat relative à la purge du recours des tiers contre le permis de construire qui n'a pas été acquise avant le 9 juillet 2009 faisait, nonobstant la levée de la condition tenant à la préemption, obstacle à la réalisation de la vente jusqu'à cette date ; que la société requérante n'est ainsi pas fondée à soutenir que les dommages dont elle réclame l'indemnisation tenant au retard qu'elle aurait subi jusqu'au 28 février 2011, date de la vente effective du bien, à la diminution de valeur du bien, aux intérêts bancaires supportés pour une somme de 97 727,52 euros et aux frais de conservation du bien sont en lien direct et certain avec la décision illégale de préemption du 24 décembre 2008 ;

5. Considérant, en second lieu, que, pour la première fois en appel, la société requérante soutient que le comportement de la commune s'agissant de la délivrance du permis de construire et du certificat de permis de construire tacite aurait empêché la réalisation de la vente ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que si la SARL requérante a déposé le 9 février 2009 une demande de permis de construire et de démolir, la circonstance que la délivrance du permis de construire demandé ait été tacite à compter du 9 mai 2009 n'est pas, par elle-même, constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Bagnolet ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que si la commune a attendu le 5 octobre 2009 pour délivrer le certificat de permis de construire tacite, l'obtention de ce certificat de permis de construire tacite qui n'a pas empêché la société requérante d'accomplir les modalités d'affichage du permis de construire tacite, n'était pas une condition suspensive de la vente qu'elle n'a donc pu avoir pour effet de retarder, le contrat du 1er octobre 2008 n'exigeant que l'existence d'un permis de construire purgé des recours des tiers ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les dommages dont elle réclame l'indemnisation tenant aux conséquences précitées au point 4 d'un retard dans la vente du bien sont en lien direct et certain avec un retard de la commune à lui délivrer un certificat de permis de construire tacite ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bagnolet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, demande au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, le versement à la commune de Bagnolet de la somme de 2 000 euros, sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, est rejetée.

Article 2 : La SARL SH2 HEM, venant aux droits de la SARL HOTEL ELYSEE MONTPARNASSE, versera à la commune de Bagnolet une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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