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16/09/2014 | FRANCE | N°14VE00542

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 16 septembre 2014, 14VE00542


Vu la requête, enregistrée le 19 février 2014, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me Molenat, avocat ; M. C... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1308738 du 20 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 15 juillet 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce d

lai ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre a...

Vu la requête, enregistrée le 19 février 2014, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me Molenat, avocat ; M. C... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1308738 du 20 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 15 juillet 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;

4° de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, en contrepartie de la renonciation de ce dernier à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit faute de se prononcer sur sa situation au regard des dispositions des articles L. 313-14 et L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en outre, elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière faute pour le préfet de l'avoir préalablement invité à présenter ses observations ;

- ladite décision est entachée d'erreur de fait en ce qu'elle ne mentionne pas la présence de sa compagne, qui bénéficie d'un titre de séjour pour raisons médicales, et de leur enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en effet, alors qu'il est dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, sa présence est indispensable aux côtés de sa compagne, qui dispose d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;

- eu égard à ces circonstances, le préfet ne pouvait, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, refuser de l'admettre au séjour à titre exceptionnel en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; à cet égard, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui dispensent une telle mesure de toute motivation sont incompatibles avec l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ;

- ladite décision méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2014, le rapport de M. Huon, premier conseiller ;

1. Considérant que M.C..., de nationalité ivoirienne, relève appel du jugement du 20 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 15 juillet 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision litigieuse, prise au visa notamment des articles L. 313-10, L. 313-11 (7°) et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relève, en particulier, que, si M. C...déclare vivre en concubinage depuis 2009 avec une ressortissante étrangère admise au séjour pour raisons médicales et qui a vocation à retourner dans son pays d'origine dès que son état de santé le permettra, il n'établit une communauté de vie de manière probante que sur une période récente et ne justifie pas d'obstacles à poursuivre une vie familiale normale dans son pays d'origine où résident toujours cinq de ses six enfants dont quatre mineurs ; que cette décision, qui mentionne par ailleurs que l'intéressé n'établit pas davantage la réalité de sa présence continue en France depuis septembre 2005, relève, en conséquence, qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C..., lequel, en outre, n'allègue aucun motif exceptionnel ou humanitaire lui permettant de prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 313-14 du code susmentionné ; que ladite décision comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'à supposer qu'en soutenant que le refus de titre de séjour attaqué a été pris sans qu'il ait été mis en mesure de présenter ses observations, M. C... ait entendu invoquer les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne sont pas applicables aux décisions statuant sur une demande ; qu'ainsi, ce moyen est inopérant ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des motifs susrappelés que le préfet, qui n'était pas tenu de viser l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, s'est livré à un examen particulier de la situation du requérant au regard des dispositions des articles L. 313-11 (7°) et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que M. C...soutient que l'autorité administrative a entaché sa décision d'une double erreur de fait dès lors qu'elle a omis de faire mention, d'une part, de MmeB..., sa compagne, gravement malade, et, d'autre part, de l'enfant du couple ; que, toutefois, d'une part, il ressort des énonciations de la décision attaquée, rappelées au point 2., que le moyen susanalysé, pris en sa première branche, manque en fait ; que, d'autre part, s'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a effectivement reconnu l'enfant né le 19 août 2010 de MmeB..., il résulte de l'instruction que, même s'il avait retenu cette circonstance, le préfet, eu égard à l'ensemble des autres éléments caractérisant la vie privée et familiale de l'intéressé énumérés par l'arrêté attaqué, aurait pris la même décision ; que dans ces conditions, et à supposer même que l'omission en cause soit constitutive d'une erreur de fait, cette erreur est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de

l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

7. Considérant que, pour se prévaloir de ces dispositions, M. C...soutient que sa présence en France est indispensable aux côtés de sa compagne laquelle, gravement malade, est titulaire d'un titre de séjour pour raisons médicales et de leur enfant, né en août 2010 ; que, toutefois, et alors que l'acte de naissance de l'enfant fait apparaître que les intéressés résidaient alors à deux adresses différentes, le requérant qui se borne à produire ses derniers avis d'imposition ainsi que quelques factures EDF émises en 2013, sans apporter de justification ni même de précision sur les conditions d'existence du couple, n'établit ni l'ancienneté ni la stabilité du concubinage allégué, alors, par ailleurs, qu'il n'est pas contesté que cinq de ses six enfants dont quatre mineurs résident encore dans son pays d'origine ; qu'ainsi et même en admettant que, bien qu'étant apte à exercer une activité professionnelle, la mère de son enfant né en France nécessite l'aide d'une tierce personne dans les actes de la vie quotidienne, il ne ressort pas du dossier que M. C...lui apporterait effectivement une telle aide ; que, dans ces conditions, et faute de justifier du motif humanitaire qu'il invoque, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, enfin, que, pour les motifs énoncés au point 7, et alors, au surplus, que le requérant ne justifie d'aucune intégration professionnelle ou sociale en France, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier : " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ;

10. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient M.C..., les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont ni pour objet ni pour effet de restreindre le champ d'application de l'obligation de motivation des décisions de retour ; qu'elles se bornent à prévoir les cas où, la motivation de l'obligation de quitter le territoire étant identique à celle de la décision de refus de séjour dont elle procède nécessairement, elle n'a pas à faire l'objet d'une énonciation distincte ; qu'ainsi, le I de l'article L. 511-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas incompatible avec les dispositions précitées de l'article 12 de la directive ;

11. Considérant, d'autre part, que, dès lors que le refus de titre de séjour opposé à M. C... est lui-même suffisamment motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été visées, la mesure d'éloignement en litige n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte ainsi que le prévoit le I de l'article L. 511-1 précité ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

12. Considérant, en second lieu, que M. C...n'établit pas que la décision portant refus de séjour qui lui a été opposée serait entachée d'illégalité ; que, par suite, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la mesure d'éloignement en litige, ne peut qu'être écartée ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant, en premier lieu, qu'en indiquant que M. C...n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans tout autre pays dans lequel il serait admissible, le préfet de la Seine-Saint-Denis a suffisamment motivé sa décision ;

14. Considérant, en second lieu, que M. C...n'apporte aucune justification probante à l'appui du moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été prise en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes duquel " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de ladite convention doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 8. ci-dessus ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, de celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

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N° 14VE00542


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00542
Date de la décision : 16/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : MOLENAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-09-16;14ve00542 ?
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