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19/06/2014 | FRANCE | N°13VE02531

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 19 juin 2014, 13VE02531


Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2013, présentée pour M. C...B..., demeurant..., par Me Gannat, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0908521 du 25 juin 2012 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2° de condamner le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise à lui verser la somme de 75 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du harcèlement moral dont il affirme avoir été victime ;

3° de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Ois

e la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice adminis...

Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2013, présentée pour M. C...B..., demeurant..., par Me Gannat, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0908521 du 25 juin 2012 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2° de condamner le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise à lui verser la somme de 75 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du harcèlement moral dont il affirme avoir été victime ;

3° de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;

- il a été victime de harcèlement de la part des supérieurs hiérarchiques depuis son entrée au service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise ;

- il a fait l'objet de nombreux faits vexatoires et de dénigrements répétés de leur part ;

- la direction n'a pas réagi à ses alertes ;

- le harcèlement moral dont il a été victime a porté atteinte à sa réputation professionnelle et lui a causé un sentiment de dévalorisation professionnelle ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :

- le rapport de M. Luben, président-rapporteur,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de MeA... pour le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise ;

1. Considérant que M. B...a intégré le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise en qualité de caporal chef des sapeurs pompiers le 1er mai 1995 ; qu'il a alors été affecté à Villiers-le-Bel sur un poste opérationnel ; qu'il a ensuite assuré des fonctions d'opérateur téléphonique à partir de 1997, puis a été placé sur un poste administratif jusqu'en 2003 ; qu'il a été placé en congé maladie de janvier à septembre 2003, puis de novembre 2003 à avril 2004, en congé de longue maladie de mai 2004 à mai 2005, puis en congé de longue durée de mai 2005 à mai 2006 ; que M. B...a été placé en mi-temps thérapeutique à compter du 29 mai 2006 ; qu'il a alors intégré le centre technique départemental de Montmorency ; qu'il a adressé le 23 mars 2009 une demande tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du harcèlement moral dont il affirme avoir été victime ; que, par un jugement du 25 juin 2012, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête tendant à condamner le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise à lui verser la somme de 75 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise ;

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas suffisamment motivé n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, le requérant n'indiquant pas à quels moyens le juge de première instance n'aurait pas répondu ;

En ce qui concerne le bien fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

5. Considérant, d'autre part, que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'intégration de M.B..., lors de son entrée au service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise, a été difficile ; qu'il a fait l'objet de dénigrements de la part de ses supérieurs hiérarchiques, comme en témoignent des collègues du requérant ; que l'un de ses supérieurs a sollicité l'une d'entre elles pour faire un témoignage défavorable à son encontre ; que son domicile a fait l'objet d'une intrusion de pompiers en son absence à la demande de ses supérieurs hiérarchiques ; que les éléments de fait produits par M. B...sont dès lors susceptibles de faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral à son encontre ; que, cependant, le comportement de ses supérieurs hiérarchiques ne peut être apprécié sans tenir compte de l'attitude de M.B... ; qu'ainsi que l'établit le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise, l'attitude de ce dernier s'est caractérisée par un manque d'investissement dans ses fonctions, une conduite dangereuse des véhicules du service, la détérioration, qui aurait été involontaire, de certains équipements, le refus de tenir compte de certains des ordres et conseils que ses supérieurs hiérarchiques lui donnaient, la formulation d'injures à l'égard d'une agent du service, une usurpation de titre, le recours à des déclarations mensongères pour percevoir un supplément de traitement et la production de certificats médicaux de complaisance ; que, dans les circonstances de l'espèce, les agissements des supérieurs hiérarchiques de M. B... à son endroit n'ont pas excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et ne peuvent être qualifiés de harcèlement moral ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'en l'absence d'agissements constitutifs de harcèlement moral imputables à ses supérieurs hiérarchiques et, par suite, de faute de service, M. B...n'est pas fondé à demander la condamnation du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise à lui verser la somme de 75 000 euros ;

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour mette à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise introduites sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

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N° 13VE02531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE02531
Date de la décision : 19/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : BAZIN et CAZELLES AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-06-19;13ve02531 ?
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